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28/07/2000 | FRANCE | N°199549

France | France, Conseil d'État, 28 juillet 2000, 199549


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 septembre 1998 et 11 janvier 1999 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE ; la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 16 juillet 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre le jugement du 23 octobre 1995 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a, d'une part, annulé la délibération de son conseil municipal en date du 23 septembre 1992 dé

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 septembre 1998 et 11 janvier 1999 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE ; la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 16 juillet 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre le jugement du 23 octobre 1995 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a, d'une part, annulé la délibération de son conseil municipal en date du 23 septembre 1992 décidant de retenir l'entreprise Degremont pour la construction d'une station d'épuration et, d'autre part, déclaré la commune responsable du préjudice subi par la société A.D.S.F. du fait de son éviction du marché ;
2°) de rejeter la demande formée par la société A.D.S.F. devant le tribunal administratif de Toulouse ;
3°) de condamner la société A.D.S.F. à lui payer la somme de 30 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive n° 91-271 (CEE) du 21 mai 1991 du Conseil des Communautés européennes ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Stefanini, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE, et de Me Odent, avocat de la société A.D.S.F.,
- les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement du 23 octobre 1995, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la délibération du 23 septembre 1992 du conseil municipal de Villefranche-de-Rouergue portant attribution d'un marché de réalisation d'une station d'épuration des eaux usées et déclaré la commune responsable du préjudice subi par la société A.D.S.F. du fait de son éviction du marché ; que par un arrêt du 16 juillet 1998, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la requête de la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE tendant à l'annulation de ce jugement ; que la commune se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;
Sur la régularité de l'arrêt attaqué :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond et des mentions de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a fondé son arrêt sur aucun moyen de droit ou de fait invoqué dans le mémoire en réplique de la société A.D.S.F. enregistré le 28 mars 1998 au greffe de la cour ; que dès lors la circonstance, à la supposer établie, que ce mémoire n'aurait pas été communiqué à la commune n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie devant la cour ;
Considérant qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que, pour annuler la délibération litigieuse, la cour s'est fondée sur la circonstance que le conseil municipal avait déterminé son choix en recourant à un critère relatif au respect par la future installation des normes applicables aux rejets des stations d'épuration fixées comme objectif par la directive n° 91-271 (CEE) du 21 mai 1991, mais qui ne figurait ni dans le règlement particulier d'appel d'offres ni dans le cahier des charges techniques particulières ; qu'elle a ainsi suffisamment motivé son arrêt alors même qu'elle n'a pas précisé quelles étaient celles des normes issues de la directive qui avaient ainsi servi de critère de choix ;
Considérant que l'article 2 du règlement particulier de l'appel d'offres dont il s'agit disposait que : "En plus de la solution de base, au plus deux variantes seront admises pour la chaîne de traitement" ; que selon l'article 4 du cahier des clauses techniques particulières : "Deux solutions devront être étudiées pour atteindre le niveau e, NGL1, Pt1 pour les effluents. ( ...) Une troisième solution pourra être proposée pourvu qu'elle garantisse le niveau de qualité demandée. Le titulaire indiquera la solution qu'il considère comme solution de base, les autres étant alors des variantes" ; qu'en jugeant qu'une offre respectant les seuils issus de la directive n° 91-27 (CEE) du 21 mai 1991 ne pouvait être regardée comme une variante au sens de ces dispositions, la cour a suffisamment motivé son arrêt ; qu'elle a, ce faisant, expressément répondu, en le rejetant, au moyen tiré de ce que le conseil municipal se serait borné à faire usage des pouvoirs qu'il détenait dans le cadre de laprocédure d'appel d'offres avec variantes ;

Considérant qu'en jugeant que "l'entreprise A.D.S.F., dont le choix avait été proposé par le jury, a été, du fait de son éviction illégale du marché, privée d'une chance sérieuse de le remporter" et que cette entreprise avait droit "au remboursement du manque à gagner qu'elle a subi du fait de l'inexécution des prestations prévues", la cour a répondu au moyen soulevé par la commune et tiré de l'absence de lien de causalité entre l'illégalité de la délibération attribuant le marché à la société Degremont et le préjudice invoqué par la société A.D.S.F. ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient la commune requérante, la cour n'a pas relevé que le motif tiré de la supériorité technique de l'offre de la société Degremont était mentionné pour la première fois en appel ;
Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :
Considérant qu'en estimant que la commune avait fait, en définitive, du respect des normes d'épuration fixées comme objectif par la directive du Conseil du 21 mai 1991 susmentionnée un critère de choix distinct de ceux qui avaient été précédemment énoncés dans le règlement d'appel d'offres et, en en déduisant qu'une offre respectant ces normes ne pouvait être regardée comme une variante technique du projet, telle que prévue par le règlement de l'appel d'offres, la cour n'a pas commis d'erreur de qualification juridique ;
Considérant que les juges du fond qui ont annulé pour excès de pouvoir la délibération litigieuse au motif que le conseil municipal avait retenu un critère de choix non prévu dans l'appel d'offres et porté ainsi atteinte à l'égalité entre les entreprises soumissionnaires n'ont pas commis d'erreur de droit en s'abstenant de rechercher si la supériorité technique, à la supposer établie, de l'offre retenue, aurait pu fonder légalement cette délibération ;
Considérant que le moyen tiré de ce que les entreprises candidates, dont la société A.D.S.F., pouvaient légalement présenter des offres prenant en compte les normes fixées comme objectif par la directive du Conseil du 21 mai 1991 est inopérant dès lors que l'arrêt attaqué s'est référé, pour annuler la délibération, non au contenu des offres, mais au critère retenu par le conseil municipal pour choisir entre ces offres ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt du 16 juillet 1998 de la cour administrative d'appel de Bordeaux ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la société A.D.S.F., qui n'est pas la partie perdante, soit condamnée à payer à la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE la somme qu'elle demande ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE à payer à la société A.D.S.F. la somme de 15 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE est condamnée à payer la somme de 15 000 F à la société A.D.S.F.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE VILLEFRANCHE-DE-ROUERGUE, à la société A.D.S.F. et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 199549
Date de la décision : 28/07/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-06 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE.


Références :

Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2000, n° 199549
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Stefanini
Rapporteur public ?: M. Austry

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:199549.20000728
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