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24/05/2000 | FRANCE | N°193720

France | France, Conseil d'État, 24 mai 2000, 193720


Vu le recours, enregistré le 28 janvier 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 26 novembre 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, d'une part, a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du jugement en date du 15 juin 1995 par lequel le tribunal administratif de Nice a déchargé la Caisse régionale de crédit agricole mutuel des Alpes-Maritimes de la cotisa

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Vu le recours, enregistré le 28 janvier 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 26 novembre 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, d'une part, a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du jugement en date du 15 juin 1995 par lequel le tribunal administratif de Nice a déchargé la Caisse régionale de crédit agricole mutuel des Alpes-Maritimes de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1982 à raison de la réintégration d'une provision pour charge salariale liée à un litige, d'autre part, a condamné l'Etat à verser à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel des Alpes-Maritimes une somme de 5 000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°) statuant au fond, en application de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1987, de remettre intégralement l'imposition contestée à la charge de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel des Alpes-Maritimes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Séners, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lesourd, avocat de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel des Alpes-Maritimes,
- les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : ( ...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice ( ...)" ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice le montant de charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice et qu'elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'un accord conclu le 18 février 1982, soit avant l'entrée en vigueur de la loi du 30 juillet 1982 qui a interdit toute majoration de salaire du 1er juin au 31 octobre 1982, entre la Fédération nationale de crédit agricole, agissant en qualité de mandataire des caisses régionales de crédit agricole, et les organisations syndicales représentant les salariés de l'ensemble de ces caisses, avait prévu des augmentations du point d'indice de rémunération notamment au 1er août et au 1er octobre 1982 ; qu'un second accord, conclu entre les mêmes parties le 7 décembre 1982, soit après l'expiration de la période de blocage des rémunérations prévue par la loi précitée et applicable à toutes les caisses régionales de crédit agricole, prévoyait, au 1er décembre 1982, une augmentation inférieure à celle prévue dans l'accord susévoqué du 18 février 1982 pour le 1er octobre 1982 et comportait une clause de réserve aux termes de laquelle "dans le cas où une décision de justice définitive viendrait à fixer une valeur du point supérieure à celle prévue par le présent accord à un moment donné, cette augmentation s'imputera sur les augmentations prévues" ; que si, avant la clôture de l'exercice clos en 1982, plusieurs salariés d'autres caisses régionales ont engagé devant les juridictions de l'ordre judiciaire des actions visant à obtenir le bénéfice, à compter du 1er novembre 1982, de rémunérations supérieures à celles prévues par l'accord salarial conclu le 7 décembre 1982, aucune de ces actions n'était dirigée contre la caisse régionale de crédit agricole mutuel des Alpes-maritimes ; que, toutefois, en prenant en compte, pour apprécier la probabilité d'un risque de charges salariales supplémentaires résultant de décisions judiciaires dans une caisse déterminée, l'existence d'une stipulation d'un accord applicable à l'ensemble des caisses, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit ; qu'en estimant, alors même que la Fédération nationale du crédit agricole n'aurait eu connaissance qu'en février 1983 des actions engagées contre les caisses régionales, que la probabilité du risque était suffisante et que, par suite, la caisse régionale justifiait du bien fondé dela provision constituée pour faire face à la charge dont il s'agit, précise dans son montant, elle a porté sur les faits qui lui étaient soumis et qu'elle n'a pas dénaturés une appréciation souveraine qui n'est pas susceptible d'être discutée en cassation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer à la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel des Alpes-maritimes une somme de 15 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel des Alpes-Maritimes une somme de 15 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel des Alpes-Maritimes.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LES BENEFICES DES SOCIETES ET AUTRES PERSONNES MORALES.


Références :

CGI 39, 209
Loi du 30 juillet 1982
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 24 mai. 2000, n° 193720
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Séners
Rapporteur public ?: M. Touvet

Origine de la décision
Date de la décision : 24/05/2000
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 193720
Numéro NOR : CETATEXT000008082028 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2000-05-24;193720 ?
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