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29/11/1999 | FRANCE | N°171834

France | France, Conseil d'État, 2 ss, 29 novembre 1999, 171834


Vu le recours du MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE, enregistré le 9 août 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 8 mars 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de la clinique chirurgicale d'Antony, l'arrêté du 25 juin 1993 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France a autorisé cet établissement à poursuivre une activité d'anesthésie ou de chirurgie ambulatoire dans la limite de six pla

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Vu le recours du MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE, enregistré le 9 août 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 8 mars 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de la clinique chirurgicale d'Antony, l'arrêté du 25 juin 1993 par laquelle le préfet de la région Ile-de-France a autorisé cet établissement à poursuivre une activité d'anesthésie ou de chirurgie ambulatoire dans la limite de six places, ainsi que la décision de rejet en date du 23 février 1994 opposée par le ministre requérant au recours hiérarchique formé contre ledit arrêté ;
2°) de rejeter la demande présentée par la clinique chirurgicale d'Antony devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu l'article 36 de la loi n° 96-452 du 28 mai 1996 ;
Vu la loi n° 91-748 du 31 juillet 1991 modifiée ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le décret n° 92-1101 du 2 octobre 1992 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Honorat, Commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité du recours du ministre :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué du tribunal administratif de Paris a été notifié au ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville, dans les conditions prévues par l'article R. 211 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le 21 juin 1995 ; que le recours du MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE dirigé contre ce jugement a été enregistré le 9 août 1995, soit dans le délai de deux mois imparti pour faire appel par l'article R. 229 du même code ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée par la clinique chirurgicale d'Antony doit être écartée ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles L. 712-2, 2°,a), L. 712-8,2°, L. 712-14 et L. 712-16, insérés dans le code de la santé publique par l'article 4 de la loi n° 91-748 du 31 juillet 1991, portant réforme hospitalière, la réalisation des projets relatifs à la création, à l'extension et à la transformation des installations nécessaires aux besoins de la population que sont "les structures de soins alternatives à l'hospitalisation", est subordonnée à la délivrance d'une autorisation, accordée pour une durée de cinq ans au moins, par le représentant de l'Etat, lorsque le projet satisfait, notamment, ainsi que l'exige l'article L. 712-9, 3° du code précité, "à des conditions techniques de fonctionnement fixées par décret" ; que les articles R. 712-2-1 et R. 712-2-3 du même code, dans leur rédaction issue de l'article 1er du décret n° 92-1101 du 2 octobre 1992, précisent le premier, que les structures de soins alternatives à l'hospitalisation "ont pour objet d'éviter une hospitalisation à temps complet ou d'en diminuer la durée" et "comprennent notamment" : b) les structures pratiquant l'anesthésie ou la chirurgie ambulatoire", le second, que la capacité de ces structures est "exprimée en places", dont lenombre "est obtenu en divisant par 365 le nombre maximum annuel de patients pouvant être accueillis pour une durée inférieure à un jour ..." ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 24 de la loi n° 91-748 du 31 juillet 1991, précité : "Les établissements publics de santé qui, antérieurement à la date de la promulgation de la présente loi, comportaient des structures de soins alternatives à l'hospitalisation mentionnées à l'article L. 712-2 du code de la santé publique sont autorisés à poursuivre cette activité, à condition d'en faire la déclaration au représentant de l'Etat et de respecter, dans un délai fixé par décret, les conditions techniques prévues au 3° de l'article L. 712-9 dudit code" ; que ces dispositions ont été étendues aux établissements de santé privés par l'article 10 de la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991, portant diverses dispositions d'ordre social; que, selon l'article 2, premier alinéa, du décret n° 92-1101 du 2 octobre 1992, déjà mentionné, "les établissements de santé publics et privés qui comportaient des structures de soins alternatives à l'hospitalisation à la date de la publication de la loi du 31 juillet 1991 modifiée, susvisée, disposent d'un délai de quatre mois pour procéder, auprès du préfet de région, à la déclaration prévue par l'article 24 de cette loi. Les modalités et le contenu de cette déclaration, où devront figurer notamment les informations permettant d'apprécier la consistance et l'activité de la structure de soins à la date précitée, sont définis par un arrêté du ministre chargé de la santé ..." ; que l'article 2 de l'arrêté du ministre de la santé et de l'action humanitaire du 12 novembre 1992 a précisé les critères au regard desquels les préfets de région devraient procéder à cette appréciation, notamment dans le cas des structures pratiquant l'anesthésie ou la chirurgie ambulatoire, l'un de ces critères tenant à l'"existence d'un ou plusieurs espaces de repos individualisés, équipés de lits ou fauteuils exclusivement destinés aux patients pris en charge par la structure et d'arrivées de fluides médicaux, à raison d'au moins une arrivée de fluide pour deux lits" ; qu'aux termes du second alinéa, première phrase, de l'article 2 du décret n° 92-1101 du 2 octobre 1992 : "le préfet de région délivre un récépissé du dépôt de la déclaration, qui vaut autorisation de poursuite d'activité pour chaque structure de soins concernée ..." ;
Considérant que, par un arrêté du 25 juin 1993, pris sur le fondement des dispositions précitées et, notamment celles de l'article 2 de l'arrêté du ministre de la santé et de l'action humanitaire du 12 novembre 1992, le préfet de la région Ile-de-France a refusé de délivrer à la clinique chirurgicale d'Antony un récépissé de déclaration valant autorisation de poursuite d'activité, au motif que la consistance de la structure au 2 août 1991 ne pouvait pas être reconnue au sens des dispositions dudit arrêté; que par un jugement du 8 mars 1995, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté préfectoral, au motif que cet établissement était fondé à se prévaloir à l'encontre dudit arrêté de ce que le ministre de la santé et de l'action humanitaire avait excédé les limites de l'habilitation qu'il tenait de l'article 2, premier alinéa, précité, du décret n° 92-1101 du 2 octobre 1992, en édictant à l'article 2 de son arrêté du 12 novembre 1992, des conditions réglementaires s'imposant aux préfets de région dans l'appréciation de la consistance et de l'activité des structures de soins déclarées ;

Considérant que le MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE invoque au soutien du recours qu'il a formé contre le jugement ainsi rendu, les dispositions de l'article 36 de la loi n° 96-452 du 28 novembre 1996, aux termes duquel : "Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les décisions concernant la poursuite de l'activité de structures de soins alternatives à l'hospitalisation prises sur le fondement de l'arrêté ministériel du 12 novembre 1992, relatif aux modalités et au contenu de la déclaration prévue à l'article 24 de la loi n° 91-748 du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière, sont validées, en tant que leur légalité serait contestée par le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur dudit arrêté" ;
Considérant que cet article, qui réserve expressément les droits nés des décisions passées en force de chose jugée, a pour objet, non de valider intégralement les décisions prises sur le fondement de l'arrêté ministériel du 12 novembre 1992, mais seulement de rendre insusceptible d'être invoqué devant le juge de l'excès de pouvoir le moyen tiré de ce que l'auteur de cet arrêté a excédé les limites de l'habilitation qu'il tenait de l'article 2, premier alinéa, du décret n° 92-1101 du 2 octobre 1992, en édictant des conditions réglementaires s'imposant aux préfets de région dans l'appréciation de la consistance et de l'activité des structures de soins déclarées ; qu'ainsi, le motif tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté du 12 novembre 1992 sur lequel le tribunal administratif s'est fondé pour annuler l'arrêté du préfet de la région Ile-deFrance du 25 juin 1993 et la décision implicite de rejet opposé par le ministre délégué à la santé au recours hiérarchique formé contre ledit arrêté, ne peut être maintenu ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance par la clinique chirurgicale d'Antony ;
Considérant que l'arrêté préfectoral attaqué et la décision de rejet précitée du ministre délégué à la santé comportent la mention des dispositions législatives et réglementaires applicables et font état de la circonstance que si la consistance de la structure de l'établissement déclarant pouvait être reconnue au 2 août 1991, son activité réalisée correspondait à une capacité de six places ; que, de ce fait, par l'indication de ces considérations de fait et de droit, cette décision satisfait aux prescriptions de l'article 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, selon lesquelles doivent notamment être motivées "les décisions qui ... refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir" ;

Considérant que l'article 8, premier alinéa, du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983, selon lequel les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter ses observations, précise que cette règle n'est pas applicable dans le cas où "il est statué sur une demande présentée par l'intéressé lui-même" ; que l'arrêté préfectoral contesté par la clinique chirurgicale d'Antony a été pris au vu de la déclaration par laquelle cet établissement avait sollicité l'autorisation de poursuivre une activité de chirurgie ambulatoire ; qu'ainsi ni l'article 8 du décret du 28 novembre 1983, ni d'ailleurs aucun autre texte ou principe général du droit n'obligeait l'autorité administrative à ne prendre sa décision qu'après avoir mis à même la clinique chirurgicale d'Antony de formuler ses observations ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de l'arrêté du ministre de la santé et de l'action humanitaire du 12 novembre 1992 : "La vérification des informations contenues dans la déclaration ... peut être faite notamment au moyen de demandes d'informations complémentaires écrites ou de visites effectuées sur place ..." ; que ces dispositions n'ont pas pour effet de subordonner la rectification par l'administration des éléments déclarés par la clinique à une visite de l'établissement par les services compétents ; que, par suite, le moyen tiré de ce que, faute d'une telle visite, la procédure préalable à la décision attaquée serait irrégulière, n'est pas fondé ;
Considérant que le fait qu'un "comité de liaison" dont l'existence n'est prévue par aucun texte législatif et réglementaire, aurait pris part à l'instruction de la déclaration souscrite par la clinique chirurgicale d'Antony, est sans influence sur la légalité de l'arrêté préfectoral pris au vu de cette dernière ;
Considérant que la date à laquelle l'activité effective de la structure de soinsalternative à l'hospitalisation déclarée par un établissement de soins privé doit être appréciée est celle de l'entrée en vigueur de la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991 ; que le préfet et le ministre ont légalement pu se fonder, pour apprécier l'activité effective de la structure de soins déclarée par la clinique chirurgicale d'Antony, sur les dispositions, non contraires à celles de l'article 24 de la loi du 31 juillet 1991 modifiée, de l'article 2 de l'arrêté ministériel du 12 novembre 1992, prévoyant qu'une telle appréciation serait effectuée d'après le nombre de patients pris en charge au cours des trois derniers mois de l'année 1991 ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en estimant que l'activité d'anesthésie ou de chirurgie ambulatoire effectivement constatée pendant la période de référence et que la clinique était donc autorisée à poursuivre, devait être limitée à l'équivalent de six places, les auteurs des décisions attaquées aient commis une erreur de fait ; que la circonstance qu'avant le 31 décembre 1991, douze places avaient fait l'objet d'un conventionnement avec un organisme de sécurité sociale, est, en tout état de cause sans influence sur la légalité des décisions attaquées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué du tribunal administratif de Paris et le rejet de la demande de la clinique chirurgicale d'Antony devant ce tribunal ;
Sur l'application de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à clinique chirurgicale d'Antony la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 8 mars 1995 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la clinique chirurgicale d'Antony devant le tribunal administratif de Paris et les conclusions qu'elle a présentées devant le Conseil d'Etat sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'emploi et de la solidarité et à la clinique chirurgicale d'Antony.


Synthèse
Formation : 2 ss
Numéro d'arrêt : 171834
Date de la décision : 29/11/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

61-07 SANTE PUBLIQUE - ETABLISSEMENTS PRIVES D'HOSPITALISATION.


Références :

Arrêté du 12 novembre 1992 art. 2, art. 3
Arrêté du 25 juin 1993
Code de la santé publique R712-2-1, R712-2-3
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R211, R229, L712-2, L712-9, 2
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 8
Décret 92-1101 du 02 octobre 1992 art. 1, art. 2
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 3
Loi 91-1406 du 31 décembre 1991 art. 10
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Loi 91-748 du 31 juillet 1991 art. 4, art. 24
Loi 96-452 du 28 novembre 1996 art. 36


Publications
Proposition de citation : CE, 29 nov. 1999, n° 171834
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Mary
Rapporteur public ?: M. Honorat

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:171834.19991129
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