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08/12/2000 | FRANCE | N°212718

France | France, Conseil d'État, 6 / 4 ssr, 08 décembre 2000, 212718


Vu le recours enregistré le 21 septembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 7 avril 1999 par lequel la Cour des comptes a rejeté la requête de Mme X..., comptable de la commune de Villers-lès-Nancy, tendant à l'annulation du jugement en date du 22 avril 1998 par lequel la chambre régionale des comptes de Lorraine l'a constituée débitrice envers ladite commune de la somme de 19 309,72 F a

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Vu le recours enregistré le 21 septembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt du 7 avril 1999 par lequel la Cour des comptes a rejeté la requête de Mme X..., comptable de la commune de Villers-lès-Nancy, tendant à l'annulation du jugement en date du 22 avril 1998 par lequel la chambre régionale des comptes de Lorraine l'a constituée débitrice envers ladite commune de la somme de 19 309,72 F au titre d'indemnités horaires pour travaux supplémentaires, versées à tort à des agents logés à titre gratuit par la collectivité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le décret n° 50-1248 du 6 octobre 1950 ;
Vu le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié ;
Vu le décret n° 83-16 du 13 janvier 1983, modifié par le décret n° 88-74 du 21 janvier 1988 ;
Vu le décret n° 85-199 du 11 février 1985 modifié ;
Vu le décret n° 95-945 du 23 août 1995 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 97-1177 du 24 décembre 1997 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Legras, Auditeur,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 6 septembre 1991 : "Le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales ( ...) ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes" ; que l'article 3 du même décret prévoit que l'indemnité horaire pour travaux supplémentaires peut être attribuée aux fonctionnaires territoriaux d'administration générale ; que l'article 4 du décret susvisé du 6 octobre 1950 dispose qu'"aucune indemnité horaire pour travaux supplémentaires ne peut être attribuée aux agents logés gratuitement dans les bâtiments appartenant à l'Etat ou détenus par lui à un titre quelconque" ;
Considérant que, par un jugement définitif du 22 avril 1998, la chambre régionale des comptes de Lorraine a constitué Mme X..., comptable de la commune de Villers-lès-Nancy, débitrice envers cette commune de la somme de 19 309,72 F, augmentée des intérêts légaux lors du dernier paiement, au motif qu'elle avait procédé au paiement, au cours de l'exercice 1995, d'indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS) à trois agents de la commune qui, étant logés gratuitement, ne pouvaient en bénéficier ; que, par l'arrêt attaqué, la Cour des comptes a confirmé ce jugement en estimant qu'il appartenait au comptable d'écarter le versement de l'IHTS à ces trois agents en tant qu'il était contraire aux dispositions du décret précité du 6 octobre 1950 ;
Sur le premier moyen :
Considérant qu'aux termes de l'article 12 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique : "Les comptables sont tenus d'exercer ( ...) b) -En matière de dépenses, le contrôle de la qualité de l'ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l'exacte imputation des dépenses au chapitre qu'elles concernent selon leur nature ou leur objet ; de la validité de la créance dans les conditions prévues à l'article 13 ci-après, du caractère libératoire du règlement" ; que l'article 13 du même décret dispose que : "En ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur la justification du service fait et l'exactitude des calculs de liquidation ; l'intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications ( ...)" ; qu'il résulte de ces dispositions que si, pour apprécier la validité des créances, les comptables doivent exercer leur contrôle sur l'exactitude des calculs de liquidation et la production des justifications et s'il leur appartient d'interpréter conformément aux lois et règlements en vigueur les actes administratifs qui en sont l'origine, ils n'ont pas le pouvoir de se faire juges de la légalité de ces actes ;

Considérant, en premier lieu, que, par sa délibération du 16 décembre 1991, le conseil municipal de Villers-lès-Nancy a institué un régime indemnitaire des agents de cette commune appartenant tant à la filière administrative qu'à la filière technique ; qu'un arrêté municipal du 13 avril 1992 a, dans son article 3, prévu le versement d'indemnités "prorata temporis" pour les heures supplémentaires accomplies par les agents ; qu'aucune de ces dispositions ne prévoyait que les agents logés gratuitement par la commune devaient percevoir les indemnités ainsi instituées et ne pouvait être ainsi regardée comme ayant expressément ou implicitement dérogé aux dispositions de l'article 4 du décret du 6 octobre 1950 qui interdit le versement des indemnités horaires pour travaux supplémentaires à ces agents ; que, dès lors, le moyen titré de ce que Mme X... n'aurait pu refuser le versement de l'indemnité en cause aux agents logés par la commune qu'en se faisant juge de la légalité de la délibération du 16 décembre 1991 et de l'arrêté du 13 avril 1992 ne peut être accueilli ;
Considérant, en second lieu, que si l'article 1er du même arrêté du 13 avril 1992 prévoyait l'attribution à tous les agents de la commune qui y sont énumérés, sans distinguer ceux qui sont logés et ceux qui ne le sont pas, d'un complément de rémunération forfaitaire sous forme de prime de rendement ou d'indemnité horaire pour travaux supplémentaires, il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le débet confirmé par la Cour des comptes ne porte pas sur les sommes versées à ce titre aux trois agents logés gratuitement par la commune, mais seulement sur celles qui leur ont été versées au titre de l'article 3, dont les termes ont été rappelés ci-dessus, de l'arrêté du 13 avril 1992 ;
Considérant qu'il suit de là qu'en fondant son arrêt sur le fait que Mme X... n'aurait pas dû procéder au versement des indemnités pour heures supplémentaires aux agents qui étaient logés gratuitement par la commune, la Cour des comptes n'a pas commis d'erreur de droit ;
Sur le second moyen :
Considérant que si, depuis l'entrée en vigueur du décret du 21 janvier 1988, l'obligation faite au comptable d'exiger de l'ordonnateur un certificat permettant de vérifier les conditions particulières auxquelles est subordonné le versement de primes et indemnités, a été supprimée, les comptables restent tenus de vérifier, dans la limite des éléments dont ils disposent, les conditions particulières auxquelles est subordonné le versement des indemnités régulièrement constituées ; que la Cour des comptes a pu, sans erreur de droit et par une appréciation qui n'est pas entachée de dénaturation, estimer que le comptable de la commune de Villers-les-Nancy disposait des éléments justifiant qu'il refusât le paiement d'indemnités pour heures supplémentaires aux trois agents de la commune au motif qu'ils étaient logés gratuitement par celle-ci ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt de la Cour des comptes en date du 7 avril 1999 ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, au procureur général près la Cour des comptes, à la commune de Villers-lès-Nancy et à Mme X....


Synthèse
Formation : 6 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 212718
Date de la décision : 08/12/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

- RJ1 COMPTABILITE PUBLIQUE - REGIME JURIDIQUE DES ORDONNATEURS ET DES COMPTABLES - RESPONSABILITE - CAResponsabilité des comptables - Dépenses - Contrôle de la validité de la créance - Pouvoirs et devoirs du comptable - Obligation d'interpréter conformément aux lois et règlements en vigueur les actes administratifs qui constituent le fondement de la créance - Existence - Appréciation de la légalité de ces décisions - Absence.

18-01-03, 18-02 Aux termes de l'article 12 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique : "Les comptables sont tenus d'exercer (...) b) - En matière de dépenses, le contrôle de la qualité de l'ordonnateur ou de son délégué, de la disponibilité des crédits, de l'exacte imputation des dépenses au chapitre qu'elles concernent selon leur nature ou leur objet, de la validité de la créance dans les conditions prévues à l'article 13 ci-après, du caractère libératoire du règlement". L'article 13 du même décret dispose que : "En ce qui concerne la validité de la créance, le contrôle porte sur : la justification du service fait et sur l'exactitude des calculs de liquidation ; l'intervention préalable des contrôles réglementaires et la production des justifications (...)". Il résulte de ces dispositions que si, pour apprécier la validité de créances, les comptables doivent exercer leur contrôle sur l'exactitude des calculs de liquidation et la production des justifications et s'il leur appartient d'interpréter conformément aux lois et règlements en vigueur les actes administratifs qui en sont l'origine, ils n'ont pas le pouvoir de se faire juges de la légalité de ces actes (1).

- RJ1 COMPTABILITE PUBLIQUE - BUDGETS - CARègles communes - Dépenses - Contrôle de la validité de la créance - Pouvoirs et devoirs du comptable - Obligation d'interpréter conformément aux lois et règlements en vigueur les actes administratifs qui constituent le fondement de la créance - Existence - Appréciation de la légalité de ces décisions - Absence.


Références :

Arrêté du 13 avril 1992 art. 3, art. 1
Décret 50-1248 du 06 octobre 1950
Décret 62-1587 du 29 décembre 1962 art. 12, art. 13
Décret 88-74 du 21 janvier 1988
Décret 91-875 du 06 septembre 1991 art. 1, art. 3, art. 4

1.

Rappr. Section, 1971-02-05, Ministre de l'économie et des finances c/ Balme, p. 105


Publications
Proposition de citation : CE, 08 déc. 2000, n° 212718
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Fouquet
Rapporteur ?: Mme Legras
Rapporteur public ?: M. Lamy

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2000:212718.20001208
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