Vu la requête, enregistrée le 14 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le CENTRE MEDICO-CHIRURGICAL ET OBSTETRICAL D'EVRY - CMCO, dont le siège est Le Peré à La Membrolle-sur-Choisille (37390), représenté par le président de son conseil d'administration ; le CENTRE MEDICO-CHIRURGICAL ET OBSTETRICAL D'EVRY - CMCO demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir les articles 2 et 3 de l'"avenant" n° 1 du 17 septembre 1998 complétant l'"accord" du 31 mars 1998 relatif à la fixation de l'objectif quantifié national pour l'année 1998, publié au Journal officiel de la République française du 13 octobre 1998, et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Donnat, Auditeur,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi de financement de la sécurité sociale du 19 décembre 1997 : "Chaque année est conclu, entre les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et au moins une autre caisse nationale d'assurance maladie, ainsi qu'une au moins des organisations syndicales nationales les plus représentatives des établissements privés de santé régis par l'article L. 710-16-2 du code de la santé publique, un accord fixant : 1° La répartition en montants régionaux du montant total annuel arrêté par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en fonction de l'objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie voté par le Parlement, des frais d'hospitalisation pris en charge par les régimes d'assurance maladie des établissements ayant passé contrat avec les agences régionales de l'hospitalisation en application des articles L. 710-16 et L. 710-16-2 du code de la santé publique ; ( ...) les montants régionaux sont répartis par discipline par les Agences régionales de l'hospitalisation ; ( ...) 3° Les tarifs des prestations servant de base au calcul de la participation de l'assuré" ; qu'en application de ces dispositions, un avenant n° 1 du 17 septembre 1998 a complété l'accord du 31 mars 1998 relatif à la fixation de l'objectif quantifié national pour l'année 1998 ; que l'article 2 de cet avenant définit les montants des réductions des forfaits de séances d'hémodialyse en centre prévues afin d'obtenir une économie de 75 millions de francs sur l'objectif quantifié national pour l'année 1998 ; que l'article 3 prévoit que ces réductions des forfaits de séance font l'objet d'une récupération d'un montant équivalent à ce qu'aurait entraîné son introduction au 1er avril 1998 ;
Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale : "A défaut de conclusion de cet accord dans un délai de quinze jours après la date de publication de la loi de financement de la sécurité sociale, un arrêté ministériel fixe le contenu des 1° à 5° ci-dessus" ; que l'expiration du délai de quinze jours a pour effet de dessaisir les parties désignées par les dispositions précitées de l'article L. 162-22-2 du code de la santé publique de leur compétence au profit d'un arrêté ministériel qui doit être signé par les seuls ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ; que le ministre de l'emploi et de la solidarité était par suite compétent, à la date de l'"avenant" attaqué, pour modifier l'"accord" du 31 mars 1998 lequel d'ailleurs était intervenu hors délai ; que la circonstance que l'"avenant" attaqué ait été, en outre, signé par l'ensemble des parties à l'"accord" du 31 mars 1998 est sans influence sur sa légalité dès lors qu'il a été signé par le ministre en charge tout à la fois de la santé et de la sécurité sociale ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les signataires de l'"accord" du 31 mars 1998 n'étaient plus, à la date de l'"avenant" attaqué, compétents pour modifier ledit "accord" ne peut qu'être écarté ;
Considérant toutefois que le ministre signataire de l'"avenant" attaqué devait, en application des dispositions précitées du 1° de l'article L. 162-22-2 du code de la sécurité sociale, répartir en montants régionaux le montant total annuel arrêté par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en fonction de l'objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie ; que les dispositions des articles 1, 2 et 3 de l'"avenant" attaqué procèdent à cette répartition par discipline et non en montants régionaux ; que, ce faisant, ils ont empiété sur la compétence dévolue par le législateur aux Agences régionales de l'hospitalisation ; que l'"avenant" attaqué est, sur ce point, entaché d'incompétence et doit être annulé ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer au CENTRE MEDICO-CHIRURGICAL ET OBSTETRICAL D'EVRY - CMCO la somme de 20 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les articles 1, 2 et 3 de l'"avenant" n° 1 complétant l'"accord" du 31 mars 1998 relatif à la fixation de l'objectif quantifié national pour l'année 1998 sont annulés.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser au CENTRE MEDICO-CHIRURGICAL ET OBSTETRICAL D'EVRY - CMCO la somme de 20 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au CENTRE MEDICO-CHIRURGICAL ET OBSTETRICAL D'EVRY - CMCO, à la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, à la caisse centrale de la mutualité sociale agricole, à la caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles, à la fédération française intersyndicale des établissements d'hospitalisation privés, à l'union hospitalière privée, à la fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privés à but non lucratif et au ministre de l'emploi et de la solidarité.