Vu la requête enregistrée le 6 avril 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le SYNDICAT NATIONAL DES PHARMACIENS PRATICIENS ET RESIDENTS DES ETABLISSEMENTS FRANCAIS D'HOSPITALISATION PUBLICS, dont le siège est ..., représenté par son président ; le SYNDICAT NATIONAL DES PHARMACIENS PRATICIENS ET RESIDENTS DES ETABLISSEMENTS FRANCAIS D'HOSPITALISATION PUBLICS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la circulaire n° 99-67 du 5 février 1999 du ministre de l'emploi et de la solidarité relative à la campagne budgétaire pour 1999 des établissements sanitaires et financiers par dotation globale et au mode de prise en charge par l'assurance maladie de onze spécialités pharmaceutiques délivrées selon le régime de la rétrocession ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Donnat, Auditeur,
- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'emploi et de la solidarité :
Considérant que la circulaire du ministre de l'emploi et de la solidarité du 5 février 1999, qui prévoit la possibilité, pour les pharmacies à usage intérieur des établissements de santé, de vendre au public des spécialités pharmaceutiques qui étaient réservées à l'usage hospitalier, modifie les conditions d'emploi et les modalités d'exercice de l'activité de pharmacien hospitalier ; que le SYNDICAT NATIONAL DES PHARMACIENS PRATICIENS ET RESIDENTS DES ETABLISSEMENTS FRANCAIS D'HOSPITALISATION PUBLICS, qui se donne notamment pour mission la promotion de l'exercice pharmaceutique hospitalier et l'intégration des pharmaciens dans les équipes médicales, a intérêt et, par suite, qualité pour en contester la légalité ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 595-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi du 18 janvier 1994 : "L'activité des pharmacies à usage intérieur est limitée à l'usage particulier des malades dans les établissements de santé ou médico-sociaux où elles ont été constituées ou qui appartiennent au syndicat interhospitalier" ; que l'article L. 595-7-1 du même code dispose que : "Dans l'intérêt de la santé publique, le ministre chargé de la santé arrête, par dérogation aux dispositions de l'article L. 595-1, la liste des médicaments que certains établissements de santé, disposant d'une pharmacie à usage intérieur, sont autorisés à vendre au public, au détail et dans le respect des conditions prévues aux articles L. 618 à L. 621. Les conditions d'utilisation et le prix de cession de ces médicaments et des dispositifs médicaux stériles sont arrêtés conjointement par les ministres chargés de la santé, des affaires sociales et par le ministre de l'économie et des finances" ; que l'article L. 595-11 prévoit que : "Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent chapitre et notamment : ( ...) les critères selon lesquels sont arrêtés la liste des médicaments définie à l'article L. 595-7-1, leur prix de cession, ainsi que le choix des établissements autorisés, par le même article, à vendre lesdits médicaments au public ( ...)" ;
Considérant qu'à la date de la circulaire attaquée, le décret en Conseil d'Etat prévu par les dispositions précitées de l'article L. 595-11 du code de la santé publique n'était pas intervenu ; qu'ainsi, faute de disposer des critères selon lesquels doivent notamment être arrêtés, d'une part, la liste des médicaments définie à l'article L. 595-7-1 et, d'autre part, leur prix de cession, le ministre de l'emploi et de la solidarité ne pouvait, par les dispositions attaquées de la circulaire du 5 février 1999, ni fixer une liste de spécialités pharmaceutiques vendues par les établissements de santé aux patients non hospitalisés et fixer, par là même, les critères prévus par l'article L. 595-11 dudit code, ni prévoir que "les spécialités visées par la présente circulaire ( ...) seront facturées au prix coûtant (prix d'achat TVA incluse)" ; qu'il résulte de ce qui précède que, d'une part, les dispositions attaquées présentent un caractère réglementaire et sont, par suite, susceptibles d'être déférées à la juridiction administrative par la voie du recours pour excès de pouvoir et que, d'autre part, elles sont entachées d'incompétence ; que, dès lors, le SYNDICAT NATIONAL DES PHARMACIENS PRATICIENS ET RESIDENTS DES ETABLISSEMENTS FRANCAIS D'HOSPITALISATIONPUBLICS est fondé à en demander l'annulation en tant qu'elles fixent une liste de spécialités pharmaceutiques vendues au public par les pharmacies à usage intérieur des établissements de santé et qu'elles déterminent le prix de cession de ces spécialités ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer au SYNDICAT NATIONAL DES PHARMACIENS PRATICIENS ET RESIDENTS DES ETABLISSEMENTS FRANCAIS D'HOSPITALISATION PUBLICS une somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La circulaire du ministre de l'emploi et de la solidarité en date du 5 février 1999 est annulée en tant qu'elle fixe une liste de spécialités pharmaceutiques vendues au public par les pharmacies à usage intérieur des établissements de santé et détermine le prix de cession de ces spécialités.
Article 2 : L'Etat versera au SYNDICAT NATIONAL DES PHARMACIENS PRATICIENS ET RESIDENTS DES ETABLISSEMENTS FRANCAIS D'HOSPITALISATION PUBLICS une somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT NATIONAL DES PHARMACIENS PRATICIENS ET RESIDENTS DES ETABLISSEMENTS FRANCAIS D'HOSPITALISATION PUBLICS et au ministre de l'emploi et de la solidarité.