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17/11/2000 | FRANCE | N°220453

France | France, Conseil d'État, 10 ss, 17 novembre 2000, 220453


Vu la requête, enregistrée le 2 mai 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU RHONE ; le PREFET DU RHONE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 avril 2000 par lequel le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a, d'une part, annulé ses arrêtés en date du 3 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... et Mlle Y... et ses décisions du même jour fixant le pays de destination et, d'autre part, condamné l'Etat à verser la somme de 4 000 F au titre des frais irrépétibl

es ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. X... et par Mlle Y.....

Vu la requête, enregistrée le 2 mai 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU RHONE ; le PREFET DU RHONE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 avril 2000 par lequel le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a, d'une part, annulé ses arrêtés en date du 3 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... et Mlle Y... et ses décisions du même jour fixant le pays de destination et, d'autre part, condamné l'Etat à verser la somme de 4 000 F au titre des frais irrépétibles ;
2°) de rejeter les demandes présentées par M. X... et par Mlle Y... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Dayan, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant que M. X... et Mlle Y..., de nationalité camerounaise, ont fait valoir devant le tribunal administratif qu'ils vivent maritalement en France depuis plusieurs années, que leurs deux enfants y sont nés et scolarisés et qu'un frère et une soeur de M. X... y sont installés ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que les requérants se sont maintenus sur le territoire français en situation irrégulière à partir de 1992, ont été reconduits à la frontière le 29 octobre 1996, sont rentrés en France irrégulièrement en 1997 et que M. X... a fait usage à partir de 1992, de faux documents d'identité ; que, compte tenu de ces circonstances et également de ce que M. X... et Mlle Y... ont fait l'un et l'autre l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière prise le même jour et qu'ils n'allèguent pas être dans l'impossibilité d'emmener leurs enfants avec eux, les arrêtés attaqués n'ont pas porté au droit de M. X... et Mlle Y... au respect de leur vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ils ont été pris ; qu'il en résulte que le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur le motif tiré de la violation de l'article 8 précité pour annuler ses arrêtés du 3 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... et Mlle Y... ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. X... et Mlle Y... devant le tribunal administratif de Lyon ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que M. X... et Mlle Y... se sont maintenus sur le territoire français plus d'un mois après la notification des décisions du 17 avril 1998 du PREFET DU RHONE leur refusant ladélivrance d'un titre de séjour et les invitant à quitter le territoire ; qu'ils étaient ainsi dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que la circonstance tirée de ce que les enfants de M. X... et Mlle Y... seraient scolarisés et bien intégrés à la société française ne permet pas d'établir que le PREFET DU RHONE aurait commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences des mesures d'éloignement sur la situation personnelle de M. X... et Mlle Y... ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... et Mlle Y... ne sont pas fondés à demander l'annulation des arrêtés litigieux ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... et Mlle Y... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Lyon du 6 avril 2000 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... et Mlle Y... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU RHONE, à M. Félix X..., à Mlle Charlotte Y... et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 03 mars 2000
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation: CE, 17 nov. 2000, n° 220453
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dayan
Rapporteur public ?: Mme Maugüé

Origine de la décision
Formation : 10 ss
Date de la décision : 17/11/2000
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 220453
Numéro NOR : CETATEXT000008029276 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2000-11-17;220453 ?
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