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29/11/2000 | FRANCE | N°192100

France | France, Conseil d'État, 8 / 3 ssr, 29 novembre 2000, 192100


Vu 1°), sous le n° 192100, le recours sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 décembre 1997 et 8 avril 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 8 octobre 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'article 1er du jugement du 2 août 1995 par lequel le tribunal administratif de Marseille a accordé à la SA Uni

fimo, aux droits de laquelle se trouve la société Crédit univer...

Vu 1°), sous le n° 192100, le recours sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 décembre 1997 et 8 avril 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 8 octobre 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'article 1er du jugement du 2 août 1995 par lequel le tribunal administratif de Marseille a accordé à la SA Unifimo, aux droits de laquelle se trouve la société Crédit universel, la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1979 et 1980 ;
Vu 2°), sous le n° 192109 le recours sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 10 décembre 1997 et 8 avril 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 8 octobre 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'article 1er du jugement du 2 août 1995 par lequel le tribunal administratif de Marseille a accordé à la SA Unifimo, aux droits de laquelle se trouve la société Crédit universel, la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1988 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Vallée, Auditeur,
- les conclusions de Mme Mignon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SA Unifimo, aux droits de laquelle vient la société Crédit universel, a fait partie, avec d'autres sociétés, d'une société en participation qui comptait parmi ses membres les sociétés Locunivers et Locationfor, dont l'activité était la location de biens de consommation avec option d'achat et dont les résultats étaient répartis entre les participants selon les modalités stipulées par l' accord liant les différentes sociétés concernées ; que les contrats proposés à ses clients par Locunivers et Locationfor stipulaient des loyers payés mensuellement dont le montant variait en fonction, notamment, du versement initial effectué par le preneur ; que, pour comptabiliser les loyers qu'elles percevaient, les sociétés bailleresses ont calculé un loyer mensuel moyen obtenu en répartissant de manière linéaire sur la durée de la période de location le total des sommes dues par le preneur, puis comparé chaque versement mensuel au montant de ce loyer moyen ; que la fraction de chaque versement excédant ce montant a été portée à un compte "loyers payés d'avance" au passif du bilan ; qu' à l'inverse, l'insuffisance de certains versements par rapport à ce montant s'est traduite par la passation d'une écriture au compte "loyer à percevoir" à l'actif du bilan ; que cette méthode de comptabilisation avait pour effet de répartir de façon égale, pour un montant uniforme sur la durée du bail, les sommes versées par les preneurs ; qu'au titre des exercices clos en 1979 et 1980, puis au titre de l'exercice clos en 1988, l'administration estimant que la société devait rattacher, d'une part, à chaque exercice les loyers stipulés courus au cours de l'exercice et, d'autre part, à l'exercice d'encaissement les versements initiaux, a réintégré aux résultats la différence entre les deux comptes de régularisation susmentionnés, après avoir reporté ce solde d'une année sur l'autre ; qu'il en est résulté des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés pour les exercices clos en 1979, 1980 et 1988 et des dégrèvements pour les deux exercices suivants ceux clos en 1980 ; que les pourvois du ministre, enregistrés sous les n°s 192100 et 192109, sont dirigés contre les arrêts du 8 octobre 1997 par lesquels la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté ses recours en annulation des jugements du 2 août 1995 par lesquels le tribunal administratif de Marseille a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires contestées au titre, respectivement, des exercices clos en 1979 et 1980 et de l'exercice clos en 1988 ; que ces pourvois sont relatifs à la situation d'un même contribuable et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant qu'aux termes des dispositions introduites à l'article 38-2 bis du code général des impôts par l'article 84 de la loi n° 78-1239 du 27 décembre 1978 applicable aux exercices clos à compter du 31 décembre 1978 : " ... Les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix, sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison du bien pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. Toutefois ces produits doivent être pris en compte, pour les prestations continues rémunérées notamment par des intérêts ou des loyers et pour lesprestations discontinues mais à échéances successives échelonnées sur plusieurs exercices, au fur et à mesure de l'exécution" ; que ces dispositions sont applicables pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 dudit code ;
Considérant, d'une part, qu'en jugeant que l'opération par laquelle le bailleur met à la disposition du preneur un bien de consommation moyennant le paiement d'un loyer, assorti de la faculté d'acquérir le bien en fin de bail selon les modalités stipulées au contrat les liant, constitue une prestation continue, au sens de l'article 38-2 bis du code général des impôts, la cour a exactement qualifié les faits soumis à son examen ;

Considérant que la circonstance que la prestation fournie est continue n'implique pas, par elle-même, qu'elle soit effectuée avec une intensité constante pendant toute la durée de son exécution et que sa rémunération doive par suite être rattachée de manière linéaire et prorata temporis aux exercices durant lesquels cette exécution se poursuit ; que lorsque les loyers stipulés dans un contrat de location sont inégaux de période en période, il y a lieu en principe de réputer que cette inégalité des loyers stipulés correspond à une inégalité dans la valeur de la prestation fournie ; que, dès lors, pour l'application de la règle selon laquelle la rémunération de la prestation continue est rattachée aux exercices "au fur et à mesure de l'exécution" de la prestation, il convient de comptabiliser les produits correspondant aux créances de loyers en fonction des échéances contractuelles, sauf s'il résulte de l'instruction fondée notamment sur les justifications apportées par le bailleur, le locataire ou l'administration, que la répartition contractuelle des loyers ne rend pas compte correctement des avantages économiques procurés au preneur par le bien loué au cours des périodes successives de la location et que le rattachement des produits "au fur et à mesure de l'exécution" de la prestation implique que leur comptabilisation s'écarte de l'échéancier contractuel, en retenant par exemple une répartition linéaire des loyers encaissés sur toute la période de location ; que la cour administrative d'appel, en déduisant des circonstances de l'espèce, qu'eu égard à la nature des contrats de location en cause et à celle des biens sur lesquels ils portaient, et alors que le versement initial effectué par le preneur ne rémunérait pas une prestation particulière distincte de la location, la méthode de rattachement linéaire des créances de loyer adoptée par le contribuable était celle qui rendait le mieux compte des avantages économiques procurés au locataire par la mise à sa disposition du bien loué, n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit ni dénaturé les faits et les pièces du dossier sur lesquels elle a exercé son pouvoir souverain d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à demander l'annulation des arrêts attaqués ;
Article 1er : Les recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE enregistrés sous les n°s 192100 et 192109 sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à la société Crédit universel.


Synthèse
Formation : 8 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 192100
Date de la décision : 29/11/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - EVALUATION DE L'ACTIF - CREANCES - CARattachement aux exercices - Prestations continues (article 38-2 bis CGI) - Mise à disposition d'un bien de consommation moyennant le paiement d'un loyer - assorti de la faculté d'acquérir le bien en fin de bail selon les modalités fixées par contrat - Conséquence - Comptabilisation des créances de loyer en fonction des échéances contractuelles - sauf caractère économiquement justifié d'une autre répartition.

19-04-02-01-03-02 Société déployant une activité de location de biens de consommation avec option d'achat proposant à ses clients des contrats stipulant des loyers payés mensuellement et dont le montant varie en fonction, notamment, du versement initial effectué par le preneur. Redressement procédant de la remise en cause de la méthode de comptabilisation des loyers adoptée par la société, ayant pour effet de répartir de façon égale, pour un montant uniforme sur la durée du bail, les sommes versées par les preneurs.

19-04-02-01-03-02 L'opération par laquelle le bailleur met à la disposition du preneur un bien de consommation moyennant le paiement d'un loyer, assorti de la faculté d'acquérir le bien en fin de bail selon les modalités stipulées au contrat les liant, constitue une prestation continue, au sens de l'article 38-2 bis du code général des impôts.

19-04-02-01-03-02 La circonstance que la prestation fournie est continue n'implique pas, par elle-même, qu'elle soit effectuée avec une intensité constante pendant toute la durée de son exécution et que sa rémunération doive par suite être rattachée de manière linéaire et prorata temporis aux exercices durant lesquels cette exécution se poursuit. Lorsque les loyers stipulés dans un contrat de location sont inégaux de période en période, il y a lieu en principe de réputer que cette inégalité des loyers stipulés correspond à une inégalité dans la valeur de la prestation fournie. Dès lors, pour l'application de la règle selon laquelle la rémunération de la prestation continue est rattachée aux exercices "au fur et à mesure de l'exécution" de la prestation, il convient de comptabiliser les produits correspondant aux créances de loyers en fonction des échéances contractuelles, sauf s'il résulte de l'instruction fondée notamment sur les justifications apportées par le bailleur, le locataire ou l'administration, que la répartitition contractuelle des loyers ne rend pas compte correctement des avantages économiques procurés au preneur par le bien loué au cours des périodes successives de la location et que le rattachement des produits "au fur et à mesure l'exécution" de la prestation implique que leur comptabilisation s'écarte de l'échéancier contractuel, en retenant par exemple une répartition linéaire des loyers encaissés sur toute la période de location.


Références :

CGI 38-2 bis, 209
Loi 78-1239 du 27 décembre 1978 art. 84


Publications
Proposition de citation : CE, 29 nov. 2000, n° 192100
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Fouquet
Rapporteur ?: M. Vallée
Rapporteur public ?: Mme Mignon

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:192100.20001129
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