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27/03/2000 | FRANCE | N°196133

France | France, Conseil d'État, 8 / 3 ssr, 27 mars 2000, 196133


Vu le recours enregistré le 24 avril 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 25 février 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir annulé le jugement du 5 décembre 1995 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, d'une part, a accordé à M. et Mme X... la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et du prélèvement social mis en recouvreme

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Vu le recours enregistré le 24 avril 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 25 février 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, après avoir annulé le jugement du 5 décembre 1995 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, d'une part, a accordé à M. et Mme X... la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et du prélèvement social mis en recouvrement au titre de l'année 1986 et d'autre part, l'a condamné à verser à M. et Mme X... la somme de 5 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Sauron, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de M. et Mme Jean-Paul X...,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : "I. Sont considérés comme des revenus distribués : 1° tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevés sur les bénéfices ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond et des énonciations de l'arrêt attaqué que les docteurs Coquelet et X... étaient associés de la SA Polyclinique Saint-Pierre, devenue SA Polyclinique Saint-Odilon, où ils exerçaient l'un et l'autre comme chirurgiens ; qu'en raison de graves dissensions mettant en péril le fonctionnement de la polyclinique, une transaction a été conclue entre les deux praticiens, en exécution de laquelle le docteur X... a acquis du docteur Y..., par la voie d'une adjudication en date du 11 février 1987, la totalité des actions détenues dans la société par le docteur Y..., celui-ci résiliant le même jour son contrat avec la clinique et s'engageant en outre, conformément aux stipulations du cahier des charges fixant les clauses de l'adjudication, à ne pas se réinstaller dans le département pendant les cinq années suivantes ; que le docteur Y... a perçu, en exécution de cette transaction, une somme globale de 7,15 millions de francs incluant, selon les déclarations non contestées de l'adjudicataire, une indemnité de 3 millions de francs versée en contrepartie de la clause de non-réinstallation ; que le même jour, l'assemblée générale des actionnaires de la clinique a résolu de faire prendre en charge par la société cette indemnité de 3 millions de francs, augmentée d'une somme de 200 000 F représentant la quote-part correspondante des frais d'adjudication ; qu'après avoir refusé l'imputation de cette dépense sur les résultats de la société, au motif que le paiement, par la clinique, de l'indemnité contractuellement due par son principal associé était constitutif d'un acte anormal de gestion, l'administration a estimé que la somme correspondante constituait de ce fait un bénéfice distribué au docteur X..., en application de l'article 109-I-2° du code général des impôts, et l'a par suite imposée entre ses mains, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que le ministre se pourvoit contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a prononcé la décharge du complément d'impôt sur le revenu et de prélèvement social auquel M. et Mme X... ont été assujettis de ce chef, au titre de l'année 1986 ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel de Lyon que les qualifications juridiques possibles de l'indemnité payée par la SA Polyclinique Saint-Odilon au docteur Y..., y compris celle retenue par la cour dans sa motivation, ont été débattues par les parties ; qu'ainsi, le moyen, tiré de ce que la cour aurait fondé sa décision sur un moyen soulevé d'office et qui n'aurait pas été régulièrement soumis aux parties, manque en fait ;

Considérant, en second lieu, qu'en estimant que, nonobstant la circonstance que la société Polyclinique Saint-Odilon n'était pas partie à la transaction conclue entre les deux praticiens, et qu'elle n'était par suite tenue par aucune stipulation contractuelle de prendre en charge le montant de l'indemnité perçue par le docteur Y..., la clause par laquelle ce dernier avait renoncé à se réinstaller dans le département pendant une durée de cinq ans à compter de son départ de la polyclinique, bénéficiait à celle-ci qui avait ainsi acquis, par l'effet de la transaction prévoyant cette clause, un élément d'actif incorporel, la Cour a souverainement apprécié les faits qui lui étaient soumis qu'en en déduisant que la somme en cause, versée en contrepartie de l'acquisition de cet élément d'actif incorporel, ne constituait pas un revenu distribué entre les mains de son principal associé, au sens de l'article 109-I-2° du code général des impôts, la cour administrative d'appel a fait une exacte application de ces dispositions ; que le ministre n'est par suite pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué qui est suffisammentmotivé ;
Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer à M. et Mme X... la somme de 25 000 F qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. et Mme X... une somme de 25 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Jean-Paul X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 8 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 196133
Date de la décision : 27/03/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - ACTE ANORMAL DE GESTION - CAContrôle du juge de cassation - Dépense bénéficiant à l'entreprise par l'acquisition d'un élément d'actif incorporel - Appréciation souveraine des juges du fond.

54-08-02-02-01 Transaction conclue entre deux chirurgiens associés d'une société gérant une clinique, aux termes de laquelle l'un d'entre eux cède ses actions et prend l'engagement de ne pas se réinstaller dans le département, bénéficiant en contrepartie du versement d'une indemnité. a) En estimant que, nonobstant la circonstance que la société n'était pas partie à la transaction conclue entre les deux praticiens et qu'elle n'était par suite tenue par aucune stipulation contractuelle de prendre en charge le montant de l'indemnité de non-réinstallation, la clause par laquelle l'associé ayant cédé ses parts avait renoncé à se réinstaller dans le département pendant une durée de cinq ans à compter de son départ de la clinique bénéficiait à celle-ci qui avait ainsi acquis, par l'effet de la transaction prévoyant cette clause, un élément d'actif incorporel, la cour administrative d'appel se livre à une appréciation souveraine des faits non susceptible de discussion en cassation. b) En déduisant de ces éléments souverainement appréciés que la somme en cause, versée en contrepartie de l'acquisition d'un élément d'actif incorporel, ne constitue pas un revenu distribué par la société entre les mains de son principal associé, au sens des dispositions de l'article 109-I-2° du code général des impôts, la cour administrative d'appel ne commet pas d'erreur de droit.

- RJ1 - RJ2 PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - CASSATION - CONTROLE DU JUGE DE CASSATION - REGULARITE INTERNE - CAImpôts sur les revenus et les bénéfices - Bénéfices industriels et commerciaux - Acte anormal de gestion - a) Dépense bénéficiant à l'entreprise par l'acquisition d'un élément d'actif incorporel - Appréciation souveraine des juges du fond - b) Application - à partir des éléments souverainement appréciés - des dispositions de l'article 109-I-2° du code général des impôts - Contrôle d'erreur de droit (1) (2).

19-04-02-01-04-082 Transaction conclue entre deux chirurgiens associés d'une société gérant une clinique, aux termes de laquelle l'un d'entre eux cède ses actions et prend l'engagement de ne pas se réinstaller dans le département, bénéficiant en contrepartie du versement d'une indemnité. En estimant que, nonobstant la circonstance que la société n'était pas partie à la transaction conclue entre les deux praticiens et qu'elle n'était par suite tenue par aucune stipulation contractuelle de prendre en charge le montant de l'indemnité de non-réinstallation, la clause par laquelle l'associé ayant cédé ses parts avait renoncé à se réinstaller dans le département pendant une durée de cinq ans à compter de son départ de la clinique bénéficiait à celle-ci qui avait ainsi acquis, par l'effet de la transaction prévoyant cette clause, un élément d'actif incorporel, la cour administrative d'appel se livre à une appréciation souveraine des faits non susceptible de discussion en cassation.


Références :

CGI 109
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75

1.

Cf. Section, 1992-07-10, Société Musel S.B.P., T. p. 921. 2.

Cf. décision du même jour, Société Polyclinique Saint-Odilon, n° 196168, statuant sur l'imposition de l'entreprise


Publications
Proposition de citation : CE, 27 mar. 2000, n° 196133
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: M. Sauron
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova
Avocat(s) : SCP Vier, Barthélemy, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:196133.20000327
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