La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/11/1999 | FRANCE | N°202481

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 17 novembre 1999, 202481


Vu la requête enregistrée le 8 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE SAINT-DENIS ; le préfet demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 octobre 1998 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 23 juillet 1998 décidant la reconduite à la frontière de M. Mohammed X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le président du tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la conven

tion européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ...

Vu la requête enregistrée le 8 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE SAINT-DENIS ; le préfet demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 octobre 1998 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 23 juillet 1998 décidant la reconduite à la frontière de M. Mohammed X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le président du tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Desrameaux, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ..." ;
Considérant que M. X..., ressortissant du Royaume du Maroc, ne justifie pas de l'existence de circonstances particulières de nature à établir que le PREFET DE LA SEINE SAINT-DENIS aurait apprécié de manière manifestement erronée les conséquences qu'une mesure de reconduite à la frontière pouvait avoir sur sa situation personnelle ; qu'ainsi, c'est à tort que, pour annuler l'arrêté du 23 juillet 1998 décidant la reconduite à la frontière de M. X..., le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette mesure ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. X... devant le président du tribunal administratif ;
Considérant que l'arrêté attaqué énonce avec une précision suffisante les éléments de droit et de fait sur lesquels le PREFET DE LA SEINE SAINT-DENIS s'est fondé pour décider la reconduite à la frontière de M. X... ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cet arrêté serait entaché d'un défaut de motivation doit être écarté ;
Considérant que la circulaire du ministre de l'intérieur en date du 24 juin 1997 relative au réexamen de la situation de certaines catégories d'étrangers en situation irrégulière ne présente pas un caractère réglementaire ; qu'ainsi, M. X... ne saurait utilement se prévaloir de ce que la décision du PREFET DE LA SEINE SAINT-DENIS en date du 26 décembre 1997 refusant de lui délivrer un titre de séjour aurait été prise en méconnaissance de la teneur de cette circulaire ; que, dès lors, il n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de ladite décision au soutien de ses conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ; que, si M. X... est entré sur le territoire français en 1989, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu notamment de la durée effective et des conditions du séjour en France de l'intéressé, dont l'épouse et l'enfant résident au Maroc, le PREFET DE LA SEINE SAINT-DENIS ait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté attaqué ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à prétendre que le préfet aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 23 juillet 1998 ;
Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 19 octobre 1998 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le président du tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SEINE SAINT-DENIS, à M. Mohammed X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 202481
Date de la décision : 17/11/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 23 juillet 1998
Circulaire du 24 juin 1997
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Loi 98-349 du 11 mai 1998
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 17 nov. 1999, n° 202481
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Desrameaux
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:202481.19991117
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award