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19/01/2000 | FRANCE | N°187072

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 19 janvier 2000, 187072


Vu la requête enregistrée le 10 avril 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE MAINE-ET-LOIRE ; le PREFET DE MAINE-ET-LOIRE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 mars 1997 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé ses arrêtés du 19 février 1997 décidant de la reconduite à la frontière de M. Mamadou X... et de Mme Fanta X..., ainsi que les décisions du même jour fixant la Guinée comme pays de renvoi ;
2°) de rejeter la demande de M. et Mme X... devant

le tribunal administratif de Nantes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
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Vu la requête enregistrée le 10 avril 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE MAINE-ET-LOIRE ; le PREFET DE MAINE-ET-LOIRE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 mars 1997 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé ses arrêtés du 19 février 1997 décidant de la reconduite à la frontière de M. Mamadou X... et de Mme Fanta X..., ainsi que les décisions du même jour fixant la Guinée comme pays de renvoi ;
2°) de rejeter la demande de M. et Mme X... devant le tribunal administratif de Nantes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Pignerol, Auditeur,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme X..., entrés en France respectivement en 1989 et 1991, sont parents de trois enfants demeurés en Guinée et de deux enfants nés en France en 1992 et 1994, de nationalité guinéenne ; qu'ils sont tous les deux en situation irrégulière sur le territoire français ; que la circonstance qu'à la date à laquelle le PREFET DE MAINE-ET-LOIRE a pris à leur encontre les deux arrêtés contestés ordonnant leur reconduite à la frontière, leurs deux enfants nés en France étaient affectés de pathologies légères était seulement de nature à retarder leur départ du territoire français ; qu'ainsi les arrêtés contestés n'avaient pas pour effet d'entraîner une séparation des époux X... de leurs enfants ; que, par suite, le PREFET DE MAINE-ET-LOIRE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Nantes s'est fondé pour annuler lesdits arrêtés et, par voie de conséquence, les décisions distinctes fixant le pays de destination, sur le moyen tiré de ce que ces arrêtés portaient au droit au respect de la vie familiale des époux X... une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ces mesures ont été prises et méconnaissaient, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de la demande présentée par M. et Mme X... ;
Sur les arrêtés de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée, dans sa rédaction applicable à la date d'intervention des arrêtés attaqués : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ... 3°) si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ..., s'est maintenu sur le territoire français au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus" ;

Considérant qu'il est constant que, par deux décisions en date du 19 décembre 1996, le PREFET DE MAINE-ET-LOIRE a refusé de délivrer un titre de séjour à M. et Mme X... qui se sont maintenus sur le territoire français au-delà d'un délai d'un mois à compter de la notification de ces décisions ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin d'examiner la situation de M. X... au regard des dispositions du I de l'article 22-5° de l'ordonnance du 2 novembre 1945, ils se trouvaient l'un et l'autre dans l'un descas où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant que le moyen tiré de ce que les arrêtés contestés auraient été pris au vu de documents d'état civil erronés manque en fait ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les deux enfants nés en France en 1992 et 1994 de M. et Mme X... aient été atteints de pathologie dont le traitement ne pouvait être assuré que sur le territoire français ; que, par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que le PREFET DE MAINE-ET-LOIRE aurait entaché ses arrêtés d'une erreur manifeste d'appréciation de la gravité des conséquences de ces mesures sur leur vie personnelle ;
Sur les décisions distinctes fixant le pays de destination :
Considérant que si les époux X..., dont la demande d'admission au statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée par des décisions devenues définitives, font état de risques sérieux qu'ils courraient en cas de retour en Guinée, ils n'apportent pas à l'appui de ces allégations des précisions ou justifications de nature à en établir la réalité ; qu'ainsi, ils ne sont pas fondés à soutenir que les décisions susmentionnées méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble ce qui précède que le PREFET DE MAINE-ET-LOIRE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la demande présentée par M. et Mme X... devant le tribunal administratif de Nantes ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Nantes du 14 mars 1997 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. et Mme X... devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE MAINE-ET-LOIRE, à M. Mamadou X..., à Mme Fanta X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 187072
Date de la décision : 19/01/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 19 jan. 2000, n° 187072
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pignerol
Rapporteur public ?: M. Schwartz

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:187072.20000119
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