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28/07/2000 | FRANCE | N°186415

France | France, Conseil d'État, 9 / 10 ssr, 28 juillet 2000, 186415


Vu le recours, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 21 mars 1997, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 22 janvier 1997 de la cour administrative d'appel de Lyon en tant que, réformant le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 septembre 1993, il a déchargé M. et Mme X... des suppléments d'impôt sur le revenu résultant de la réintégration des frais financiers auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1982 et 1983 ;
Vu le

s autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
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Vu le recours, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 21 mars 1997, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 22 janvier 1997 de la cour administrative d'appel de Lyon en tant que, réformant le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 septembre 1993, il a déchargé M. et Mme X... des suppléments d'impôt sur le revenu résultant de la réintégration des frais financiers auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1982 et 1983 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bonnot, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Raymond X...,
- les conclusions de M. Courtial, Commissaire du gouvernement ;

Sur le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES :
Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts, le bénéfice net imposable issu de l'exploitation d'une entreprise industrielle ou commerciale "est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant", et qu'aux termes du 1 de l'article 39 du même code : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges ..." ;
Considérant que, dans une entreprise individuelle, le capital engagé dans l'entreprise est à tout moment égal au solde créditeur du compte personnel de l'exploitant ; que ce compte doit, à la date de clôture de chaque exercice, être crédité ou débité des résultats bénéficiaires ou déficitaires, et doit, en cours d'exercice, être crédité ou débité des suppléments d'apport ou des prélèvements effectués ; qu'aucune obligation n'étant faite à l'exploitant, dont la responsabilité personnelle et illimitée garantit les droits des créanciers, de maintenir engagé dans l'entreprise un capital minimum, les prélèvements qu'il effectue sur son compte personnel ne peuvent être regardés comme anormaux tant que ce compte ne présente pas, de ce fait, un solde débiteur ; que si, au contraire, le solde de ce compte devient débiteur, ce qui signifie que l'exploitant alimente sa trésorerie personnelle au détriment de celle de son entreprise, les prélèvements effectués ne peuvent, dans cette mesure, au cas où figure au passif du bilan de l'entreprise une dette correspondant à des emprunts ou des découverts bancaires générateurs de frais financiers, qu'être assortis de la prise en charge personnelle, par l'exploitant, d'une quote-part appropriée de ces frais, laquelle doit, par suite, être soustraite des charges d'exploitation déductibles pour la détermination du bénéfice imposable en vertu du 1 précité de l'article 39 du code général des impôts ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel que les prélèvements effectués par Mme Claude Ladet dans la caisse du fond de commerce de boulangerie et d'alimentation qu'elle exploitait individuellement à Marlens (Haute-Savoie) ont eu pour effet de rendre constamment débiteur, au cours des exercices clos durant les années 1982 et 1983, le solde de son compte personnel dans les écritures de l'entreprise, alors que figurait au passif du bilan de ladite entreprise le montant d'emprunts contractés par celle-ci et générateurs de frais financiers comptabilisés parmi les charges d'exploitation ; que la cour administrative d'appel a, par l'arrêt attaqué, prononcé la décharge de la fraction des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels M. et Mme X... ont été assujettis au titre des années 1982 et 1983 et résultant de ce que l'administration avait réintégré aux bénéfices imposables une quote-part de ces frais financiers, déterminés en fonction des soldes débiteurs du compte personnel de Mme Ladet ; que la Cour s'est fondée sur la circonstance que l'administration n'établissait pas que certains des emprunts aient été contractés à une époque où le compte de l'exploitant était débiteur ou qu'ils aient eu pour cause l'engagement de dépenses personnelles et qu'en dépit du supplément d'instruction ordonné par les premiers juges, le ministre ne précisait pas le montant des frais financiers supportés par l'entreprise à raison d'un emprunt souscrit le 23 décembre 1982 et d'un découvert autorisé sur les années 1982 et 1983 qui pouvait seul, selon la Cour, faire l'objet d'une réintégration ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en déduisant de la circonstance que certains emprunts avaient été souscrits à un moment où le compte de l'exploitant n'était pas débiteur que les charges financières entraînées par lesdits emprunts et supportées au cours de chacun des exercices clos en 1982 et 1983 demeuraient, en tout état de cause, intégralement déductibles des bénéfices imposables de ces exercices, en application des dispositions du 1 de l'article 39 du code général des impôts, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que le ministre du budget est, par suite, fondé àdemander l'annulation, sur ce point, de l'arrêt attaqué ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler immédiatement l'affaire en fond ;
Considérant que, dès lors que le solde du compte personnel de Mme Ladet dans les écritures de son entreprise a été constamment débiteur au cours des exercices clos en 1982 et 1983, alors que figurait au passif du bilan de cette entreprise le montant d'emprunts générateurs de frais financiers, l'administration a pu à bon droit écarter des charges d'exploitation déductibles de ces exercices une quote-part desdits frais ; que le montant des réintégrations auxquelles elle a procédé de ce chef n'est pas critiqué par Mme Ladet ; que celle-ci n'est, par suite, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement dont elle fait appel, le tribunal administratif a rejeté sa demande en réduction des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre de chacune des années 1982 et 1983 ;
Sur le recours incident de M. et Mme X... :

Considérant, que les conclusions incidentes de M. et Mme X... relatives à des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu établies au titre des années 1984 et 1985 et aux pénalités y afférentes et présentées après l'expiration du délai du recours en cassation doivent être rejetées comme irrecevables dès lors que le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ne porte que sur les impositions établies au titre des années 1982 et 1983 ;
Sur les conclusions de M. et Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à payer à M. et Mme X... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt du 22 janvier 1997 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé en tant qu'il s'est prononcé sur les suppléments d'impôt sur le revenu auxquels M. et Mme X... ont été assujettis au titre des années 1982 et 1983 à raison de la réintégration de frais financiers.
Article 2 : Le recours incident présenté par M. et Mme X... devant le Conseil d'Etat est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de la requête présentée par M. et Mme Ladet devant la cour administrative d'appel de Lyon et relatives aux suppléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1982 et 1983 sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de M. et Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à M. et Mme Raymond X....


Synthèse
Formation : 9 / 10 ssr
Numéro d'arrêt : 186415
Date de la décision : 28/07/2000
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LE REVENU.


Références :

CGI 38, 39
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2000, n° 186415
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bonnot
Rapporteur public ?: M. Courtial

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:186415.20000728
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