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28/07/2000 | FRANCE | N°208103

France | France, Conseil d'État, 28 juillet 2000, 208103


Vu 1°), sous le 208103, la requête, enregistrée le 21 mai 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le LABORATOIRE PAUCOURT, dont le siège est ..., représenté par son gérant ; le LABORATOIRE PAUCOURT demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du ministre de l'emploi et de la solidarité et du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du 7 septembre 1998 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux, en ce qu'il concerne les quatre présentations de la spécialité dénommée "Siserol", e

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Vu 1°), sous le 208103, la requête, enregistrée le 21 mai 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le LABORATOIRE PAUCOURT, dont le siège est ..., représenté par son gérant ; le LABORATOIRE PAUCOURT demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du ministre de l'emploi et de la solidarité et du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du 7 septembre 1998 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux, en ce qu'il concerne les quatre présentations de la spécialité dénommée "Siserol", et de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre de l'emploi et de la solidarité et par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur sa demande tendant au retrait dudit arrêté ;
Vu 2°), sous le n° 208104, la requête, enregistrée le 21 mai 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le LABORATOIRE GLAXO-WELLCOME, dont le siège est ... ; le LABORATOIRE GLAXO-WELLCOME demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du ministre de l'emploi et de la solidarité et du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie du 7 septembre 1998 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux, en ce qu'il concerne les quatre présentations de la spécialité dénommée "Serevent", et de la décision implicite née du silence gardé par l'administration pendant plus de quatre mois sur la demande qu'il a présentée et tendant au retrait dudit arrêté ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu le traité de Rome instituant la communauté économique européenne devenue la communauté européenne ;
Vu la directive 89/105/CEE du Conseil des communautés européennes du 21 décembre 1988 concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d'application des systèmes d'assurance maladie ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu l'arrêté du 4 août 1987 modifié relatif aux prix et aux marges des médicaments remboursables et des vaccins et des allergènes préparés spécialement pour un individu ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Donnat, Auditeur,
- les observations de la SCP Lesourd, avocat des LABORATOIRES PAUCOURT et GLAXO-WELLCOME,
- les conclusions de Mlle Fombeur, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes du LABORATOIRE PAUCOURT et du LABORATOIRE GLAXO-WELLCOME sont dirigées contre le même arrêté du 7 septembre 1998 du ministre de l'emploi et de la solidarité et du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables en tant qu'il diminue le prix de vente des spécialités commercialisées respectivement par ces laboratoires sous les noms de "Siserol" et "Serevent", et contre la décision de rejet née du silence gardé par ces ministres pendant plus de quatre mois sur leur demande présentée par les laboratoires tendant au retrait de cet arrêté ; qu'il y a lieu de joindre ces requêtes pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la directive 89/105/CEE du Conseil des communautés européennes du 21 décembre 1988 concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d'application des systèmes d'assurance maladie : "Les dispositions suivantes sont applicables lorsque la commercialisation d'un médicament n'est autorisée qu'après que les autorités compétentes de l'Etat membre intéressé ont approuvé le prix du produit : 1. Les Etats membres veillent à ce qu'une décision relative au prix applicable au médicament en question soit adoptée et communiquée au demandeur dans un délai de 90 jours suivant la réception d'une demande présentée, conformément aux conditions fixées dans l'Etat membre concerné, par le titulaire d'une autorisation de commercialisation. 2. Si les autorités compétentes décident de ne pas autoriser la commercialisation du médicament en question au prix proposé par le demandeur, la décision comporte un exposé des motifs fondé sur des critères objectifs et vérifiables" ; qu'aux termes de l'article L. 162-38 du code de la sécurité sociale : "Sans préjudice des dispositions du présent code relatives aux conventions conclues entre les organismes d'assurance maladie et les professions de santé, les ministres chargés de l'économie, de la santé et de la sécurité sociale peuvent fixer par arrêtés les prix et les marges des produits et les prix des prestations de service pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale. Cette fixation tient compte de l'évolution des charges, des revenus et du volume d'activité des praticiens ou entreprises concernées" ;
Considérant que si les LABORATOIRES PAUCOURT et GLAXO-WELLCOME soutiennent que les dispositions précitées de l'article L. 162-38 du code de la sécurité sociale seraient incompatibles avec les objectifs fixés par l'article 2 de la directive du 21 décembre 1998 en combinaison avec son article 6, en ce qu'elles permettent aux ministres chargés de l'économie, de la santé et de la sécurité sociale de fixer le prix d'une spécialité pharmaceutique sans que le laboratoire qui la commercialise ne propose préalablement un prix, les dispositions de la directive qu'ils invoquent n'imposent pas que la décision de modifier le prix de vente au public d'une spécialité pharmaceutique inscrite sur la liste des médicaments remboursables aux assurés sociaux soit nécessairement précédée d'une demande de modification du prix émanant du laboratoire commercialisant cette spécialité ;

Considérant, il est vrai, que l'article 1er de la directive du 21 décembre 1988 dispose que : "Les Etats membres veillent à ce que toute mesure nationale, qu'elle soit de nature législative, réglementaire ou administrative, en vue de contrôler les prix des médicaments à usage humain ( ...) soit conforme aux exigences de la présente directive" ;
Considérant toutefois que le sixième considérant de cette directive énonce que, pour éliminer les disparités entre les Etats membres, "il est urgent, dans un premier temps, d'établir une série d'exigences permettant à toutes les parties intéressées de vérifier si les mesures nationales ne constituent pas des restrictions quantitatives aux importations ou aux exportations, ou des mesures d'effet équivalent ; que, toutefois, ces mesures n'affectent pas la politique des Etats membres qui se fonde principalement sur la libre concurrence pour déterminer les prix des médicaments ; que ces exigences n'affectent pas non plus les politiques nationales en matière de fixation des prix et d'instauration des systèmes de sécurité sociale, sauf dans la mesure où cela est nécessaire aux fins des transparences au sens de la présente directive" ; que le septième considérant précise que "le rapprochement ultérieur de telles mesures doit être progressif" ; que, compte tenu de la portée limitée ainsi conférée à la directive, il s'ensuit, et sans qu'il soit besoin de saisir, à titre préjudiciel, la Cour de justice des communautés européennes, que doit être écarté le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article L. 162-38 du code de la sécurité sociale seraient incompatibles avec les objectifs clairs de l'article 2 de la directive du 21 décembre 1988 du Conseil des communautés européennes ;
Considérant que les LABORATOIRES PAUCOURT et GLAXO-WELLCOME ne peuvent, pour les mêmes motifs, soutenir que l'arrêté du 7 septembre 1998 serait incompatible avec les objectifs fixés par l'article 2 de la directive du 21 décembre 1988 en ce qu'il aurait été adopté passé le délai de 90 jours prévu par cet article ; que l'arrêté attaqué n'est pas davantage contraire aux objectifs définis à l'article 5 de la directive communautaire du 21 décembre 1988 qui concerne seulement les systèmes généralisés de contrôle des profits réalisés par les fabricants de médicaments ;

Considérant que, dans l'exercice du pouvoir réglementaire qu'ils tiennent de l'article L. 162-38 du code de la sécurité sociale, les ministres chargés de l'économie, de la santé et de la sécurité sociale disposent du pouvoir de fixer, à tout moment, par arrêté conjoint, le prix des médicaments remboursables en tenant compte des seuls critères définis par cet article ; que, par suite, les laboratoires requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté du 7 septembre 1998, pris en application de ces dispositions, porterait à la liberté contractuelle une atteinte d'une gravité telle qu'il méconnaîtrait la liberté découlant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, à laquelle renvoie le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, et que cet arrêté serait illégal faute d'être intervenu à l'issue de la procédure prévue par l'arrêté du 4 août 1987 modifié relatif aux prix et aux marges des médicaments remboursables et des vaccins et des allergènes préparés spécialement pour un individu, qui prévoit une procédure distincte de fixation des prix des spécialités qui leur faisait obligation de déposer auprès des ministres chargés de l'économie de la santé et de la sécurité sociale une proposition de modification du prix limite de leur produit ;
Considérant enfin que les LABORATOIRES PAUCOURT et GLAXO-WELLCOME ne sauraient, en tout état de cause, se prévaloir utilement d'un moyen tiré de la méconnaissance des principes de confiance légitime et de sécurité juridique dès lors que les décisions attaquées, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ne sont pas au nombre des actes pris par le gouvernement français pour la mise en oeuvre du droit communautaire ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les laboratoires PAUCOURT et GLAXO-WELLCOME ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 7 septembre 1998 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux, en tant qu'il concerne les spécialités commercialisées sous les noms de "Serevent" et de "Siserol", et de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre de l'emploi et de la solidarité et par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur sa demande tendant au retrait dudit arrêté ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer aux LABORATOIRES PAUCOURT et GLAXO-WELLCOME la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes des LABORATOIRES PAUCOURT et GLAXO-WELLCOME sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée aux LABORATOIRES PAUCOURT et GLAXO-WELLCOME, au Premier ministre, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 208103
Date de la décision : 28/07/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

SANTE PUBLIQUE - PHARMACIE - PRODUITS PHARMACEUTIQUES.

SECURITE SOCIALE - RELATIONS AVEC LES PROFESSIONS ET LES ETABLISSEMENTS SANITAIRES - RELATIONS AVEC LES PROFESSIONS DE SANTE - DIRECTEURS DE LABORATOIRES.


Références :

Arrêté du 04 août 1987
Arrêté du 21 décembre 1988
Arrêté du 07 septembre 1998
CEE Directive 89-105 du 22 décembre 1988 Conseil des communautés européennes art. 1, art. 2, art. 6
Code de la sécurité sociale L162-38
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2000, n° 208103
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Donnat
Rapporteur public ?: Mlle Fombeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:208103.20000728
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