Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enrégistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 8 janvier 1999 et 3 mars 1999 présentés pour M. Jamal X..., de nationalité marocaine, demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement en date du 8 décembre 1998 par lequel le président délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 décembre 1998 par lequel le préfet du Gard a décidé sa reconduite à la frontière ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n°53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Vestur, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Guiguet, Bachellier, de la Varde, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "L'audience est publique. Elle se déroule( ...) en présence de l'intéressé, sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas"; que, si M. X... conteste avoir reçu une convocation et fait valoir qu'il ne ressort pas des éléments du dossier que cette convocation ait été envoyée à lui ou à son avocat, il ressort cependant des mentions du jugement attaqué, lesquelles font foi jusqu'à preuve du contraire, que les parties ont été convoquées à l'audience ; que la preuve contraire n'est pas apportée par le requérant ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué aurait été rendu à la suite d'une procédure irrégulière doit être écarté ;
Considérant, d'autre part, qu'en vertu des dispositions de l'article R. 241-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, l'instruction et le jugement des recours dirigés contre les arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière ne sont soumis qu'aux dispositions des articles R. 241-2 à R. 241-20 dudit code, lesquelles ne prévoient pas que les observations produites en défense par l'administration doivent être communiquées au requérant ; qu'en l'absence de dispositions expresses, le principe général du caractère contradictoire de la procédure n'imposait pas une telle communication, dès lors qu'en l'espèce le requérant a été en mesure de prendre connaissance de ces observations, dont il lui appartenait de demander communication ;
Considérant qu'il suit de là que M. X... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué aurait été rendu sur une procédure irrégulière ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'il appartient à l'administration de justifier de la légalité de ses décisions lorsque celle-ci fait l'objet d'une contestation devant le juge de l'excès de pouvoir ;
Considérant qu'à l'appui de sa requête dirigée contre l'arrêté du 3 décembre 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X... soutient, par la voie de l'exception, que la décision de refus de titre de séjour en date du 14 avril 1998 qui lui a été opposée, a été signée par un fonctionnaire n'ayant pas reçu de délégation régulière de signature pour ce faire ; qu'invitée à présenter ses observations sur ce moyen, l'administration s'est abstenue d'apporter toute précision ; qu'elle doit être réputée avoir acquiescé aux faits invoqués par le requérant ; que l'illégalité dont se trouve affectée la décision du 14 avril 1998 refusant à l'intéressé un titre de séjour prive de base légale la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre ; que M. X... est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président délégué par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demandetendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 décembre 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 8 décembre 1998 et l'arrêté du préfet du Gard en date du 3 décembre 1998 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jamal X..., au préfet du Gard et au ministre de l'intérieur.