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10/11/1999 | FRANCE | N°193836

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 10 novembre 1999, 193836


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 février et 2 juin 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES, dont le siège est à la CGT, case 425, à Montreuil Cedex (93514) ; la FEDERATION CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 décembre 1997 du ministre de l'emploi et de la solidarité portant extension de la convention collective nationale des hôtels, cafés, restauran

ts du 30 avril 1997 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 février et 2 juin 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la FEDERATION CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES, dont le siège est à la CGT, case 425, à Montreuil Cedex (93514) ; la FEDERATION CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 décembre 1997 du ministre de l'emploi et de la solidarité portant extension de la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants du 30 avril 1997 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels du 19 décembre 1966 ;
Vu le code du travail ;
Vu le décret n° 88-381 du 15 avril 1998 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Eoche-Duval, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la FEDERATION CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants, conclue le 30 avril 1997 entre six organisations patronales de la branche et trois organisations de salariés a, à l'exception de certaines stipulations, été étendue, par un arrêté du ministre de l'emploi et de la solidarité du 3 décembre 1997, aux entreprises comprises dans son champ d'application à l'exclusion des discothèques et des traiteurs organisateurs de réception ; que la FEDERATION CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES demande l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté ;
Sur la légalité externe de l'arrêté attaqué :
Considérant, d'une part, que, par un arrêté du 13 juin 1997 publié au Journal officiel le 17 juin 1997, M. Jean X..., directeur des relations du travail, a reçu délégation à l'effet de signer, au nom du ministre de l'emploi et de la solidarité, et dans la limite de ses attributions, tous actes, arrêtés, décisions ou conventions à l'exclusion des décrets ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait ;
Considérant, d'autre part, qu'il ressort de l'examen des pièces du dossier que la sous-commission des conventions et accords de la commission nationale de la négociation collective a exprimé, les 25 septembre et 26 novembre 1997, sur l'extension de la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants, un avis satisfaisant aux exigences de motivation résultant des dispositions combinées des articles L. 133-8 et L. 133-11 du code du travail ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'extension doit être écarté ;
Sur la légalité interne de l'arrêté attaqué :
Considérant que la fédération requérante soutient que l'arrêté attaqué est entaché d'illégalité en tant qu'il comporte extension des stipulations de l'article 21 de la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants qui concernent le régime d'équivalence dans l'industrie hôtelière de la durée légale de travail par catégorie de salariés, la rémunération des heures supplémentaires, la définition du contingent d'heures supplémentairesdispensé de l'autorisation administrative, les durées maximales journalières et hebdomadaires, le repos hebdomadaire, le repos quotidien ainsi que l'affichage et le contrôle de la durée du travail et qu'elle estime contraires, d'une part, aux règles fixées en la matière par le code du travail, d'autre part, aux stipulations d'accords internationaux ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des règles fixées par le code du travail :

Considérant que si l'article L. 212-1 du code du travail fixe à trente-neuf heures la durée légale du travail et prévoit que la durée quotidienne du travail effectif par salarié ne peut excéder dix heures, l'article L. 212-2 dispose que : "Des décrets en conseil des ministres déterminent les modalités d'application de l'article précédent pour l'ensemble des branches d'activité ou des professions ou pour une branche ou une profession déterminée. Les décrets fixent notamment l'aménagement et la répartition des horaires de travail, les périodes de repos, les conditions de recours aux astreintes, les dérogations permanentes ou temporaires applicables dans certains cas et pour certains emplois, les modalités de récupération des heures de travail perdues et les mesures de contrôle de ces diverses dispositions" ;
Considérant qu'en application de ces dispositions législatives est intervenu le décret du 15 avril 1988 relatif à la durée du travail dans les hôtels, cafés et restaurants ; qu'il ressort de l'examen des stipulations de l'article 21 de la convention collective du 30 avril 1997 qu'elles sont soit conformes aux dispositions de ce décret, soit plus favorables aux salariés ainsi que le permet l'article L. 133-4 du code du travail ; que, d'autre part, elles ne peuvent être regardées comme apportant aux libertés des salariés de cette branche professionnelle, en violation de l'article L. 120-2 du code, des "restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir (et) proportionnées au but recherché" ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations d'accords internationaux :
Considérant, d'une part, que les stipulations de l'article 7 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ouvert à la signature à New York le 19 décembre 1966 et publié au Journal officiel de la République française par décret du 29 janvier 1981 aux termes desquelles : "Les Etats partis au présent pacte reconnaissent le droit qu'à toute personne de jouir de conditions de travail justes et favorables, qui assurent notamment ( ...) d) Le repos, les loisirs, la limitation raisonnable de la durée du travail" ne produisent pas d'effets directs à l'égard des particuliers ; qu'elles ne peuvent, dès lors, être utilement invoquées par la fédération requérante à l'appui de sa contestation de la validité de la convention collective du 30 avril 1997 ;
Considérant, d'autre part, que les stipulations de la convention relatives à la durée du travail dans les hôtels, cafés, restaurants ne portent pas atteinte au droit qu'ont les salariés de cette branche professionnelle de mener une vie familiale normale conformément à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et en l'absence de contestation sérieuse de la validité des clauses de la convention collective du 30 avril 1997, que la fédération requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en procédant à son extension, le ministre aurait méconnu l'article L. 133-8 du code du travail qui lui permet d'exclure de l'extension les stipulations "qui seraient en contradiction avec les textes législatifs et réglementaires en vigueur"et à demander, pour ce motif, l'annulation de l'arrêté attaqué ;
Sur les conclusions de la FEDERATION CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la FEDERATION CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la FEDERATION CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION CGT DU COMMERCE, DE LA DISTRIBUTION ET DES SERVICES et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 193836
Date de la décision : 10/11/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-02 TRAVAIL ET EMPLOI - CONVENTIONS COLLECTIVES.


Références :

Arrêté du 13 juin 1997
Arrêté du 03 décembre 1997
Code du travail L133-8, L133-11, L212-1, L212-2, L133-4, L120-2
Décret du 29 janvier 1981
Décret du 15 avril 1988
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 10 nov. 1999, n° 193836
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Eoche-Duval
Rapporteur public ?: Mme Maugüé

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:193836.19991110
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