La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/05/2000 | FRANCE | N°165162

France | France, Conseil d'État, 17 mai 2000, 165162


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 janvier 1995 et 18 mai 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER, représenté par son directeur en exercice, dont le siège est ... (34059) ; le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER demande au Conseil d'Etat d'annuler sans renvoi l'arrêt du 1er décembre 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, à la demande de Mme X... née Y..., après avoir annulé le jugement du 18 août 1993 du tribunal administratif de Montpelli

er, d'une part, l'a condamné à verser à l'intéressée la somme de...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 janvier 1995 et 18 mai 1995 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER, représenté par son directeur en exercice, dont le siège est ... (34059) ; le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER demande au Conseil d'Etat d'annuler sans renvoi l'arrêt du 1er décembre 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, à la demande de Mme X... née Y..., après avoir annulé le jugement du 18 août 1993 du tribunal administratif de Montpellier, d'une part, l'a condamné à verser à l'intéressée la somme de 800 000 F, à la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers-Saint-Pons la somme de 1 274 620 F et à l'Etat la somme de 1 618 265 F majorée des intérêts de droit à compter du 15 janvier 1991, en réparation des préjudices consécutifs à la tentative de suicide de Mme X... survenue le 7 novembre 1985, d'autre part, a mis à sa charge les frais d'expertise taxés à 1 300 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale et notamment son article L. 376-1 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Sanson, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Parmentier, avocat du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER et de la SCP Peignot, Garreau, avocat des consorts X...,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X..., agent de l'Etat, s'est enfuie du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER et a tenté de se suicider ; qu'elle a survécu à cette tentative après amputation des deux jambes ; que la cour administrative d'appel de Bordeaux a condamné le centre hospitalier à verser à l'intéressée la somme de 800 000 F, à la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers-Saint-Pons la somme de 1 274 620 F et à l'Etat la somme de 1 618 265 F et a mis à la charge du centre hospitalier les frais d'expertise ;
Sur le caractère non contradictoire de l'expertise :
Considérant que la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a pas méconnu les dispositions de l'article R. 164 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en jugeant que, si l'expertise ordonnée par le tribunal administratif de Montpellier devait être regardée comme irrégulière au motif qu'elle n'avait pas été menée contradictoirement, et a, pour ce motif, annulé le jugement du tribunal, cette circonstance ne faisait pas obstacle, après évocation du litige, à ce que le rapport de l'expert, qui constitue une des pièces du dossier, soit retenu à titre d'élément d'information ;
Sur la fixation du préjudice personnel subi par Mme X... :
Considérant qu'après avoir évalué à 100 000 F le préjudice subi par Mme X... au titre des souffrances physiques et à 100 000 F son préjudice esthétique, la cour a fixé à 600 000 F le préjudice résultant des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence ; que cette dernière somme est exclusive des pertes de revenus de l'intéressée, lesquelles ont été réparées par une pension versée par l'Etat ; qu'elle constitue ainsi une indemnité de caractère personnel ; qu'en l'absence de partage de responsabilité, la cour a pu légalement en déduire, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, que Mme X... avait droit à l'intégralité de la somme de 800 000 F ;
Sur les frais futurs d'appareillage et sur les droits à remboursement de la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers-Saint-Pons :
Considérant toutefois que si la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers-Saint-Pons pouvait réclamer le remboursement de toutes les prestations qu'elle a effectivement servies à la suite de l'accident dont a été victime Mme X..., la cour administrative d'appel de Bordeaux ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, condamner le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER à verser à ladite caisse, au titre des frais futurs d'appareillage, un capital de 182 329,60 F en l'absence d'accord du tiers responsable sur le versement dudit capital ; que l'arrêt attaqué doit être annulé sur ce point ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond et de statuer sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie devant la cour administrative d'appel ;

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers-Saint-Pons justifie de débours s'élevant à 1 092 291,30 F au titre des frais médicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation qui sont la conséquence de l'accident dont a été victime Mme X... ; que les frais d'appareillage futurs, qui ne sont dus qu'au fur et à mesure des débours, doivent être remboursés par le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER à concurrence des sommes effectivement versées par la caisse jusqu'au décès de Mme X... dans la limite maximum de 44 112 F ;
Sur la réparation due à l'Etat :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 : "Le remboursement par le tiers responsable des arrérages de pension ou rentes ayant fait l'objet d'une concession définitive est effectué par le versement d'une somme liquidée en calculant le capital représentatif de la pension ou de la rente" ; qu'il en résulte que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en fixant, comme elle y était tenue, le capital de la pension d'invalidité que l'Etat devait verser à Mme X... ; que c'est à bon droit que ce capital, fixé à 1 618 265 F, a été majoré des intérêts de droit ; que toutefois, la cour, en raison d'une erreur purement matérielle, a fixé à tort le point de départ de ces intérêts au 15 janvier 1991 au lieu du 15 janvier 1993, date d'enregistrement au greffe du tribunal administratif de Montpellier du mémoire présenté par le ministre chargé du budget ; que l'arrêt attaqué doit également être annulé sur ce point ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et en application de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'en application des dispositions précitées de l'ordonnance du 7 janvier 1959, l'Etat a droit aux intérêts sur la somme de 1 168 265 F que le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER a été condamné à lui verser, à compter du 15 janvier 1993, date d'enregistrement du mémoire présenté par le ministre du budget au greffe du tribunal administratif de Montpellier ;
Sur les conclusions du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer au centre hospitalier régional la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions des consorts X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER à payer aux consorts X... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'article 2 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 1er décembre 1994 est annulé en tant qu'il condamne le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DEMONTPELLIER à verser la somme de 1 274 620 F à la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers-Saint-Pons et en tant qu'il a fixé au 15 janvier 1991 le point de départ des intérêts accordés à l'Etat.
Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers-Saint-Pons la somme de 1 092 291,30 F.
Article 3 : Le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER remboursera à la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers-Saint-Pons, dans la limite maximum de la somme de 44 112 F, les frais de renouvellement d'appareillage qu'elle a effectivement déboursés jusqu'au décès de Mme X....
Article 4 : La somme de 1 618 265 F que le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER est condamné à verser à l'Etat portera intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 1993.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER et des conclusions de Mme X... devant la cour administrative d'appel de Bordeaux est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE MONTPELLIER, aux consorts X..., à la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers-Saint-Pons, au ministre de l'emploi et de la solidarité et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 165162
Date de la décision : 17/05/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE.

SANTE PUBLIQUE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE DES HOPITAUX.


Références :

Code de la sécurité sociale L376-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R164
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 59-76 du 07 janvier 1959 art. 1


Publications
Proposition de citation : CE, 17 mai. 2000, n° 165162
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sanson
Rapporteur public ?: M. Chauvaux

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:165162.20000517
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award