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01/12/2000 | FRANCE | N°215746

France | France, Conseil d'État, 5 ss, 01 décembre 2000, 215746


Vu la requête, enregistrée le 28 décembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement, en date du 2 novembre 1999, par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé pour excès de pouvoir son arrêté du 17 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... Jiang, épouse A... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Jiang, épouse A..., devant le tribunal administratif de Paris, et tendant

à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 17 novembre 1998 ;
Vu...

Vu la requête, enregistrée le 28 décembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement, en date du 2 novembre 1999, par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé pour excès de pouvoir son arrêté du 17 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... Jiang, épouse A... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Jiang, épouse A..., devant le tribunal administratif de Paris, et tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 17 novembre 1998 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 complétée par la loi n° 95-125 du 8 février 1995 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fabre-Aubrespy, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Jiang, épouse A..., de nationalité chinoise, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 25 juin 1998, de la décision du 22 juin 1998 par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle était ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si, en vertu des dispositions de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée, ne peut faire l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière l'étranger marié depuis au moins un an avec un conjoint de nationalité française, il est constant que Mme Y..., qui n'a épousé M. A..., de nationalité française, que le 19 septembre 1998 ne pouvait justifier, à la date de l'arrêté du 17 novembre 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière, d'une durée de mariage lui permettant de bénéficier des dispositions mentionnées ci-dessus ;
Considérant que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, Mme Y... fait valoir qu'elle est mariée à un Français, il ressort des pièces du dossier que ses parents et ses enfants résident en Chine ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la brièveté de son mariage, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cet arrêté a été pris ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal de Paris s'est fondé sur le double motif tiré de l'atteinte à la vie familiale et de la méconnaissance des dispositions de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 pour annuler l'arrêté susvisé du 17 novembre 1998 ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme Y... devant le tribunal administratif ;
Considérant que l'arrêté attaqué énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;

Considérant que, dans les termes où il est rédigé, l'arrêté attaqué doit être regardécomme comportant une décision distincte, par laquelle le PREFET DE POLICE a décidé de reconduire Mme Y... vers la Chine ; que, si Mme Y..., dont la demande d'asile politique a été rejetée par l'office français de protection des réfugiés et apatrides le 15 novembre 1991, décision confirmée par la commission des recours des réfugiés le 2 avril 1992, invoque les risques que comporterait pour elle le retour dans son pays, elle n'apporte pas, à l'appui de ses dires, d'éléments de nature à justifier les risques qu'elle encourrait personnellement ; que, dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision fixant le pays vers lequel Mme Y... doit être reconduite aurait méconnu les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté attaqué ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à Z... Jiang la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, en date du 2 novembre 1999, est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme Jiang, épouse A..., devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de Mme Jiang, épouse A..., tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme X... Jiang, épouse A... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5 ss
Numéro d'arrêt : 215746
Date de la décision : 01/12/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 17 novembre 1998
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25


Publications
Proposition de citation : CE, 01 déc. 2000, n° 215746
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Fabre-Aubrespy
Rapporteur public ?: M. Olson

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:215746.20001201
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