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28/07/2000 | FRANCE | N°214329

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 28 juillet 2000, 214329


Vu la requête, enregistrée le 15 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat d'annuler :
1°) le jugement en date du 22 septembre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 octobre 1998 décidant la reconduite à la frontière de M. Adelhak X... ;
2°) de rejeter la demande de M. X... présentée devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l

a convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fon...

Vu la requête, enregistrée le 15 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat d'annuler :
1°) le jugement en date du 22 septembre 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 octobre 1998 décidant la reconduite à la frontière de M. Adelhak X... ;
2°) de rejeter la demande de M. X... présentée devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lafouge, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Boissard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 22 janvier 1998, de la décision du 7 janvier précédent par laquelle le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a refusé de lui accorder un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans l'un des cas où le préfet peut, en application des dispositions précitées, ordonner la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que le moyen tiré des risques encourus par M. X... en cas de retour en Algérie était inopérant à l'encontre des conclusions dirigées contre le seul arrêté de reconduite à la frontière ; que, par suite, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif s'est fondé sur ce motif pour annuler la mesure de reconduite ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen invoqué par M. X... devant le tribunal administratif ;
Considérant que si M. X... soutient que son père, trois de ses soeurs et un de ses frères résident en France, il n'apporte à leur propos aucun élément susceptible d'établir qu'il a désormais en France le centre de sa vie privée et familiale ; que le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut, par suite, être accueilli ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. X... ;
Sur la décision fixant l'Algérie comme pays de renvoi :
Considérant que le second alinéa de l'article 27 bis ajouté à l'ordonnance du 2 novembre 1945 par la loi du 24 août 1993 dispose qu'un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que "sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ..." ; que ce dernier texte énonce que : "Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants" ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet Etat, soit mêmedu fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au Conseil d'Etat que M. X..., policier en Algérie, a fait l'objet de menaces sérieuses à l'égard de sa personne ; que, dans ces circonstances, il est établi que l'intéressé encourrait, en cas de retour dans son pays, de graves risques pour sa vie ; qu'ainsi et nonobstant le fait que la demande de M. X... tendant à l'admission au statut de réfugié a été rejetée par l'office de protection des réfugiés et apatrides puis par la commission des recours des réfugiés, la décision du 20 octobre 1998 par laquelle le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a ordonné sa reconduite vers son pays est intervenue en méconnaissance des dispositions introduites à l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par la loi du 24 août 1993 ; que, par suite, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de M. X..., la décision fixant l'Algérie comme pays de destination de sa reconduite ;
Article 1er : Le jugement du 22 septembre 1999 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté en date du 20 octobre 1998 reconduisant M. X... à la frontière.
Article 2 : La demande de M. X... présentée devant le tribunal administratif, dirigée contre l'arrêté de reconduite, est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, à M. Abdelhak X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 214329
Date de la décision : 28/07/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 20 octobre 1998
Loi 93-1027 du 24 août 1993
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 27 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2000, n° 214329
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lafouge
Rapporteur public ?: Mme Boissard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:214329.20000728
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