La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/01/2000 | FRANCE | N°201907

France | France, Conseil d'État, 10 / 9 ssr, 31 janvier 2000, 201907


Vu la requête enregistrée le 18 novembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Marcel X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret du 29 mars 1995 relatif à l'attribution d'une prime de sujétions spéciales à certains personnels des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire ;
2°) d'enjoindre au Premier ministre de prendre, dans un délai de quatre mois après la notification de la décision du Conseil d'Etat, les mesures réglementaires nécessaires à son application, sous astreinte de 2

500 F par jour de retard ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme...

Vu la requête enregistrée le 18 novembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Marcel X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret du 29 mars 1995 relatif à l'attribution d'une prime de sujétions spéciales à certains personnels des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire ;
2°) d'enjoindre au Premier ministre de prendre, dans un délai de quatre mois après la notification de la décision du Conseil d'Etat, les mesures réglementaires nécessaires à son application, sous astreinte de 2 500 F par jour de retard ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l'organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique ;
Vu la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 modifiée par la loi n° 95-125 du 8 février 1995 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mochon, Auditeur,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité du décret en tant qu'il concerne les personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire :
Considérant qu'il résulte des termes mêmes du décret attaqué qu'il a institué des taux différents pour la fixation du montant de la prime de sujétions spéciales attribuée aux personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire selon que les agents concernés sont affectés soit dans la région Ile-de-France ainsi que dans les départements du Rhône et des Bouches-du-Rhône soit dans les autres départements ou territoires ; qu'en instituant entre les agents une différence de traitement fondée sur un critère exclusivement géographique qui ne permet pas à lui seul de caractériser une différence dans les conditions d'exercice des fonctions, le décret attaqué méconnaît, eu égard à l'objet de la prime, le principe d'égalité entre agents d'un même corps ; que M. X... est, par suite, fondé à en demander l'annulation en tant qu'il concerne les personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire ;
Sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation :
Considérant qu'en fixant à 22 % le taux maximum de la prime de sujétions spéciales, les auteurs du décret attaqué n'ont pas entaché leur appréciation d'erreur manifeste ;
Sur les conclusions tendant à l'application de la loi du 16 juillet 1980 modifiée :
Considérant que la présente décision n'implique pas nécessairement que l'administration prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé ; que, par suite, les conclusions de M. X... tendant à ce que le Conseil d'Etat prononce une injonction assortie d'une astreinte ne peuvent être accueillies ;
Sur la légalité du décret en tant qu'il prend effet de façon rétroactive :
Considérant qu'aucune disposition législative, et notamment pas, contrairement à ce que soutient le ministre, la loi du 25 juillet 1994 relative à l'organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique, qui ne se réfère qu'à des mesures statutaires, n'autorisait le gouvernement à donner un effet rétroactif au décret attaqué ; que le requérant est par suite fondé à soutenir que ce décret est entaché d'excès de pouvoir en tant qu'il fixe sa date d'effet à compter du 1er janvier 1994 ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu de condamner l'Etat à verser à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le décret du 29 mars 1995 est annulé en tant, d'une part, qu'il concerne les personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire et en tant, d'autre part, qu'il fixe sa date d'effet à compter du 1er janvier 1994.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Marcel X... et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 10 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 201907
Date de la décision : 31/01/2000
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - PRINCIPES GENERAUX DU DROIT - EGALITE DEVANT LE SERVICE PUBLIC - EGALITE DE TRAITEMENT DES AGENTS PUBLICS - CAViolation - Différence de traitement fondée sur un critère qui ne permet pas à lui seul de caractériser une différence dans les conditions d'exercice des fonctions - Critère du lieu géographique d'affectation.

01-04-03-03-02, 36-08-03 Un décret du 29 mars 1995 a prévu l'attribution aux personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire d'une prime de sujétions spéciales. Ce décret a institué des taux différents pour la fixation du montant de la prime selon que les agents concernés sont affectés soit dans la région Ile-de-France ainsi que dans les départements du Rhône et des Bouches-du-Rhône, soit dans les autres départements ou territoires. En instituant entre les agents une différence de traitement fondée sur un critère exclusivement géographique qui ne permet pas à lui seul de caractériser une différence dans les conditions d'exercice des fonctions, le décret en cause méconnaît, eu égard à l'objet de la prime, le principe d'égalité entre agents d'un même corps.

- RJ1 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - REMUNERATION - INDEMNITES ET AVANTAGES DIVERS - CAPrime de sujétions spéciales allouée aux personnels de surveillance de l'administration pénitentiaire - Critères de fixation des taux - Critère ne permettant pas à lui seul de caractériser une différence dans les conditions d'exercice des fonctions - Méconnaissance du principe d'égalité (1).


Références :

Décret du 29 mars 1995 décision attaquée annulation partielle
Loi 80-539 du 16 juillet 1980
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Loi 94-628 du 25 juillet 1994

1. Comp. Section, 2001-07-11, Syndicat départemental CFDT de la direction départementale de l'équipement du Gard, n° 220062


Publications
Proposition de citation : CE, 31 jan. 2000, n° 201907
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: M. Mochon
Rapporteur public ?: M. Le Chatelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:201907.20000131
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award