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31/01/2000 | FRANCE | N°207768

France | France, Conseil d'État, 10 / 9 ssr, 31 janvier 2000, 207768


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 et 19 mai 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le PREFET D'ILLE ET VILAINE ; le PREFET D'ILLE ET VILAINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 avril 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 2 avril 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... et la décision fixant le pays de renvoi ;
2°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de ce jugement ;
3°) de rejeter la

demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Rennes ;
Vu ...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 et 19 mai 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le PREFET D'ILLE ET VILAINE ; le PREFET D'ILLE ET VILAINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 avril 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 2 avril 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... et la décision fixant le pays de renvoi ;
2°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de ce jugement ;
3°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Rennes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par les lois des 2 août 1989, 10 janvier 1990 et 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n°45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mochon, Auditeur,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée, "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ( ...) 2°) Si l'étranger s'est maintenu au-delà de la durée de validité de son visa ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que M. X..., de nationalité marocaine, entré en France le 8 septembre 1998 sous couvert d'un visa de 10 jours pour lequel il a obtenu une prolongation jusqu'au 3 octobre 1998, et qui s'est maintenu sur le territoire français au-delà de cette date, entrait dans le cas visé au 2° du I de l'article 22 de l'ordonnance précitée où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant cependant qu'il résulte de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998, applicable à la date de la décision litigieuse, que ne peut faire l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière : "8° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi" ;
Considérant que si l'état de santé de M. X..., atteint d'un diabète important ayant entraîné des troubles oculaires, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'il peut voyager sans risque pour sa santé et, d'autre part, que les structures médicales du Maroc et en particulier le centre hospitalier universitaire de Casablanca où il était régulièrement suivi avant sa venue en France, sont aptes à lui prodiguer les soins que requiert son état ; que, par suite, c'est à tort et en méconnaissance des dispositions précitées du 8° de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 que, pour annuler l'arrêté prononçant la reconduite à la frontière de M. X..., le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur ce qu'il était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, en raison de la gravité des conséquences que cette mesure était susceptible d'entraîner pour l'intéressé ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X... devant le tribunal administratif de Rennes ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... n'a pas fait de demande de carte de séjour temporaire ; que le moyen tiré de ce qu'une telle carte aurait pu lui être délivrée est dès lors inopérant à l'encontre de la décision attaquée ;
Considérant que la circonstance que M. X... serait sans ressources est sans influence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET D'ILLE ET VILAINE est fondé à demander l'annulation du jugement du 10 avril 1999 ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rennes en date du 10 avril 1999 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET D'ILLE ET VILAINE, à M. Bouchaïd X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 10 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 207768
Date de la décision : 31/01/2000
Sens de l'arrêt : Annulation rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

335-03-02-01 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE - LEGALITE INTERNE - ETRANGERS NE POUVANT FAIRE L'OBJET D'UNE MESURE DE RECONDUITE A LA FRONTIERE -CAEtranger dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité (article 25-8° de l'ordonnance du 22 novembre 1945) - Absence - Structures médicales du pays de renvoi aptes à prodiguer à l'intéressé les soins que requiert son état.

335-03-02-01 Ne méconnaît pas les dispositions du 8° de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, issues de la loi du 11 mai 1998, un arrêté de reconduite à la frontière visant un étranger atteint d'un diabète important ayant entraîné des troubles oculaires, affection qui nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, dès lors que l'intéressé peut voyager sans risques et que les structures médicales du pays de renvoi, en l'occurrence le Maroc, et en particulier le centre hospitalier universitaire de Casablanca où il était régulièrement suivi avant sa venue en France, sont aptes à lui prodiguer les soins que requiert son état.


Références :

Loi 98-349 du 11 mai 1998
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25


Publications
Proposition de citation : CE, 31 jan. 2000, n° 207768
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: M. Mochon
Rapporteur public ?: M. Le Chatelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:207768.20000131
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