Vu la requête, enregistrée le 20 mai 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L' ESSONNE ; le PREFET DE L' ESSONNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 8 avril 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé, à la demande de Mme Farida Y... l'arrêté par lequel il a décidé la reconduite à la frontière de celle-ci ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié par l'avenant du 22 décembre 1985 et par l'avenant du 28 septembre 1994 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Edouard Philippe, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Pradon, avocat de Mme Farida Y... ;
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ..." ;
Considérant que Mme Y..., de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire au-delà de la durée d'un mois à compter de la notification intervenue le 1er avril 1998 de la décision du 31 mars 1998 par laquelle le PREFET DE L'ESSONNE a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a invitée à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application de l'article 22-I (3°) de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger ;
Considérant que si l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 prévoit la délivrance de plein droit d'un certificat de résidence au "conjoint algérien d'un ressortissant français", l'article 9 du même accord subordonne expressément la possibilité pour les intéressés de bénéficier de ces stipulations, à la nécessité de "présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si X... Rabah s'est mariée le 6 juillet 1998 avec un ressortissant français, comme l'atteste l'acte de mariage qu'elle a produit, il est constant qu'elle ne disposait pas d'un passeport valide muni d'un visa de long séjour ; que, par suite, le PREFET DE L'ESSONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que pour prononcer l'annulation de l'arrêté du 29 mars 1999 par lequel il a ordonné la reconduite à la frontière de l'intéressée, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur ce que ledit arrêté aurait été pris en violation des stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
Considérant, en outre, qu'eu égard tant au fait que Mme Y... a contracté mariage postérieurement à la décision refusant de lui accorder un titre de séjour qu'à la brève durée de cette union à la date de l'édiction de l'arrêté décidant sa reconduite, cet arrêté n'a pas porté au respect dû à sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, le PREFET DE L'ESSONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que pour annuler la mesure dereconduite prise à l'encontre de l'intéressée, le premier juge a retenu également la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen présenté par Mme Y... à l'appui de sa demande devant le tribunal administratif de Versailles ;
Considérant que si les dispositions de l'article 25-4° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 interdisent de reconduire à la frontière : " ... l'étranger, marié depuis un an, dont le conjoint est de nationalité française ..." ; il est constant que le mariage de Mme Y... avec un ressortissant français datait de moins d'un an lorsque l'arrêté prononçant sa reconduite à la frontière est intervenu ; que l'intéressée ne peut donc prétendre au bénéfice de ces dispositions ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE L'ESSONNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté en date du 29 mars 1999 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Y... ;
Article 1er : Le jugement en date du 8 avril 1999 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ESSONNE, à Mme Y... et au ministre de l'intérieur.