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02/02/2000 | FRANCE | N°196159

France | France, Conseil d'État, 02 février 2000, 196159


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 avril et 10 août 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 12 février 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 30 avril 1996 du tribunal administratif de Montpellier annulant la décision du 7 septembre 1995 du maire de la Grande-Motte mettant fin aux fonctions

de Mme Florence X... à compter du 1er novembre 1995 ;
Vu les a...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 avril et 10 août 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 12 février 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 30 avril 1996 du tribunal administratif de Montpellier annulant la décision du 7 septembre 1995 du maire de la Grande-Motte mettant fin aux fonctions de Mme Florence X... à compter du 1er novembre 1995 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 97-1177 du 24 décembre 1997 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Delion, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Choucroy, avocat de la COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE, et de la SCP Tiffreau, avocat de Mme Florence X...,
- les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, modifiée par la loi du 13 juillet 1987 et applicable au présent litige : "Les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de titulaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé de maladie, d'un congé de maternité ou d'un congé parental, ou de l'accomplissement du service national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux, ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi./ Ces collectivités et établissements peuvent, en outre, recruter des agents non titulaires pour exercer des fonctions correspondant à un besoin saisonnier pour une durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois et conclure pour une durée maximale de trois mois, renouvelable une seule fois à titre exceptionnel, des contrats pour faire face à un besoin occasionnel./ Des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les mêmes cas et selon les mêmes conditions de durée que ceux applicables aux agents de l'Etat./ Toutefois, dans les communes de moins de 2 000 habitants et dans les groupements de communes dont la moyenne arithmétique des nombres d'habitants ne dépasse pas ce seuil, des contrats peuvent être conclus pour une durée déterminée et renouvelés par reconduction expresse pour pourvoir des emplois permanents à temps non complet et correspondant à un nombre maximal d'heures de travail qui n'excède pas celui mentionné à l'article 107 de la présente loi" ; qu'aux termes des dispositions de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 rendues applicables aux agents territoriaux par l'article 3 précité de la loi du 26 janvier 1984 : "Les agents ainsi recrutés sont engagés par des contrats d'une durée maximale de trois ans qui ne peuvent être renouvelés que par reconduction expresse" ;
Considérant qu'il résulte des dispositions législatives précitées que les contrats passés par les collectivités et établissements publics territoriaux en vue de recruter des agents non titulaires doivent, sauf disposition législative spéciale contraire, être conclus pour une durée déterminée et ne peuvent être renouvelés que par reconduction expresse ; que la circonstance qu'un contrat à durée déterminée a été reconduit tacitement bien qu'il ait comporté une stipulation selon laquelle il ne pouvait l'être que par une décision expresse ne peut avoir pour effet de lui conférer une durée indéterminée ; que le maintien en fonctions de l'agent en cause à l'issue de son contrat initial, s'il traduit la commune intention des parties de poursuivre leur collaboration, a seulement pour effet de donner naissance à un nouveau contrat, conclu lui aussi pour une période déterminée et dont la durée est celle assignée au contrat initial ; qu'ainsi, sauf circonstance particulière, la décision par laquelle l'autorité administrative compétente met fin aux relations contractuelles doit être regardée comme un refus de renouvellement de contrat si elle intervient à l'échéance du nouveau contrat et comme un licenciement si elle intervient au cours de ce nouveau contrat ;

Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que Mme X... a été recrutée par la COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE à compter du 1er mai 1990, en qualité de responsable du service de la communication, par un contrat d'une durée d'un an, renouvelable "par expresse reconduction" ; que, parvenu à son terme, ce contrat a été en fait tacitement reconduit ; que Mme X... doit, par suite, être regardée comme ayant été maintenue en fonctions sur le fondement de contrats tacites successifs, chacun d'une durée d'un an ; que, dès lors, en jugeant quel'intéressée bénéficiait d'un contrat à durée indéterminée, la cour administrative d'appel de Marseille a entaché d'une erreur de droit l'arrêt attaqué qui doit, pour ce motif, être annulé ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'au terme de son contrat initial, Mme X... a été maintenue en fonctions sur le fondement de contrats tacites successifs d'une durée d'un an, prenant effet le 1er mai de chaque année et expirant le 30 avril de l'année suivante ; que le maire de la Grande-Motte ayant mis fin aux fonctions de l'intéressée par lettre du 7 septembre 1995 à compter du 1er novembre 1995, cette mesure doit être regardée, en l'absence de circonstances particulières permettant d'en décider autrement, comme une décision de licenciement en cours de contrat ;
Considérant qu'il ressort du dossier, et notamment des termes mêmes du procès-verbal de la délibération du conseil municipal du 22 septembre 1995, que cette décision n'est motivée ni par une réorganisation des services municipaux, ni par le comportement de l'intéressée dans l'exercice de ses fonctions, mais qu'elle a été prise uniquement en raison de mobiles de caractère politique ; qu'elle est ainsi entachée de détournement de pouvoir ; qu'il suit de là que la COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du 30 avril 1996 par lequel le tribunal administratif de Montpellier en a prononcé l'annulation ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner la COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE à verser à Mme X... la somme de 15 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt du 12 février 1998 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE devant la cour administrative d'appel de Marseille est rejetée.
Article 3 : La COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE est condamnée à verser à Mme X... la somme de 15 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE LA GRANDE-MOTTE, à Mme Florence X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 196159
Date de la décision : 02/02/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

- RJ1 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - AGENTS CONTRACTUELS ET TEMPORAIRES - NATURE DU CONTRAT.

- RJ1 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - AGENTS CONTRACTUELS ET TEMPORAIRES - FIN DU CONTRAT.


Références :

Loi 84-16 du 11 janvier 1984 art. 4
Loi 84-53 du 26 janvier 1984 art. 3
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 87-529 du 13 juillet 1987
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75

Cf. CE 2000-02-02 Commune de la Grande-Motte cù melle Labrousse n° 196158.


Publications
Proposition de citation : CE, 02 fév. 2000, n° 196159
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Delion
Rapporteur public ?: M. Touvet

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:196159.20000202
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