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31/05/2000 | FRANCE | N°182012

France | France, Conseil d'État, 9 / 10 ssr, 31 mai 2000, 182012


Vu le recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 27 août 1996 et le mémoire complémentaire, enregistré le 26 décembre 1996, présentés par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 27 juin 1996 en tant que la Cour, par ledit arrêt, a rejeté les conclusions de l'appel formé devant elle par le ministre du budget contre un jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 23 septembre 1993, tendant, à titre principal, à ce que soient

remis à la charge de l'Association "Strasbourg musique et cong...

Vu le recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 27 août 1996 et le mémoire complémentaire, enregistré le 26 décembre 1996, présentés par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 27 juin 1996 en tant que la Cour, par ledit arrêt, a rejeté les conclusions de l'appel formé devant elle par le ministre du budget contre un jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 23 septembre 1993, tendant, à titre principal, à ce que soient remis à la charge de l'Association "Strasbourg musique et congrès" un montant de taxe sur la valeur ajoutée de 5 192 239 F et 485 536 F d'indemnités de retard au titre de la période du 1er janvier 1987 au 30 avril 1990, et, subsidiairement, à la prescription d'un supplément d'instruction aux fins de déterminer le montant des déductions de taxe indûment effectuées par l'Association et susceptibles de donner lieu à une compensation ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Roger, avocat de l'Association "Strasbourg musique et congrès",
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions du recours présenté par le ministre de l'économie et des finances :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel que le recours présenté devant celle-ci par le ministre du budget comportait, à titre principal, des conclusions tendant à ce que fût remis à la charge de l'Association "Strasbourg musique et congrès" le complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui avait été assigné du fait de la soumission à cette taxe des subventions d'équilibre ou d'équipement qu'au cours des années 1987 à 1990, lui ont versés la ville de Strasbourg, le département du Bas-Rhin et la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin, et, à titre subsidiaire, des conclusions tendant à ce que la décharge de cette imposition prononcée par les premiers juges fût en partie compensée par la réduction des droits à déduction de l'Association à ceux résultant de l'application du rapport défini à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, inclusion faite du montant des subventions litigieuses au dénominateur de ce rapport ; que, si le ministre a, dans son dernier mémoire devant la Cour, notamment exposé que l'Association n'avait pas satisfait aux conditions auxquelles la doctrine administrative subordonne la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé des investissements lorsque ceux-ci ont été réalisés à l'aide de subventions d'équipement qui n'ont pas, elles-mêmes, été soumises à la taxe, c'est à juste titre que la cour administrative d'appel a regardé cette observation comme, en tout état de cause, inopérante au soutien des conclusions, susanalysées, qui avaient, seules, été formulées devant elle ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : "Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti en tant que tel" ; que le 1) de l'article 266-1 du même code, dans sa rédaction applicable au cours de la période concernée par le présent litige, dispose que la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée est constituée : "a) pour les livraisons de biens et les prestations de services, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de la livraison ou de la prestation ..." ; que cette dernière disposition a été prise pour l'adaptation de la législation nationale à l'article 11 A 1 de la 6ème directive 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977, selon lequel "la base d'imposition est constituée : a) pour les livraisons de biens et prestations de services ..., par tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ..." ; que la cour administrative d'appel a, dans l'arrêt attaqué, relevé, comme résultant de l'instruction, que les subventions versées par la ville de Strasbourg, le département du Bas-Rhin et la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin à l'Association "Strasbourg musique et congrès" au cours de chacune des années 1987 à 1990 afin d'équilibrer son budget n'avaient été la contrepartie d'aucune prestation de service individualisable rendue par elle à ces collectivités et organisme, que l'octroi de ces subventions n'avait été lié à la souscription, par l'Association, d'aucun engagement relatif à la nature ou au prix des prestations effectuées par elle, et qu'enfin, le montant et le mode de calcul des subventions ne traduisaient pas une relation entre celles-ci et le service de "promotion" que l'Association, selon le ministre, aurait rendu aux parties versantes ; que, de ces faits, souverainement constatés, la cour administrative d'appel a, contrairement à ce que soutient le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, légalement déduit qu'en l'absence de lien direct entre les prestations effectuées par l'Association et les subventions d'équilibre litigieuses, celles-ci ne devaient pas être regardées comme ayant rémunéré des prestations de services effectuées à titreonéreux, et, dès lors, n'entraient pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, tel que défini par les dispositions précitées du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en ce que la cour administrative d'appel a rejeté les conclusions principales du recours présenté devant elle par le ministre du budget ;
Sur les conclusions du recours incident formé par l'Association "Strasbourg musique et congrès" :

Considérant que la cour administrative d'appel a, par l'arrêt attaqué, rejeté les conclusions de la requête présentée devant elle par l'Association "Strasbourg musique et congrès", aux fins de décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée que l'administration lui a assigné en conséquence du refus d'admettre la déductibilité de la taxe qui a grevé des frais de publicité supportés au cours de l'année 1988, à des fins regardées comme étrangères aux nécessités de son exploitation ;
Considérant, en premier lieu, qu'en estimant, pour écarter le moyen tiré par l'Association de ce que la notification de redressements à elle adressée le 6 août 1990 n'aurait pas été suffisamment motivée en ce qui concerne ce chef de rappel, que les termes de cette notification faisaient ressortir le motif de fait retenu par le vérificateur, et tenant à ce que les prestations de services publicitaires grevées de la taxe litigieuse ne pouvaient pas être regardées comme nécessaires à l'exploitation de l'Association, et que celle-ci avait ainsi été mise en mesure de formuler utilement ses observations alors même que le vérificateur n'avait pas exposé l'ensemble des éléments de fait qui fondaient cette appréciation, la cour administrative d'appel a, sans dénaturer la notification dont s'agit ni commettre d'erreur de droit quant à la portée des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, souverainement pris position sur ce point ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales, la compétence consultative de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires inclut, en ce qui concerne ces dernières taxes, les différends portant sur le montant des chiffres d'affaires réels, mais non ceux qui ont trait aux droits à déduction de taxe sur la valeur ajoutée ; que la cour administrative d'appel n'a, par suite, pas commis d'erreur de droit en jugeant que le vérificateur avait pu, en l'espèce, sans que la procédure d'imposition en fût entachée d'irrégularité, rayer, sur l'imprimé de notification de redressements, la mention relative à la saisine de la commission départementale ;

Considérant, en dernier lieu, qu'en ce qui concerne le bien-fondé du redressement litigieux, la cour administrative d'appel a relevé que l'Association "Strasbourg musique et congrès" a, en 1988, réglé des sommes qui lui ont été facturées par une agence de publicité et qui correspondaient à la quote-part, de moitié, devant en principe incomber à la ville de Strasbourg, du coût d'une campagne publicitaire entreprise à l'initiative conjointe de la ville et de la Chambre de commerce et d'industrie, et dont l'objet était de promouvoir l'"image" de la ville et de la région, sans aucune mention particulière de l'Association et des prestations qu'elle assure en tant que gestionnaire du Palais de la Musique et des Congrès de Strasbourg ; que, de ces faits souverainement constatés, la Cour a pu, sans erreur de droit, déduire que les frais ainsi supportés ne pouvaient pas être regardés comme exposés par l'Association pour les besoins de son activité, et sans se contredire, juger, insuffisante, à cet égard, la circonstance, invoquée par la requérante, que la campagne publicitaire en cause était de nature à favoriser indirectement son exploitation ; que, dès lors, c'est à bon droit que la Cour a reconnu l'administration fondée à refuser la déduction par l'Association de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les frais de publicité pris par elle en charge ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Association "Strasbourg musique et congrès" n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en ce que la cour administrative d'appel a rejeté les conclusions de sa requête d'appel ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et les conclusions du recours incident de l'Association "Strasbourg musique et congrès" sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à l'Association "Strasbourg musique et congrès".


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-06-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE.


Références :

CEE Directive 77-388 du 17 mai 1977 Conseil des Communautés européennes art. 11
CGI 256, 266-1
CGI Livre des procédures fiscales L57, L59 A
CGIAN2 212


Publications
Proposition de citation: CE, 31 mai. 2000, n° 182012
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Fabre
Rapporteur public ?: M. Courtial

Origine de la décision
Formation : 9 / 10 ssr
Date de la décision : 31/05/2000
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 182012
Numéro NOR : CETATEXT000008075829 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2000-05-31;182012 ?
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