Vu la requête enregistrée le 10 mars 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA REGION AQUITAINE, PREFET DE LA GIRONDE ; le PREFET DE LA GIRONDE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux en date du 30 janvier 1997 annulant son arrêté du 13 janvier 1997 décidant la reconduite à la frontière de M. Saïm X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Olson, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Capron, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ..." ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., ressortissant de la République de Turquie est entré sur le territoire français au mois d'octobre 1995 pour rejoindre une compatriote qu'il avait épousée le 29 août 1991 ; que celle-ci bénéficiait, depuis le 11 juin 1987, d'une carte de résident valable dix ans ; que les époux, qui vivent au domicile du père de Mme X..., sont les parents d'un enfant né en France le 27 avril 1996 ; qu'à la date de l'arrêté attaqué, Mme X... était enceinte d'environ sept mois ; qu'ainsi, et alors même que celle-ci n'aurait pas disposé de ressources financières régulières, le PREFET DE LA REGION AQUITAINE, PREFET DE LA GIRONDE, en décidant la reconduite à la frontière de M. X..., a porté au droit de celui-ci au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris cette décision ; que, par suite, il a méconnu les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, il n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 13 janvier 1997 ;
Article 1er : La requête du PREFET DE LA REGION AQUITAINE, PREFET DE LA GIRONDE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA REGION AQUITAINE, PREFET DE LA GIRONDE, à M. Saïm X... et au ministre de l'intérieur.