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01/03/2000 | FRANCE | N°185120

France | France, Conseil d'État, 01 mars 2000, 185120


Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES enregistré le 24 janvier 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 21 novembre 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, annulant un jugement du 2 mars 1995 du tribunal administratif de Limoges, a accordé à la SARL X... la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1985 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code gén

ral des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 91...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES enregistré le 24 janvier 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 21 novembre 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, annulant un jugement du 2 mars 1995 du tribunal administratif de Limoges, a accordé à la SARL X... la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1985 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Maïa, Auditeur,
- les observations de la SCP Nicolay, de Lanouvelle, avocat duMINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration a remis en cause la qualification de plus-value à long terme que la SARL X..., qui exploitait sur le territoire des communes de Brive et de Noailles (Corrèze) des gisements de carrière situés sur des parcelles appartenant en propre à ses associés, avait cru pouvoir donner à l'indemnité principale de 2 378 000 F que lui avait accordée, par jugement du 6 septembre 1985, le juge de l'expropriation, au titre de l'indemnisation du préjudice subi par la société à raison de la perte du "droit de fortage" que lui avaient consenti ses associés sur les parcelles susdites ; qu'en effet, le service a estimé que cette indemnité devait s'analyser comme la contrepartie de la perte prévisible des recettes qu'aurait pu engendrer l'exploitation de la carrière et qu'elle devait, en conséquence, être imposée selon le régime de droit commun de l'impôt sur les sociétés ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 21 novembre 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, annulant le jugement du 2 mars 1995 du tribunal administratif de Limoges, a accordé à la SARL X... la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a ainsi été assujettie au titre de l'année 1985 ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du recours ;
Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 dudit code : "( ...) 2°) le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice ( ...) L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées" ; qu'aux termes de l'article 39 duodecies du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : "1- Par dérogation aux dispositions de l'article 38, les plus-values provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé sont soumises à des régimes distincts suivant qu'elles sont réalisées à court ou à long terme ; 2- le régime des plus-values à court terme est applicable : a) aux plus-values provenant de la cession d'éléments acquis ou créés depuis moins de deux ans ; b) le régime des plus-values à long terme est applicable aux plus-values autres que celles définies au 2" ;
Considérant que pour qualifier de prix de cession d'un élément incorporel de l'actif immobilisé, au sens des dispositions précitées du code général des impôts, la somme de 2 378 000 F qu'avait accordée à la SARL X..., par jugement du 6 septembre 1985, le juge de l'expropriation, la cour s'est bornée, ainsi que le soutient le ministre, à relever que l'indemnité ainsi acquise correspondait non à des profits escomptés mais à la valeur supposée d'un "droit de fortage" cédé dont le juge de l'expropriation avait reconnu l'existence ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si l'exploitation procédait d'un droit concédé dans des conditions assurant à son titulaire une protection juridique, alors que le ministre soutenait que la société ne détenait aucun titre, la cour a commis une erreur de droit ; que, dès lors, son arrêt doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987 et de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que si la SARL X... exploitait les gisements de carrière situés sur des terrains appartenant à MM. Jean-Robert et Jean-Jacques X..., cette exploitation s'opérait dans le cadre d'une simple mise à disposition desdits terrains par leurs propriétaires ; qu'il n'avait, en effet, été procédé ni à la vente du tréfonds ni à la cession de droitd'exploitation par concession dite de fortage ou par acte authentique ; que, d'ailleurs, la SARL X... n'avait pas inscrit la valeur du droit qu'elle allègue à l'actif de son bilan ; qu'il s'ensuit que la somme allouée par le juge de l'expropriation par jugement du 6 septembre 1985 ne peut être regardée comme le prix de cession d'un élément incorporel de l'actif immobilisé, imposable sur le fondement des dispositions de l'article 39 duodecies du code général des impôts ; qu'elle est destinée à compenser une perte de recettes ; que, dans ces conditions, l'indemnité litigieuse a pu, à bon droit, être réintégrée par l'administration dans les résultats d'exploitation à soumettre au taux normal de l'impôt sur les sociétés ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande de décharge des impositions susmentionnées ;
Sur les conclusions de la SARL X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SARL X... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt du 21 novembre 1996 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé.
Article 2 : La requête de la SARL X... devant la cour administrative d'appel de Bordeaux est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la SARL X... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à la SARL X....


Synthèse
Numéro d'arrêt : 185120
Date de la décision : 01/03/2000
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LES BENEFICES DES SOCIETES ET AUTRES PERSONNES MORALES.


Références :

CGI 38, 209, 39 duodecies
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 01 mar. 2000, n° 185120
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Maïa
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:185120.20000301
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