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28/07/2000 | FRANCE | N°214774

France | France, Conseil d'État, 28 juillet 2000, 214774


Vu 1°) sous le n° 214774, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 25 novembre et 3 décembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. André X..., demeurant au lieu-dit "La Vinçane", Chemin de Palladau à Pernes-les-Fontaines (84210) et par M. Bruno Y..., demeurant ... ; M. X... et M. Y... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 19 avril 1999 pris pour l'application de l'article 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique ;
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°) d'annuler la décision implicite par laquelle le Premier ministre et l...

Vu 1°) sous le n° 214774, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 25 novembre et 3 décembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. André X..., demeurant au lieu-dit "La Vinçane", Chemin de Palladau à Pernes-les-Fontaines (84210) et par M. Bruno Y..., demeurant ... ; M. X... et M. Y... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 19 avril 1999 pris pour l'application de l'article 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique ;
2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le Premier ministre et le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ont rejeté la demande M. Y... tendant à une répartition de la somme due pour l'année 1999 au titre du financement des partis politiques au prorata du nombre d'élus ayant quitté le Front National et s'étant inscrit au Mouvement National ;
3°) d'enjoindre à l'Etat de verser au Mouvement National la somme qui lui revient compte tenu du nombre de candidats s'étant déclarés en sa faveur à la suite de la "partition" intervenue entre le Mouvement National et le Front National ;
4°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 10 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu, 2°) sous le n° 218117, l'ordonnance du 28 février 2000, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 2 mars 2000, par laquelle le président du tribunal administratifde Paris a transmis au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête de M. André X... ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 et 28 juin 1999 au greffe du tribunal administratif de Paris, présentés par M. X..., demeurant au lieu-dit "La Vinçane", chemin de Palladau, à Pernes-les-Fontaines (84210) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la demande dont il était saisi et tendant à ce qu'une partie de la somme due pour l'année 1999 au titre du financement des partis politiques par application de la loi du 11 mars 1988 soit versée au Mouvement National ;
2°) d'enjoindre au Premier ministre et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de procéder au versement au "Mouvement National" des sommes qui lui sont dues au titre de la loi du 11 mars 1988 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Constitution, notamment son article 4 ;
Vu la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 ;
Vu le code électoral ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Edouard Philippe, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Le Griel, avocat du Front National,
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les deux requêtes présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des requêtes :
Considérant qu'aux termes de l'article 9 de la loi du 11 mars 1988 : "La première fraction des aides prévues à l'article 8 est attribuée aux partis et groupements politiques qui ont présenté des candidats dans au moins cinquante circonscriptions lors du plus récent renouvellement de l'Assemblée Nationale ... La répartition est effectuée proportionnellement au nombre de suffrages obtenus au premier tour de ces élections par chacun des partis et groupements en cause ... En vue d'effectuer la répartition prévue à l'alinéa précédent, les candidats à l'élection des députés indiquent, s'il y a lieu, dans leur déclaration de candidature, le parti ou le groupement politique auquel ils se rattachent" ;
Considérant qu'en application de ces dispositions, le décret du 19 avril 1999 a retenu, pour le Front National, un nombre de voix de 3 777 266 et attribué à ce parti politique, au titre de la première fraction de l'aide publique, une somme de 41 140 421,21 F ; que, par deux lettres du 21 mai 1999, M. Y..., ancien membre de l'association Front National, a, d'une part, demandé au Premier ministre et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de verser au Mouvement National Républicain la partie de cette somme correspondant au nombre de candidats ayant, depuis le plus récent renouvellement de l'Assemblée Nationale, renoncé à leur rattachement au Front National pour rejoindre le Mouvement National Républicain, parti nouvellement créé, et d'autre part, de retirer le décret du 19 avril 1999 ;
Considérant que le moyen tiré de ce que le décret attaqué méconnaitrait les dispositions de l'article 4 de la Constitution selon lesquelles les partis politiques se forment et exercent leur activité librement, tend en réalité à mettre en cause la constitutionnalité de la loi du 11 mars 1988 sur le fondement de laquelle a été pris ledit décret ; qu'il n'appartient pas au Conseil d'Etat statuant au contentieux d'apprécier la conformité d'une loi à la Constitution ; qu'ainsi le moyen invoqué ne peut qu'être écarté ;

Considérant que si la loi du 11 mars 1988 a prévu que la seconde fraction de l'aide publique était attribuée aux partis et groupements politiques bénéficiaires de la première fraction proportionnellement au nombre de membres du Parlement ayant déclaré au bureau de leur assemblée dans le mois qui suit l'ouverture de la première session ordinaire de chaque année s'y être inscrit ou s'y rattacher, ce critère n'est applicable qu'à la seconde fraction de l'aide publique ; que, pour procéder à la répartition entre les partis et groupements politiques de la première fraction de l'aide publique proportionnellement aux suffrages obtenus par les candidats, l'administration est liée par la mention portée dans les déclarations de candidature, lesquelles ont, pour l'application de l'article 9 de la loi du 11 mars 1988, un caractère exclusif et irrévocable ; que, dans l'hypothèse où des candidats entendent, après le dépôt de leur déclaration de candidature, soit modifier le parti auquel ils se rattachent, soit se prévaloir de leur adhésion à un parti créé postérieurement à la date du plus récent renouvellement de l'Assemblée Nationale, l'administration ne peut que s'en tenir à la mention indiquée dans la déclaration de candidature ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MM. X... et Y... ne sont fondés à demander ni l'annulation du décret du 19 avril 1999, ni l'annulation de la décision résultant du silence gardé par l'administration rejetant leur demande de versement d'une partie de la somme attribuée à l'association "Front National" au titre de l'article 9 de la loi du 11 mars 1988 ;
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de verser au Mouvement National une partie de la somme due au Front National au titre de l'article 9 de la loi du 11 mars 1988 :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6-1 de la loi du 16 juillet 1980 modifiée : "Lorsqu'il règle un litige au fond par une décision qui implique nécessairement une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le Conseil d'Etat, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure et peut assortir sa décision d'une astreinte à compter d'une date qu'il détermine ;
Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions de MM. X... et Y... tendant à l'annulation du décret du 19 avril 1999 et de la décision implicite du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de procéder au versement de la somme due au Front National au titre de l'article 9 de la loi du 11 mars 1988 au prorata du nombre de candidats du Front National s'étant ralliés au Mouvement National, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions susanalysées ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à MM. X... et Y... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner MM. X... et Y... à payer à l'association "Front National" la somme de 20 000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes de MM. X... et Y... sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de l'association "Front National" tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. André X..., à M. Bruno Y..., à l'association "Front National", au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, au ministre de l'intérieur et au Premier ministre.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 214774
Date de la décision : 28/07/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

10-01-03 ASSOCIATIONS ET FONDATIONS - QUESTIONS COMMUNES - RESSOURCES.


Références :

Décret 99-301 du 19 avril 1999
Loi 80-539 du 16 juillet 1980 art. 6-1
Loi 88-227 du 11 mars 1988 art. 9
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 2000, n° 214774
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Edouard Philippe
Rapporteur public ?: M. Savoie

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:214774.20000728
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