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05/01/2000 | FRANCE | N°170954

France | France, Conseil d'État, Section, 05 janvier 2000, 170954


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet et 8 novembre 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 avril 1995 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande des sociétés Den Danske Bank International, BFG Bank Luxembourg et Banco di Napoli International, la délibération du 1er avril 1988 par laquelle le conseil municipal de Maco

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet et 8 novembre 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 avril 1995 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande des sociétés Den Danske Bank International, BFG Bank Luxembourg et Banco di Napoli International, la délibération du 1er avril 1988 par laquelle le conseil municipal de Macot-la-Plagne a retiré deux délibérations du 11 mars 1988 relatives à la garantie d'emprunt accordée à la SARL Les Créolies de Macot, ensemble la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par la commune sur le recours gracieux qui lui a été adressé par ces sociétés le 28 août 1991 ;
2°) de rejeter la demande présentée par les sociétés précitées devant le tribunal administratif ;
3°) de les condamner à lui payer la somme de 25 000 F, en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le nouveau code de procédure civile ;
Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, notamment l'article 6-I ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Guilhemsans , Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par deux délibérations du 11 mars 1988, le conseil municipal de Macot-la-Plagne a décidé respectivement de donner un terrain en bail à construction à la SARL "Les Créolies de Macot", moyennant une redevance de 1 800 000 F représentant 30 ans de loyer, payables d'avance, en vue de la construction d'un hôtel sur ce terrain et d'accorder sa garantie à l'emprunt de 13 500 000 DM en trois tranches contracté par cette société auprès de la société Idis Finances ; qu'il a toutefois retiré ces deux délibérations par une nouvelle délibération du 1er avril 1988 dont, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé l'annulation ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant que le maire de Macot-la-Plagne a été informé le 6 avril 1988 par la société Idis Finances qu'elle s'était substitué dans ses obligations de prêteur les sociétés Provinsbanken International, Banco di Napoli International et BFG Bank Luxembourg, qui avaient repris respectivement les première, deuxième et troisième tranches du prêt ; que la délibération du 1er avril 1988 a été notifiée à la société Idis France le 15 juin 1989 ; que l'avocat de la commune, mandaté à cet effet, l'a ultérieurement notifiée avec la mention des voies et délais de recours à la société Provinsbanken International, le 28 mars 1990 et aux deux autres établissements bancaires prêteurs le 30 avril 1991 ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la possibilité d'une substitution à Idis Finances d'autres établissements bancaires était expressément prévue par les contrats de prêt visés par le maire et les actes de garantie signés par lui ; que cette substitution n'était pas exclue par les délibérations du 11 mars 1988 et ne nécessitait pas d'approbation préalable du conseil municipal ; que le maire de la commune ayant été informé le 6 avril 1988 de cette substitution, la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE n'est pas fondée à soutenir que la notification à Idis-Finances de la délibération du 1er avril 1988 avait fait courir le délai de recours contentieux à l'égard des trois établissements bancaires susmentionnés contre cette délibération ; que ce délai n'a commencé à courir qu'à compter des notifications effectuées par l'avocat de la commune ;
Considérant, toutefois, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le recours gracieux formé par la société Provinsbanken International le 24 avril 1990 contre la délibération du 1er avril 1988, qui lui avait été régulièrement notifiée le 28 mars 1990, ainsi qu'il a été dit plus haut, n'était pas rédigé en français ; que, dès lors, il n'a pu interrompre le délai de recours contentieux contre cette délibération ; que la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE est ainsi fondée à soutenir que la société "Den Danske Bank International", qui a succédé aux droits de la société Provinsbanken International, était forclose le 26 février 1992, date d'enregistrement de sa requête au tribunal administratif de Grenoble ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Sauf en matière de travaux publics, le tribunal administratif ne peut être saisi que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ; que si l'article R. 105 du même code rend applicable aux demandes portées devant les tribunaux administratifs les dispositions de l'article 643 du nouveau code de procédure civile, aux termes duquel : "Lorsque la demande est portée devant une juridiction qui a son siège en France métropolitaine, les délais de comparution, d'appel, d'opposition, de recours en révision et de pourvoi en cassation sont augmentés de : 1. Un mois pour les personnes qui demeurent dans un département d'outre-mer ; 2. Deux mois pour celles qui demeurent à l'étranger", ces dernières dispositions, qui ne sont applicables qu'aux recours portés devant des juridictions, ne peuvent avoir pour effet de prolonger le délai dans lequel une décision administrative peut faire l'objet d'un recours gracieux ou hiérarchique ; que le recours gracieux des sociétés BFG Bank Luxembourg et Banco di Napoli International contre la délibération susmentionnée du 1er avril 1988 n'a été adressé à la commune que le 28 août 1991, soit postérieurement à l'expiration du délai de deux mois dont ces sociétés disposaient pour former un tel recours ; qu'ainsi, ce recours était tardif et n'a pu avoir pour effet d'interrompre le délai du recours contentieux ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE est fondée à soutenir que la demande tendant à l'annulation de la délibération du 1er avril 1988, présentée le 26 février 1992 par les trois établissements bancaires susmentionnés devant le tribunal administratif de Grenoble, était irrecevable et que c'est à tort que ce tribunal a, par le jugement attaqué, annulé cette délibération ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer aux établissements bancaires défendeurs la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner les établissements bancaires défendeurs à payer à la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1 : Les conclusions présentées devant le tribunal administratif par les sociétés Den Danske Bank International, BFG Bank Luxembourg International et Banco di Napoli International sont rejetées.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE et les conclusions d'appel des sociétés Den Danske Bank International, BFG Bank Luxembourg International et Banco di Napoli International tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE MACOT-LA-PLAGNE, aux sociétés Den Danske Bank International, BFG Bank Luxembourg International et Banco di Napoli International et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : Section
Numéro d'arrêt : 170954
Date de la décision : 05/01/2000
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

PROCEDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DELAIS - INTERRUPTION ET PROLONGATION DES DELAIS - CADélais de distance - Champ d'application - Recours gracieux et hiérarchique - Exclusion.

54-01-07-04 Les dispositions de l'article R. 105 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, qui rendent applicables aux demandes portées devant les tribunaux administratifs les dispositions de l'article 643 du nouveau code de procédure civile relatives aux délais de distance, ne concernent que les recours devant les juridictions et non les recours gracieux ou hiérarchique. Par suite, un recours gracieux ou hiérarchique exercé postérieurement au délai de deux mois ne peut avoir pour effet d'interrompre le délai de recours contentieux, même lorsque le requérant, qui demeurait à l'étranger, a exercé ce recours gracieux ou hiérarchique dans le délai de deux mois augmenté du délai de distance.

PROCEDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DELAIS - INTERRUPTION ET PROLONGATION DES DELAIS - INTERRUPTION PAR UN RECOURS ADMINISTRATIF PREALABLE - CAConditions - Recours rédigé en français (recours rédigé antérieurement à la modification de l'article 2 de la Constitution par la loi constitutionnelle du 25 juin 1992).

54-01-07-04-01 Un recours administratif, formé dans le délai du recours contentieux, n'interrompt le cours du délai de recours contentieux que s'il a été rédigé en français.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R102, R105
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Nouveau code de procédure civile 643


Publications
Proposition de citation : CE, 05 jan. 2000, n° 170954
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: Mme Guilhemsans
Rapporteur public ?: M. Courtial

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:170954.20000105
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