Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 juin 1998 et 5 octobre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la VILLE DE MARSEILLE représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité ; la VILLE DE MARSEILLE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 3 avril 1998 de la cour administrative d'appel de Lyon, rendu sur l'appel formé par M. X... contre un jugement du 5 janvier 1995 du tribunal administratif de Marseille, en tant qu'il a annulé la décision implicite résultant du silence gardé par le maire de Marseille sur la demande de réintégration de M. X... formulée le 18 janvier 1993 et reçue par la ville le 21 janvier 1993 ;
2°) de condamner M. X... à lui verser la somme de 20 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Derepas, Auditeur,
- les observations de Me Guinard, avocat de la VILLE DE MARSEILLE et de Me Parmentier, avocat de M. Jean X...,
- les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 26 mars 1990, le maire de Marseille a prononcé la mise à la retraite d'office de M. X... à compter du 1er janvier 1990 ; que cet arrêté a été annulé à la demande de M. X... pour vice de forme, par un jugement du 13 décembre 1993 du tribunal administratif de Marseille, devenu définitif ; qu'un nouvel arrêté du maire de Marseille en date du 17 janvier 1994 a prononcé la mise à la retraite d'office de l'intéressé à compter du 1er février 1994 ; que ce second arrêté est également devenu définitif ; que, toutefois, alors que la demande de M. X... dirigée contre l'arrêté du 25 mars 1990 était en cours d'instruction, le tribunal administratif de Marseille a été saisi d'une autre instance ouverte par M. X... et dans laquelle l'intéressé demandait l'annulation d'une décision implicite née du silence gardé par le maire de Marseille sur sa demande tendant au retrait de l'arrêté susmentionné du 26 mars 1990, à sa réintégration dans ses fonctions et à l'octroi d'une indemnité ; que, dans son jugement du 5 janvier 1995, le tribunal administratif a jugé, d'une part, qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la demande de M. X... tendant au retrait de l'arrêté du 26 mars 1990 annulé par un jugement antérieur devenu définitif, d'autre part, qu'à la date où elle était intervenue la décision implicite du maire en tant qu'elle portait refus de réintégration était légale, enfin, qu'il y avait lieu de donner acte à M. X... du désistement de ses conclusions aux fins d'indemnité ; que M. X... ayant fait appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel de Lyon, celle-ci, par son arrêt du 3 avril 1998, a partiellement annulé le jugement qui lui était déféré en relevant d'office un moyen tiré de l'autorité absolue de la chose jugée s'attachant au jugement prononçant l'annulation de l'arrêté du 26 mars 1990 et en déduisant de la portée rétroactive de cette annulation que la décision implicite du maire, en tant qu'elle opposait à M. X... un refus de réintégration dans ses fonctions, était illégale ; que la cour a également annulé dans cette mesure la décision implicite dont il s'agit ; que la VILLE DE MARSEILLE demande l'annulation de cet arrêt en tant seulement qu'il annule la décision implicite du maire de Marseille ;
Considérant, en premier lieu, qu'en soulevant d'office le moyen susanalysé la cour n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'en s'abstenant de répondre aux moyens inopérants présentés par la VILLE DE MARSEILLE aux fins de contester le droit à réintégration de M. X... dans ses fonctions avec un effet rétroactif de la date de son éviction illégale du service jusqu'à sa mise à la retraite d'office prononcée par un arrêté devenu définitif, soit du 1er janvier 1990 au 1er février 1994, la cour n'a pas entaché son arrêt d'irrégularité ;
Considérant, enfin, que si la VILLE DE MARSEILLE soutient que la décision implicite de refus de réintégration du maire de Marseille constituait une décision nouvelle, distincte de la décision contenue dans l'arrêté du 26 mars 1990 annulé par le jugement du 13 décembre 1993 sur la demande de M. X..., ce moyen qui n'a pas été invoqué devant les juges du fond et qui n'est pas d'ordre public est irrecevable en cassation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la VILLE DE MARSEILLE n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt du 3 avril 1998 de la cour administrative d'appel de Lyon en tant qu'il a annulé la décision implicite du maire rejetant la demande de réintégration de M. X... du 21 janvier 1993 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. X..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la VILLE DE MARSEILLE la somme qu'elle demande au titre de ces dispositions ; qu'il n'y a pas lieu, d'autre part, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la VILLE DE MARSEILLE à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais de même nature qu'il a exposés ;
Article 1er : La requête de la VILLE DE MARSEILLE est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. X... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la VILLE DE MARSEILLE, à M. Jean X... et au ministre de l'intérieur.