Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Hatice Y..., née Z..., demeurant chez M. Mehmet Z..., ... de Folard à Avignon (84000) ; Mme Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 20 septembre 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 août 1999 du préfet de Vaucluse ordonnant sa reconduite à la frontière et contre la décision du même jour fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;
2°) annule pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ;
3°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 8 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale des droits de l'enfant ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Dayan, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y... de nationalité turque s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 12 juillet 1999, de la décision du 8 juillet 1999 du préfet de Vaucluse lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, Mme Y... fait valoir qu'elle vit en France depuis 1997 avec son mari et ses enfants dont 2 sont scolarisés et que de nombreux membres de sa famille y habitent, ces éléments ne sont pas de nature à démontrer, compte-tenu des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de Mme Y... et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, que l'arrêté attaqué a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;
Considérant que dans ces conditions, l'arrêté attaqué n'est pas entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Considérant que si Mme Y... soutient que la décision attaquée porte atteinte au droit de ses enfants à suivre une scolarité normale et à mener une vie familiale normale, protégé par les articles 28 et 9 de la convention internationale des droits de l'enfant, les stipulations desdits articles qui créent des obligations entre Etats sans ouvrir de droit aux intéressés, ne peuvent utilement être invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir ;
Considérant que si Mme Y... invoque les risques que comporterait pour elle son retour dans son pays d'origine, elle n'apporte aucune précision permettant d'apprécier le bien-fondé d'une telle allégation ; que, par suite, le préfet de Vaucluse n'a pas méconnu les stipulations de l'article III de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée ; que les conclusions dirigées contre la décision distincte désignant le pays d'origine ne peuvent, dès lors qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Y... n'est pas fondée à soutenir que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés du 24 août 1999 par lesquels le préfet de Vaucluse a ordonné sa reconduite à la frontière et fixé la Turquie comme pays de destination ;
Sur les conclusions sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à X... SAHIN la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de Mme Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Hatice Y..., née Z..., au préfet de Vaucluse et au ministre de l'intérieur.