Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 4 mars 1998 et 6 juillet 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. VERMANDOISE INDUSTRIES venant aux droits de la SA Sucrerie distillerie de Bihucourt dont le siège est situé à Sainte-Emilie à Villers-Faucon (80240) ; la S.A. VERMANDOISE INDUSTRIES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt en date du 18 décembre 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a réformé le jugement du 11 mai 1993 du tribunal administratif de Lille, en tant qu'il annule l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Lille et a réintégré dans les bases d'imposition de la société la provision constituée à la clôture des exercices clos le 30 juin de chacune des années 1982, 1983, 1984, 1985 en prévision d'une charge correspondant à sa participation à la résorption du déficit du régime communautaire d'organisation de la production et de la commercialisation du sucre ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 12 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 97-1177 du 24 décembre 1997 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Vallée, Auditeur,
- les observations de la SCP Nicolay, de Lanouvelle, avocat de la S.A. VERMANDOISE INDUSTRIES venant aux droits de la SA Sucrerie distillerie Bihucourt,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SA sucrerie distillerie de Bihucourt, aux droits de laquelle vient la S.A. VERMANDOISE INDUSTRIES, qui a pour activité la production de sucre et d'isoglucoses, a constitué, au titre des exercices clos les 30 juin des années 1982, 1983, 1984 et 1985 des provisions en prévision de charges qu'elle aurait pu être amenée à supporter sous forme de cotisation de résorption susceptible d'être demandée aux fabricants de sucre pour combler le déficit, constaté durant chacun des exercices vérifiés, du régime des échanges de sucre et d' isoglucose aux frontières extérieures de la communauté européenne institué dans le cadre de l'organisation communautaire du marché du sucre ;
Considérant qu'en vertu de l'article 39-1-5° du code général des impôts : "les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice "sont déductibles des bénéfices dudit exercice ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provisions et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la clôture de l'exercice et qu'elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées, à cette date, par l'entreprise ;
Considérant que l'exposé des motifs du règlement n° 1785/81 du conseil des communautés européennes du 30 juin 1981 portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre indique que des aménagements devront être apportés au régime de quotas de production pour les secteurs du sucre et de l'isoglucose "pour doter la communauté des instruments nécessaires pour assurer de façon juste mais efficace le financement intégral par les producteurs eux-mêmes des charges liées à l'écoulement des excédents résultant du rapport entre la production de la communauté et sa consommation." ; que l'article 28 de ce règlement met en oeuvre le principe ainsi énoncé en prévoyant que l'éventuelle "perte globale prévisible" résultant d'un excédent des restitutions à l'exportation sur les prélèvements donne lieu à la perception auprès des fabricants de sucre d'une "cotisation à la production de base", voire, si celle-ci est insuffisante, d'une "cotisation B" l'une et l'autre étant plafonnées, sans instituer aucune autre cotisation supplémentaire dans le cas où une perte subsiste après perception de ces deux cotisations ; que dans ces conditions l'institution éventuelle d'une cotisation supplémentaire de résorption s'ajoutent aux cotisations prévues à l'article 28 précité n'avait pas à la clôture de chacun desexercices considérés, eu égard aux circonstances constatées à ces dates, et notamment à l'incertitude existant sur les modalités de résorption du déficit, un caractère de probabilité suffisant et, au surplus, ne pouvait pas être évalué avec une approximation suffisante ; que la circonstance que le règlement n° 934/86 du Conseil des communautés européennes du 24 mars 1986 modifiant le règlement 1785/81 précité ait postérieurement institué une telle cotisation est sans incidence sur l'appréciation du caractère probable de la charge à la clôture d'exercices antérieurs ; que dès lors, la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas fait une application inexacte de l'article 39-1-5°, précité du code général des impôts en jugeant que l'existence d'un déficit, à la date de clôture des exercices vérifiés, du régime financier de l'organisation communautaire du marché du sucre ne permettait pas, à elle seule, de regarder comme probables, à la fin de chacun des exercices, les charges ayant donné lieu aux provisions réintégrées par l'administration dans les résultats de la société ;
Sur les conclusions de la S.A. VERMANDOISE INDUSTRIES tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la S.A. VERMANDOISE INDUSTRIES venant aux droits de la SA Sucrerie Distillerie de Bihucourt la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la S.A. VERMANDOISE INDUSTRIES est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la S.A. VERMANDOISE INDUSTRIES venant aux droits de la SA Sucrerie Distillerie de Bihucourt et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.