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27/10/2000 | FRANCE | N°198205

France | France, Conseil d'État, 6 / 4 ssr, 27 octobre 2000, 198205


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 juillet et 23 novembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Pierre X..., expert-comptable, demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision n° 438 du 1er avril 1998 par laquelle la chambre nationale de discipline auprès du Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables a confirmé la décision du 7 juillet 1997 par laquelle la chambre de discipline auprès du conseil régional de Lille Nord-Pas-de-Calais a prononcé à son encontre la

sanction du blâme avec inscription au dossier pour démarchage direc...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 juillet et 23 novembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Pierre X..., expert-comptable, demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision n° 438 du 1er avril 1998 par laquelle la chambre nationale de discipline auprès du Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables a confirmé la décision du 7 juillet 1997 par laquelle la chambre de discipline auprès du conseil régional de Lille Nord-Pas-de-Calais a prononcé à son encontre la sanction du blâme avec inscription au dossier pour démarchage direct ou indirect de clientèle par voie de conférence à caractère publicitaire ;
2°) de condamner le Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables à lui verser la somme de 20 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 70-147 du 19 février 1970 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de la Verpillière, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Gatineau et de la SCP Piwnica, Molinié, avocats de M. X... et de la SCP Peignot, Garreau, avocat du Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, qu'aux termes de l'article 56 de l'ordonnance du 19 septembre 1945 susvisée, portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable : "La tutelle des pouvoirs publics sur l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés est exercée par le ministre de l'économie et des finances qui, à cet effet, est représenté par un commissaire du gouvernement auprès du conseil supérieur de l'ordre." ; que, selon l'article 57 de la même ordonnance, le commissaire du gouvernement assiste aux séances de la chambre nationale de discipline et a le pouvoir de former devant le Conseil d'Etat tout recours contre les décisions prises par la chambre nationale de discipline ; qu'il résulte de ces dispositions que, devant la chambre nationale de discipline, le commissaire du gouvernement a la qualité de partie à l'instance ; que, sauf à méconnaître le principe du contradictoire, cette qualité lui impose de communiquer, avant l'audience, au membre de l'ordre poursuivi, pour que celui-ci puisse y répondre, les conclusions qu'il sera amené à prononcer devant la chambre nationale de discipline ;
Considérant que M. X..., qui relevait appel devant la chambre nationale de discipline auprès du conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables de la sanction disciplinaire qui lui avait été infligée par la chambre régionale de discipline auprès du conseil régional de Lille-Nord-Pas-de-Calais, soutient qu'en violation du principe du contradictoire, il n'a pas eu connaissance, avant l'audience, des conclusions du commissaire du gouvernement ; que, si, en réponse au supplément d'instruction ordonné par le Conseil d'Etat et tendant à la production des observations faites par le commissaire du gouvernement à l'audience du 1er avril 1998 où a été examiné l'appel de M. X..., l'ordre des experts comptables fait valoir que ces conclusions ont été seulement orales et soutient que, dès lors que M. X... a eu la faculté d'y répondre, le principe du contradictoire doit être regardé comme ayant été respecté, il résulte de ce qui a été dit précédemment que ces circonstances ne sont pas de nature à établir que la procédure suivie au cours de l'audience a été régulière ;
Considérant, au surplus, qu'en appel, M. X... contestait l'existence, d'une part, de la délibération du conseil régional de l'Ordre décidant de saisir la chambre régionale de discipline, d'autre part, de la justification que le rapporteur de son affaire en première instance était, comme l'exige l'article 54 du décret du 19 février 1970 relatif à l'Ordre des experts-comptables et des comptables agréés, membre de la chambre régionale de discipline près le conseil régional de l'Ordre ; qu'en se bornant à déclarer que l'intéressé ne rapportait pas la preuve des irrégularités de procédure qu'il alléguait et que sa contestation revenait "à qualifier de faux ... la lettre du président du conseil régional saisissant la chambre régionale de discipline et l'ordonnance de désignation du rapporteur", la chambre nationale de discipline a indûment renversé la charge de la preuve et omis de répondre aux moyens de l'intéressé qui n'étaient pas inopérants ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. X... est fondé à demander l'annulation de la décision n° 438 du 1er avril 1998 de la chambre nationale de discipline auprès du Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que le Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptbles qui, n'ayant pas été partie en appel et n'ayant été appelé en la cause que pour produire des observations, n'est pas partie à la présente instance, soit condamné à payer à M. X... la somme de 20 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, que les mêmes dispositions font obstacle à ce que M. X... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à verser une somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Article 1er : La décision n° 438 du 1er avril 1998 de la chambre nationale de discipline auprès du Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la chambre nationale de discipline auprès du Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables.
Article 3 : Les conclusions du Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées, ainsi que le surplus des conclusions de M. X....
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Pierre X..., au Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 6 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 198205
Date de la décision : 27/10/2000
Sens de l'arrêt : Annulation renvoi
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

55-04-01,RJ1 PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - DISCIPLINE PROFESSIONNELLE - PROCEDURE DEVANT LES JURIDICTIONS ORDINALES -CAOrdre des experts-comptables - Caractère contradictoire de la procédure - Obligation de communication des conclusions du commissaire du gouvernement - Existence (1).

55-04-01 En application de l'ordonnance du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable, le commissaire du gouvernement, qui représente le ministre de l'économie et des finances, assiste aux séances de la chambre nationale de discipline et a le pouvoir de former devant le Conseil d'Etat tout recours contre les décisions prises par ladite chambre. Il en résulte que le commissaire du gouvernement a, devant la chambre nationale de discipline, la qualité de partie à l'instance. Sauf à méconnaître le principe du contradictoire, cette qualité lui impose de communiquer, avant l'audience, au membre de l'ordre poursuivi, pour que celui-ci puisse y répondre, les conclusions qu'il sera amené à prononcer devant la chambre nationale de discipline.


Références :

Décret 70-147 du 19 février 1970 art. 54
Instruction du 01 avril 1998
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2138 du 19 septembre 1945 art. 56

1.

Rappr. 1998-07-29, Mme Esclatine, p. 320


Publications
Proposition de citation : CE, 27 oct. 2000, n° 198205
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. de la Verpillière
Rapporteur public ?: M. Lamy
Avocat(s) : SCP Gatineau, SCP Piwnica, Molinié, SCP Peignot, Garreau, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:198205.20001027
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