La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/01/2000 | FRANCE | N°187182

France | France, Conseil d'État, 2 / 1 ssr, 26 janvier 2000, 187182


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 avril et 12 août 1997, présentés pour LA POSTE, dont le siège est ... (cedex 92777), représentée par le président en exercice du conseil d'administration ; LA POSTE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 19 décembre 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a annulé, à la demande de M. Gilbert Robbe, d'une part, le jugement du 17 mai 1994 du tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande dirigée contre la décision du 24 juillet 1992 du président du conseil d'administr

ation de LA POSTE prononçant sa révocation et contre la décision du 6...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 avril et 12 août 1997, présentés pour LA POSTE, dont le siège est ... (cedex 92777), représentée par le président en exercice du conseil d'administration ; LA POSTE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 19 décembre 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a annulé, à la demande de M. Gilbert Robbe, d'une part, le jugement du 17 mai 1994 du tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande dirigée contre la décision du 24 juillet 1992 du président du conseil d'administration de LA POSTE prononçant sa révocation et contre la décision du 6 juillet 1993 rejetant son recours gracieux et, d'autre part, annulé ces décisions ;
2°) de condamner M. Robbe à lui verser la somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Verot, Auditeur,
- les observations de la SCP Defrénois, Lévis, avocat de LA POSTE, et de la SCP Rouvière, Boutet, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Honorat, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé le jugement du 17 mai 1994 du tribunal administratif d'Amiens rejetant la demande de M. Robbe tendant à l'annulation des décisions du président du conseil d'administration de LA POSTE prononçant sa révocation et rejetant son recours gracieux contre cette mesure, au motif que le président de LA POSTE n'avait pu, dans les circonstances de l'espèce, infliger une telle sanction à M. Robbe sans commettre une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'en estimant que les faits de vol et de destruction d'objets confiés à LA POSTE reprochés à M. Robbe constituaient une faute grave de nature à justifier une sanction, la cour n'a pas fait une inexacte qualification des faits ;
Mais considérant que le juge du fond, dans l'appréciation qu'il effectue de l'adéquation de la sanction prononcée à la faute commise, doit prendre en considération, le cas échéant, la nature particulière des fonctions exercées par l'agent ou des missions assurées par le service ; qu'en se bornant, pour estimer que le président du conseil d'administration de LA POSTE n'avait pu infliger à M. Robbe la sanction de la révocation sans commettre une erreur manifeste d'appréciation, à relever la nature des objets détournés, la modicité de leur valeur et le comportement antérieur de l'intéressé, sans tenir compte également de la nature des missions confiées à LA POSTE et des obligations particulières qui incombent à ses agents relatives à l'inviolabilité des correspondances, la cour administrative d'appel de Nancy a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, LA POSTE est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par LA POSTE ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que M. Robbe, préposé chef au centre d'Amiens de LA POSTE, s'est rendu coupable pendant une durée de trois mois de spoliations, destructions et détournements répétés de paquets postaux ; qu'eu égard à la nature des missions de LA POSTE et aux obligations incombant à ses agents en ce qui concerne l'inviolabilité des correspondances, nonobstant les difficultés financières dont se prévaut M. Robbe et la modicité de la valeur des objets dérobés, et alors même que cet agent n'avait jamais antérieurement fait l'objet de sanction, le président du conseil d'administration de LA POSTE n'a pas entaché son appréciation d'erreur manifeste, en lui infligeant la sanction de la révocation ;

Considérant, dès lors, que M. Robbe n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président du conseil d'administration de LA POSTE en date du 24 juillet 1992 prononçantsa révocation, ainsi que de la décision de rejet du recours gracieux dirigé contre cette décision ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner M. Robbe à verser à LA POSTE la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy en date du 19 décembre 1996 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par M. Robbe devant la cour administrative d'appel de Nancy est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de LA POSTE est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à LA POSTE, à M. Gilbert Robbe et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 2 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 187182
Date de la décision : 26/01/2000
Sens de l'arrêt : Annulation rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - DISCIPLINE - SANCTIONS - CAAdéquation de la sanction à la faute commise - Obligation de prendre en considération - le cas échéant - la nature particulière des fonctions exercées par l'agent et des missions assurées par le service.

36-09-04, 54-08-02-02-01-01 L'appréciation de l'adéquation de la sanction prononcée à la faute commise nécessite la prise en considération, le cas échéant, de la nature particulière des fonctions exercées par l'agent ou des missions assurées par le service. Commet par suite une erreur de droit la Cour administrative d'appel qui, pour estimer que le président du conseil d'administration de la Poste n'avait pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, infliger une sanction de révocation à un agent ayant détourné des objets contenus dans des paquets postaux, se borne à relever la nature des objets détournés, la modicité de leur valeur et le comportement antérieur de l'intéressé, sans tenir compte également de la nature des missions confiées à La Poste et des obligations particulières qui incombent à ses agents relatives à l'inviolabilité des correspondances.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - DISCIPLINE - SANCTIONS - ERREUR MANIFESTE D'APPRECIATION - CAAbsence - Révocation d'un agent de La Poste s'étant rendu coupable de spoliations - destructions et détournements répétés de paquets postaux.

36-09-04-01 Eu égard à la nature des missions de La Poste et aux obligations incombant à ses agents en ce qui concerne l'inviolabilité des correspondances, le président du conseil d'administration de La Poste n'entache pas sa décision d'erreur manifeste d'appréciation en infligeant une sanction de révocation à un agent qui s'est rendu coupable, pendant une durée de trois mois, de spoliations, destructions et détournements répétés de paquets postaux, nonobstant les difficultés financières dont se prévaut l'agent en cause et la modicité de la valeur des objets dérobés et alors même que cet agent n'avait jamais antérieurement fait l'objet de sanctions.

POSTES ET TELECOMMUNICATIONS - POSTES - PERSONNEL DE LA POSTE - CASanctions disciplinaires - Adéquation de la sanction à la faute commise - a) Obligation de prendre en considération - le cas échéant - la nature particulière des fonctions exercées par l'agent et des missions assurées par le service - b) Erreur manifeste d'appréciation - Absence - Révocation d'un agent de La Poste s'étant rendu coupable de spoliations - destructions et détournements répétés de paquets postaux.

51-01-03 a) L'appréciation de l'adéquation de la sanction prononcée à la faute commise nécessite la prise en considération, le cas échéant, de la nature particulière des fonctions exercées par l'agent ou des missions assurées par le service. Commet par suite une erreur de droit une cour administrative d'appel qui se borne, pour estimer que le président du conseil d'administration de La Poste n'avait pu infliger à un agent la sanction de révocation sans commettre une erreur manifeste d'appréciation, à relever la nature des objets détournés, la modicité de leur valeur et le comportement antérieur de l'intéressé, sans tenir compte également de la nature des missions confiées à La Poste et des obligations particulières qui incombent à ses agents relatives à l'inviolabilité des correspondances. b) Eu égard à la nature des missions de La Poste et aux obligations incombant à ses agents en ce qui concerne l'inviolabilité des correspondances, le président du conseil d'administration de La Poste n'entache pas sa décision d'erreur manifeste d'appréciation en infligeant une sanction de révocation à un agent qui s'est rendu coupable, pendant une durée de trois mois, de spoliations, destructions et détournements répétés de paquets postaux, nonobstant les difficultés financières dont se prévaut l'agent en cause et la modicité de la valeur des objets dérobés et alors même que cet agent n'avait jamais antérieurement fait l'objet de sanctions.

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - CASSATION - CONTROLE DU JUGE DE CASSATION - REGULARITE INTERNE - ERREUR DE DROIT - CAFonction publique - Sanctions disciplinaires - Adéquation de la sanction à la faute commise - Absence de prise en considération de la nature particulière des fonctions exercées par l'agent et des missions assurées par le service.


Références :

Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 26 jan. 2000, n° 187182
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: Mlle Vérot
Rapporteur public ?: M. Honorat

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:187182.20000126
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award