Vu la requête, enregistrée le 4 janvier 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mohamed Ali X... demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement n° 984991 du 13 novembre 1998 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 novembre 1998 du préfet de Seine-et-Marne décidant sa reconduite à la frontière ;
2°) annule pour excès de pouvoir cette décision ;
3°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 8 et 13 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Bonnat, Auditeur,
- les conclusions de M. Seban, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant que l'arrêté attaqué en date du 4 novembre 1998 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a décidé la reconduite à la frontière de M. X... est signé par M. François Xavier Y..., secrétaire général de la préfecture de Seine-et-Marne ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en date du 9 février 1998 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a donné délégation de signature à M. Y..., habilite ce dernier à signer, au nom du préfet de Seine-etMarne : "tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports et correspondances en toutes matières se rapportant à l'administration du département, à l'exclusion des arrêtés de conflits ; les décisions préfectorales prises en application de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, portant expulsion de ressortissants étrangers, ainsi que les décisions fixant le pays de renvoi ; les décisions préfectorales prises en application de l'article 28 portant assignation à résidence de ressortissants étrangers." ; qu'aucune de ces dispositions n'habilitant M. Y... à signer les arrêtés de reconduite à la frontière pris sur le fondement de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, l'arrêté attaqué du 4 novembre 1998 est entaché d'incompétence ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 novembre 1998 du préfet de Seine-et-Marne décidant sa reconduite à la frontière et à demander l'annulation dudit jugement et de ladite décision ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 5 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 13 novembre 1998 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun et l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne en date du 4 novembre 1998 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. X... une somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Mohamed Ali X..., au préfet de Seine-etMarne et au ministre de l'intérieur.