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16/02/2000 | FRANCE | N°189839

France | France, Conseil d'État, 16 février 2000, 189839


Vu la requête enregistrée le 26 août 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Régis X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 6 mars 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté ses demandes tendant :
1° à l'annulation du jugement du 30 juin 1995 du tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 1994 le plaçant en disponibilité d'office pour un an à compter du 4 avril 1993 ;
2° à l'annulation du jugement du 11 décembre 1995 d

u tribunal administratif de Versailles en tant qu'il rejette ses demandes...

Vu la requête enregistrée le 26 août 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Régis X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 6 mars 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté ses demandes tendant :
1° à l'annulation du jugement du 30 juin 1995 du tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 1994 le plaçant en disponibilité d'office pour un an à compter du 4 avril 1993 ;
2° à l'annulation du jugement du 11 décembre 1995 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il rejette ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 1995 remplaçant l'arrêté du 4 mars 1994 et le plaçant en disponibilité du 20 septembre 1993 au 19 septembre 1994 et de l'arrêté du même jour prolongeant sa mise en disponibilité jusqu'au 19 septembre 1995 et à ce que l'Etat soit condamné à l'indemniser du préjudice subi du fait des irrégularités de sa mise en disponibilité ;
3° à ce qu'il soit enjoint à l'administration, sous une astreinte de 10 000 F par mois à compter de décembre 1995, de procéder à son reclassement sur un poste de documentaliste dans le Bas-Rhin ;
4° à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 300 000 F à titre de dommages-intérêts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
Vu le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat en vue de faciliter le reclassement des fonctionnaires de l'Etat reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions ;
Vu le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat et à certaines modalités de cessation définitive de fonctions ;
Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 modifiée par la loi n° 95-125 du 8 février 1995 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Olléon, Auditeur,
- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de M. Régis X...,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X..., nommé instituteur stagiaire à la rentrée 1990, a été titularisé à compter du 1er septembre 1992 ; qu'il a été placé en congés de maladie successifs du 19 septembre 1992 au 1er juillet 1993, date à laquelle le comité médical départemental l'a déclaré définitivement inapte aux fonctions d'enseignant, mais a émis un avis favorable à son reclassement professionnel ; que l'intéressé a, par un arrêté du 4 mars 1994 de l'inspecteur d'académie de Versailles, été placé en disponibilité d'office à compter du 4 avril 1993 ; que cet arrêté a été remplacé par un arrêté du 16 janvier 1995 plaçant M. X... en disponibilité d'office du 20 septembre 1993 au 19 septembre 1994, un second arrêté du même jour prolongeant jusqu'au 19 septembre 1995 la mise en disponibilité ; que M. X... se pourvoit contre l'arrêt du 6 mars 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation du jugement du 30 juin 1995 du tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande en annulation de l'arrêté du 4 mars 1994, à l'annulation du jugement du 11 décembre 1995 du même tribunal en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à l'annulation des arrêtés du 16 janvier 1995 susmentionnés, à ce qu'il soit enjoint à l'administration, sous une astreinte de 10 000 F par mois à compter de décembre 1995, de procéder à son reclassement sur un poste de documentaliste dans le Bas-Rhin et à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 300 000 F au titre du préjudice subi du fait de l'irrégularité de sa mise endisponibilité ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. X... a, par deux lettres des 22 août et 14 septembre 1993, demandé à l'inspecteur d'académie de tenter de procéder à son reclassement à Paris, dans un poste de documentaliste, au ministère de l'éducation nationale ou de la culture ; que, dès lors, en jugeant par l'arrêt attaqué que l'intéressé s'était borné à demander son reclassement sans autre précision et n'avait, par suite, pas mis l'administration à même de le reclasser, la cour a dénaturé les pièces du dossier ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler cet arrêt ; Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11, deuxième alinéa, de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;

Considérant que la requête n° 95PA03581 présentée par M. X... devant la cour administrative d'appel de Paris tend à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 1994 par lequel l'inspecteur d'académie de Versailles a placé le requérant en disponibilité d'office pour un an à compter du 4 avril 1993 ; que la requête n° 96PA00525 présentée devant la même cour tend d'une part à l'annulation des deux arrêtés du 16 janvier 1995 par lesquels l'inspecteur d'académie a placé l'intéressé en disponibilité d'office du 20 septembre 1993 au 19 septembre 1995, d'autre part à ce qu'il soit enjoint à l'administration, sous une astreinte de 10 000 F par mois à compter de décembre 1995, de procéder à son reclassement sur un poste de documentaliste dans le Bas-Rhin et, enfin, à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 300 000 F à titre de dommages-intérêts ; qu'il y a lieu de joindre ces requêtes pour y statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 1994 et des deux arrêtés du 16 janvier 1995 :
Considérant qu'aux termes de l'article 40 de l'ordonnance susvisée du 31 juillet 1945 : "La requête des parties ou le recours des ministres doit contenir l'exposé sommaire des faits et moyens, les conclusions, noms et demeures des parties et être accompagné de la décision attaquée ..." ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, la requête n° 95PA03591 présentée par M. X... devant la cour administrative d'appel de Paris contient l'exposé de moyens et est par suite recevable ;

Considérant qu'aux termes de l'article 63 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 : "Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes ... Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles le reclassement, qui est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé, peut intervenir." ; qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé du 30 novembre 1984, pris pour l'application de l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 : "Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'administration, après avis du comité médical, invite l'intéressé à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps." ; qu'aux termes de l'article 43 du décret susvisé du 16 septembre 1985 : "La mise en disponibilité ne peut être prononcée d'office qu'à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus à l'article 34 (2°, 3° et 4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues à l'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée." ; qu'enfin, aux termes de l'article 27 du décret susvisé du 14 mars 1986 : "Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical ; en cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à laretraite après avis de la commission de réforme." ; Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'administration doit, après avis du comité médical, inviter le fonctionnaire qui a été déclaré inapte à l'exercice de ses fonctions par suite de l'altération de son état physique et dont le poste de travail ne peut être adapté à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps ; que, dès lors que le fonctionnaire formule une telle demande en précisant le corps dans lequel le reclassement est souhaité, l'administration ne peut, à l'expiration de ses droits statutaires à congés de maladie, le mettre en disponibilité d'office que si ce reclassement est impossible dans l'immédiat ;

Considérant que M. X..., après avoir été déclaré inapte à l'exercice des fonctions d'enseignant par un avis du 1er juillet 1993 du comité médical départemental des Yvelines, a, par deux lettres des 22 août et 14 septembre 1993, demandé à l'inspecteur d'académie de procéder à son reclassement à Paris, dans un poste de documentaliste, au ministère de l'éducation nationale ou de la culture ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué qu'avant de prononcer, par les arrêtés attaqués des 4 mars 1994 et 16 janvier 1995, la mise en disponibilité d'office de M. X... à l'expiration de ses droits statutaires à congés de maladie, l'inspecteur d'académie de Versailles a examiné si le reclassement qu'il demandait était impossible dans l'immédiat ; qu'ainsi, les arrêtés des 4 mars 1994 et 16 janvier 1995 de l'inspecteur d'académie plaçant l'intéressé en disponibilité d'office sont intervenus en méconnaissance des dispositions précitées de la loi du 11 janvier 1984 et du décret du 16 septembre 1985 ; que, par suite, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués des 30 juin et 11 décembre 1995, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 1994 et des deux arrêtés du 16 janvier 1995 de l'inspecteur d'académie de Versailles ;
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de procéder, sous astreinte, au reclassement effectif de M. X... :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6-1 de la loi susvisée du 16 juillet 1980 modifiée : "Lorsqu'il règle un litige au fond par une décision qui implique nécessairement une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le Conseil d'Etat, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure et peut assortir sa décision d'une astreinte à compter de la date qu'il détermine." ;
Considérant que si la présente décision, qui annule les arrêtés des 4 mars 1994 et 16 janvier 1995 de l'inspecteur d'académie de Versailles, a pour effet de saisir à nouveau ledit inspecteur de la demande de reclassement formulée par M. X..., son exécution implique seulement que l'administration réexamine les possibilités de procéder à ce reclassement ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 11 décembre 1995, le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de procéder, sous astreinte, à son reclassement effectif ;
Sur les conclusions aux fins d'indemnité :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par le ministre :
Considérant que les conclusions de M. X... tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 300 000 F au titre du préjudice subi par lui du fait de sa mise en disponibilité d'office ne sont pas assorties des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 11 décembre 1995, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à verser à M. X... une somme de 5 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt du 6 mars 1997 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : Le jugement du 30 juin 1995 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 3 : Le jugement du 11 décembre 1995 du tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il rejette les demandes de M. X... tendant à l'annulation des deux arrêtés du 16 janvier 1995 par lesquels l'inspecteur d'académie de Versailles l'a placé en disponibilité du 20 septembre 1993 au 19 septembre 1995.
Article 4 : L'arrêté du 4 mars 1994 et les deux arrêtés du 16 janvier 1995 de l'inspecteur d'académie de Versailles sont annulés.
Article 5 : L'Etat est condamné à verser à M. X... une somme de 5 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 6 : Le surplus des conclusions présentées par M. X... devant la cour administrative d'appel de Paris sous le n° 96PA00525 est rejeté.
Article 7 : La présente décision sera notifiée à M. Régis X... et au ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 189839
Date de la décision : 16/02/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

30-02-01 ENSEIGNEMENT - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFERENTES CATEGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT DU PREMIER DEGRE.


Références :

Arrêté du 04 mars 1994
Arrêté du 16 janvier 1995
Décret 84-1051 du 30 novembre 1984 art. 2
Décret 85-986 du 16 septembre 1985 art. 43
Décret 86-442 du 14 mars 1986 art. 27
Loi 80-539 du 16 juillet 1980 art. 6-1, art. 75
Loi 84-16 du 11 janvier 1984 art. 63
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-1708 du 31 juillet 1945 art. 40


Publications
Proposition de citation : CE, 16 fév. 2000, n° 189839
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olléon
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:189839.20000216
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