La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/1999 | FRANCE | N°159041

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 03 décembre 1999, 159041


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 juin et 27 septembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la REGION GUADELOUPE, représentée par sa présidente en exercice, dûment autorisée par délibération en date du 15 septembre 1994 de la commission permanente du conseil régional ; la REGION GUADELOUPE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 1er mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé, à la demande de M. Roland Thésauros, les délibérations en date du 9 juill

et 1993 par lesquelles le conseil régional a respectivement approuvé le...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 juin et 27 septembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la REGION GUADELOUPE, représentée par sa présidente en exercice, dûment autorisée par délibération en date du 15 septembre 1994 de la commission permanente du conseil régional ; la REGION GUADELOUPE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 1er mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé, à la demande de M. Roland Thésauros, les délibérations en date du 9 juillet 1993 par lesquelles le conseil régional a respectivement approuvé le compte administratif 1992 et voté le budget supplémentaire pour 1993 ;
2°) rejette la demande présentée par M. Thésauros devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 modifiée, relative aux droits et libertés de communes, des départements et des régions ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Guilhemsans, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat du président du conseil régional de la Guadeloupe et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par deux délibérations en date du 9 juillet 1993, le conseil régional de Guadeloupe a, d'une part, approuvé le compte administratif de l'année 1992, d'autre part, voté le budget supplémentaire de la région pour 1993 ; que ces délibérations ont été transmises au préfet le 23 juillet 1993 ; que M. Thésauros, conseiller régional de Guadeloupe, a formé le 29 septembre 1993 une demande en annulation devant le tribunal administratif de Basse-Terre ; que la REGION GUADELOUPE fait appel du jugement du 1er mars 1994 par lequel le tribunal a annulé les deux délibérations ;
Sur le compte administratif de l'année 1992 :
Considérant qu'aux termes de l'article 51 de la loi susvisée du 2 mars 1982, applicable aux régions en vertu de son article 83 : " ... Lorsque l'arrêté des comptes départementaux fait apparaître dans l'exécution du budget départemental un déficit égal ou supérieur à 5 % des recettes du budget de fonctionnement du budget départemental, la chambre régionale des comptes, saisie par le représentant de l'Etat, propose au département les mesures nécessaires au rétablissement de l'équilibre budgétaire, dans le délai de un mois à compter de cette saisine ... En cas de mise en oeuvre des dispositions des alinéas précédents, la procédure prévue à l'article 8 n'est pas applicable" ; qu'il ressort de ces dispositions qu'aucun délai n'est imparti au préfet de région pour saisir la chambre régionale des comptes du compte administratif de la région lorsque celui-ci présente un déficit d'au moins 5 % des recettes du budget de fonctionnement de cette collectivité ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si la demande par laquelle M. Thésauros sollicitait l'annulation des deux délibérations susmentionnées a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Basse-Terre le 29 septembre 1993, à une date à laquelle le préfet n'avait pas saisi la chambre régionale des comptes en application des dispositions précitées, elle l'a été plus de deux mois après la réunion du conseil régional de Guadeloupe du 9 juillet 1993 à laquelle il participait ; que, dès lors, la REGION GUADELOUPE est fondée à soutenir que les conclusions de la demande de M. Thésauros tendant à l'annulation de la délibération approuvant le compte administratif de la région pour 1992 ont été enregistrées postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux et qu'elles étaient donc tardives et par suite irrecevables ; que la REGION GUADELOUPE est donc fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque, en tant qu'il a annulé la délibération approuvant le compte administratif de l'année 1992 ;
Sur le budget supplémentaire de l'année 1993 :
En ce qui concerne la recevabilité des conclusions de M. Thésauros devant letribunal administratif :
Considérant, en premier lieu, que les délibérations susmentionnées, approuvant respectivement le compte administratif de la REGION GUADELOUPE pour 1992 et le budget supplémentaire de la région pour 1993 présentent entre elles un lien suffisant ; que, par suite, la région n'est pas fondée à soutenir que la demande de M. Thésauros aurait dû être regardée comme irrecevable par les premiers juges dans la mesure où elle tendait par une requête unique à l'annulation de deux délibérations ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 alors en vigueur de la loi du 2 mars 1982, tel que modifié par l'article 13-II de la loi du 22 juillet 1982, et applicable au budget de la région en vertu des articles 51 et 83 de la même loi : " ... Lorsque le budget d'une commune n'est pas voté en équilibre réel, la chambre régionale des comptes, saisie par le représentant de l'Etat dans un délai de trente jours à compter de la transmission prévue à l'article 2, le constate et propose à la commune, dans un délai de trente jours à compter de sa saisine, les mesures nécessaires au rétablissement de l'équilibre budgétaire et demande au conseil municipal une nouvelle délibération. La nouvelle délibération du conseil municipal, rectifiant le budget initial, doit intervenir dans un délai d'un mois à partir de la communication des propositions de la chambre régionale des comptes. Si le conseil municipal n'a pas délibéré dans le délai prescrit, ou si la délibération prise ne comporte pas de mesures de redressement jugées suffisantes par la chambre régionale des comptes qui se prononce sur ce point dans un délai de quinze jours à partir de la transmission de la nouvelle délibération, le budget est réglé et rendu exécutoire par le représentant de l'Etat dans le département ..." ;
Considérant que si l'existence de la procédure prévue par les dispositions précitées fait obstacle à ce que soient présentées devant le juge de l'excès de pouvoir des prétentions dirigées contre les délibérations budgétaires du conseil régional et fondées sur la méconnaissance de la régle de l'équilibre réel, cette irrecevabilité ne peut être opposée aux personnes justifiant d'un intérêt lorsque le représentant de l'Etat n'a pas saisi la chambre régionale des comptes dans le délai de trente jours imparti par l'article 8 de la loi du 2 mars 1982 ; qu'en pareil cas, les demandeurs disposent pour invoquer le moyen tiré de cette méconnaissance d'un délai de deux mois qui commence à courir à l'expiration du délai de trente jours précité ; qu'en l'espèce, le représentant de l'Etat n'ayant pas, à cette date, saisi la chambre régionale des comptes de la délibération du conseil régional du 9 juillet 1993, la demande présentée au tribunal administratif le 29 septembre 1993 par M. Thésauros et fondée sur la méconnaissance par cette délibération de la régle de l'équilibre réel était recevable ;
En ce qui concerne la légalité de la délibération approuvant le budget supplémentaire 1993 :

Considérant que le budget supplémentaire de la REGION GUADELOUPE pour 1993 comporte en report au chapitre 927, article 16-10-00 (emprunt globalisé CDC.CLF-Plan d'urgence des lycées) une recette de 350 millions de francs, qui était inscrite au compte administratif pour 1992 au titre des recettes d'investissement restant à réaliser ; que la région ne justifie pas du caractère juridiquement certain de cette recette en se bornant à invoquer l'existence d'un emprunt contracté le 8 décembre 1992 auprès de la Landesbank Rheinland International SA, dont ni l'objet, ni d'ailleurs l'organisme prêteur, ne correspondent à ceux mentionnés dans les documents budgétaires ; qu'il s'ensuit que le budget supplémentaire de la région n'a pas été voté en équilibre réel, quand bien même la région aurait contracté par la suite, au cours de l'exercice 1993 de nouveaux emprunts, dont elle soutient qu'ils auraient dû être pris en compte dès l'établissement dudit budget ; que c'est, dès lors, à bon droit que le tribunal administratif deBasse-Terre a annulé la délibération du 9 juillet 1993 approuvant le budget supplémentaire de la région pour 1993 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la REGION GUADELOUPE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé la délibération approuvant le compte administratif régional pour 1992 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Basse-Terre en date du 1er mars 1994 est annulé en tant qu'il statue sur la délibération approuvant le compte administratif de la REGION GUADELOUPE pour 1992.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la REGION GUADELOUPE devant le Conseil d'Etat et les conclusions présentées par M. Thésauros devant le tribunal administratif tendant à l'annulation de la délibération du conseil régional de Guadeloupe approuvant le compte administratif pour 1992, sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la REGION GUADELOUPE, à M. Roland Thésauros et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 159041
Date de la décision : 03/12/1999
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

- RJ1 COLLECTIVITES TERRITORIALES - DISPOSITIONS GENERALES - DISPOSITIONS FINANCIERES - CONTROLE DES COLLECTIVITES TERRITORIALES PAR LES JURIDICTIONS FINANCIERES - Compte administratif d'une région - Exécution du budget en déficit d'au moins 5% des recettes du budget de fonctionnement - Délai de saisine de la chambre régionale des comptes par le préfet - Absence - Conséquences - Délai de recours contentieux contre la délibération approuvant le compte - Point de départ - Réunion du conseil régional à laquelle le requérant participait (1).

135-01-07-07, 135-04-03-01, 18-02-05, 18-07-02-03, 54-01-07-02-03 Il ressort des dispositions des articles 51 et 83 de la loi du 2 mars 1982 qu'aucun délai n'est imparti au préfet de région pour saisir la chambre régionale des comptes du compte administratif de la région lorsque celui-ci présente un déficit d'au moins 5% des recettes du budget de fonctionnement de cette collectivité. Il s'ensuit que la demande par laquelle un requérant sollicite l'annulation de la délibération approuvant le compte administratif d'une région, présentée plus de deux mois après la réunion du conseil régional à laquelle le requérant participait, et alors que le préfet n'avait pas saisi la chambre régionale des comptes, est tardive.

- RJ1 COLLECTIVITES TERRITORIALES - REGION - FINANCES REGIONALES - BUDGET - Compte administratif d'une région - Exécution du budget en déficit d'au moins 5% des recettes du budget de fonctionnement - Délai de saisine de la chambre régionale des comptes par le préfet - Absence - Conséquences - Délai de recours contentieux contre la délibération approuvant le compte - Point de départ - Réunion du conseil régional à laquelle le requérant participait (1).

- RJ1 COMPTABILITE PUBLIQUE - BUDGETS - CONTROLE DES BUDGETS DES COLLECTIVITES LOCALES PAR LES CHAMBRES REGIONALES DES COMPTES - Compte administratif d'une région - Exécution du budget en déficit d'au moins 5% des recettes du budget de fonctionnement - Délai de saisine de la chambre régionale des comptes par le préfet - Absence - Conséquences - Délai de recours contentieux contre la délibération approuvant le compte - Point de départ - Réunion du conseil régional à laquelle le requérant participait (1).

- RJ1 COMPTABILITE PUBLIQUE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES A LA COMPTABILITE PUBLIQUE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DELAI - Compte administratif d'une région - Exécution du budget en déficit d'au moins 5% des recettes du budget de fonctionnement - Délai de saisine de la chambre régionale des comptes par le préfet - Absence - Conséquences - Délai de recours contentieux contre la délibération approuvant le compte - Point de départ - Réunion du conseil régional à laquelle le requérant participait (1).

- RJ1 PROCEDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DELAIS - POINT DE DEPART DES DELAIS - AUTRES CIRCONSTANCES DETERMINANT LE POINT DE DEPART DES DELAIS - Compte administratif d'une région - Exécution du budget en déficit d'au moins 5% des recettes du budget de fonctionnement - Délai de saisine de la chambre régionale des comptes par le préfet - Absence - Conséquences - Délai de recours contentieux contre la délibération approuvant le compte - Point de départ - Réunion du conseil régional à laquelle le requérant participait (1).


Références :

Loi du 22 juillet 1982 art. 13
Loi 82-213 du 02 mars 1982 art. 51, art. 83, art. 8

1. Comp. Sect. 1988-12-23, Département du Tarn c/ Barbut, p. 466


Publications
Proposition de citation : CE, 03 déc. 1999, n° 159041
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: Mme Guilhemsans
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:159041.19991203
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award