Vu la requête enregistrée le 7 avril 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ; le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'article 1er du jugement du 6 mars 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé sa décision du 3 mars 1999 fixant la Côte d'Ivoire et la Guinée comme pays de destination de M. Y..., alias X..., reconduit à la frontière ;
2°) rejette les conclusions de la demande de première instance tendant à l'annulation de cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée et notamment son article 27 bis ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lévy, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "L'étranger ( ...) qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité ( ...) 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible ( ...)" ;
Considérant que, lors de son interpellation, le demandeur de première instance était dépourvu de tout titre d'identité et soutenait être M. Mamadou X..., de nationalité ivoirienne ; qu'à la date de la décision attaquée fixant le pays de destination de la mesure de reconduite à la frontière prononcée à son encontre, l'administration disposait de présomptions sérieuses permettant de considérer que l'intéressé était en réalité M. Bamba Y..., de nationalité guinéenne ; que dans ces conditions le préfet a pu légalement décider que cet étranger serait "reconduit à destination de la Côte d'Ivoire ou de la Guinée", l'exécution de cette décision, qui ne prévoyait la reconduite qu'à destination d'un seul pays, étant subordonnée à l'identification de l'intéressé et à la détermination de sa nationalité, notamment par les diligences effectuées auprès des services consulaires des pays concernés ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler la décision attaquée, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a relevé d'office qu'elle avait illégalement fixé deux pays de destination ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner le moyen soulevé devant le tribunal administratif de Grenoble par M. Bamba Y... alias Mamadou X... à l'appui de ses conclusions d'annulation de l'arrêté du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE du 3 mars 1999 fixant le pays de destination de la mesure de reconduite prise à son encontre ;
Considérant qu'à l'appui de ces conclusions le demandeur fait valoir qu'en raison des risques que lui ferait courir son retour en Côte d'Ivoire la décision attaquée méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ce moyen n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier la portée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 3 mars 1999 fixant le pays de destination de M. Bamba Y..., alias Mamadou X... ;
Article 1er : L'article 1er du jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble en date du 6 mars 1999 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée au tribunal administratif de Grenoble par M. Y... alias X... tendant à l'annulation de la décision du 3 mars 1999 du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE fixant le pays de destination sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE, à M. Bamba Y..., alias Mamadou X... et au ministre de l'intérieur.