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15/01/2001 | FRANCE | N°205366

France | France, Conseil d'État, 6 ss, 15 janvier 2001, 205366


Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 mars et 7 juin 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat présentés par le PREFET DU RHONE ; le PREFET DU RHONE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 16 février 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a , à la demande de M. Imad X..., annulé son arrêté du 27 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressé ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Lyon ;r> Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l 'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre ...

Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 mars et 7 juin 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat présentés par le PREFET DU RHONE ; le PREFET DU RHONE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 16 février 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a , à la demande de M. Imad X..., annulé son arrêté du 27 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressé ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Lyon ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l 'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Chaubon, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants ... 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité tunisienne, s'est maintenu en France pendant plus d'un mois après la notification, le 4 mars 1998, de la décision du 3 mars 1998 du PREFET DU RHONE refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si M. X... fait valoir qu'il n'a plus d'attaches familiales dans son pays d'origine, qu'il travaille depuis son entrée en France en 1988 et qu'il est bien intégré, il ressort des pièces du dossier qu'âgé de 33 ans, il est célibataire et n'a pas de charges de famille et que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment des conditions de son séjour en France, la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que c'est, par suite, à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur ce motif pour annuler l'arrêté en date du 27 novembre 1998 du PREFET DU RHONE ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen présenté par M. X... dans sa demande devant le tribunal administratif de Lyon ;
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement pendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail en date du 17 mars 1988 : "Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord" ; que les articles 1er à 10 de cet accord fixent les conditions dans lesquelles il est délivré aux ressortissants tunisiens une carte de résident de plein droit ; que ces stipulations ne font toutefois pas obstacle à l'application aux ressortissants tunisiens des dispositions de l'article 12 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, qui n'ont pas le même objet ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998 : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit ( ...) 3°) à l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cettepériode, il a séjourné en qualité d'étudiant" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté, qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. X... justifait résider habituellement en France depuis plus de dix ans ; que, dès lors, il remplissait à cette date les conditions prévues par les dispositions ci-dessus rappelées et ne pouvait donc faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ; que, par suite, le PREFET DU RHONE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 27 novembre 1998 décidant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : La requête du PREFET DU RHONE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU RHONE, à M. Imad X... et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 27 novembre 1998
Loi 98-349 du 11 mai 1998
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation: CE, 15 jan. 2001, n° 205366
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Chaubon
Rapporteur public ?: M. Lamy

Origine de la décision
Formation : 6 ss
Date de la décision : 15/01/2001
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 205366
Numéro NOR : CETATEXT000008049603 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2001-01-15;205366 ?
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