Vu la requête, enregistrée le 15 octobre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 12 juin 1999 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris, en tant que, par ce jugement, le conseiller a annulé la décision distincte, contenue dans son arrêté du 19 octobre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Innocent X..., fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Guilhemsans, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Garaud, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Innocent X..., de nationalité congolaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 1er juillet 1998, de la décision du 25 juin 1998 par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 19 octobre 1998 du PREFET DE POLICE ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... : "L'intéressé sera reconduit à destination du pays dont il a la nationalité ou qui lui a délivré un titre de voyage en cours de validité ou encore à destination de tout pays dans lequel il établit être légalement admissible" ; qu'ainsi, cet arrêté comporte une décision distincte fixant le pays de destination de l'intéressé, qui doit être regardée comme désignant notamment le Congo, pays dont il a la nationalité et dans lequel il est légalement admissible ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., dont la mère, agent du service diplomatique, a été récemment assassinée au Congo pour des motifs politiques, courrait personnellement des risques graves en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, la décision distincte figurant à l'article 2 de l'arrêté attaqué méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en tant qu'elle désigne le Congo parmi les pays de renvoi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 19 octobre 1998 fixant le pays de renvoi de M. X... ;
Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Innocent X... et au ministre de l'intérieur.