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26/06/2000 | FRANCE | N°211000

France | France, Conseil d'État, 7 ss, 26 juin 2000, 211000


Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 21 juin 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 9 juin 1999 par lequel il avait décidé la reconduite à la frontière de Mlle Mondoukpé Pétronille Nadine X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code...

Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU VAL-DE-MARNE ; le PREFET DU VAL-DE-MARNE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 21 juin 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 9 juin 1999 par lequel il avait décidé la reconduite à la frontière de Mlle Mondoukpé Pétronille Nadine X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Peylet, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Boulloche, avocat de Mlle X...,
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ... 3°) Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait" ;
Considérant que Mlle X..., ressortissante béninoise, s'est maintenue sur le territoire plus d'un mois à compter de la date de notification le 15 mars 1999 de la décision du 23 février 1999 par laquelle le PREFET DU VAL-DE-MARNE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a invitée à quitter le territoire ; que l'intéressée entrait donc, à la date de l'arrêté attaqué, le 9 juin 1999, dans le champ d'application du 3° précité du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que Mlle X... est entrée en France à l'âge de 14 ans pour y poursuivre ses études ; qu'elle a effectué depuis lors sa scolarité sur le territoire national et y a acquis une formation sanctionnée par deux diplômes professionnels ; qu'il ressort des pièces du dossier que les liens familiaux et sociaux de Mlle X... sont pour l'essentiel en France ; qu'ainsi, eu égard aux circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté du 9 juin 1999 par lequel le PREFET DU VAL-DE-MARNE a décidé la reconduite à la frontière de Mlle X..., a porté au droit de celle-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le PREFET DU VAL-DE-MARNE n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Melun a annulé sa décision du 9 juin 1999 ;
Sur la demande de Mlle X... tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DU VAL-DE-MARNE de lui délivrer un titre de séjour :

Considérant qu'aux termes du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé ... l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur son cas" ; que l'annulation de l'arrêté du 9 juin 1999 n'implique donc que la délivrance d'une autorisation de séjour valable jusqu'à la nouvelle décision du préfet et non du titre de séjour sollicité par Mlle X... ; que, par suite, les conclusions de Mlle X... tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DU VAL-DE-MARNE de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur la demande de Mlle X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autrepartie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens" ; que l'article 43 de la même loi autorise le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle à demander au juge de condamner, dans les conditions prévues par l'article 75 précité, la partie perdante au paiement d'une somme au titre des frais qu'il a exposés ; qu'en l'espèce, Mlle X... n'établissant pas avoir exposé d'autres frais que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été accordée par décision du 5 octobre 1999, sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 5 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens doit être rejetée ;
Article 1er : La requête du PREFET DU VAL-DE-MARNE est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de Mlle X... tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DU VAL-DE-MARNE de lui délivrer un titre de séjour sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de Mlle X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU VAL-DE-MARNE, à Mlle X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 7 ss
Numéro d'arrêt : 211000
Date de la décision : 26/06/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 09 juin 1999
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75, art. 43
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 22 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 26 jui. 2000, n° 211000
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Peylet
Rapporteur public ?: M. Savoie

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:211000.20000626
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