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23/02/2001 | FRANCE | N°214478

France | France, Conseil d'État, 5 ss, 23 février 2001, 214478


Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 mars 1999 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a annulé pour excès de pouvoir la décision distincte contenue dans son arrêté du 24 septembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Abel Y... Mohammed X... Rahman et fixant le Bangladesh comme pays à destination duquel sera effectuée la reconduite ;
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) de rejeter les conclusions de M. X... Rahman dirigées contre cette déc...

Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 mars 1999 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a annulé pour excès de pouvoir la décision distincte contenue dans son arrêté du 24 septembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Abel Y... Mohammed X... Rahman et fixant le Bangladesh comme pays à destination duquel sera effectuée la reconduite ;
2°) de rejeter les conclusions de M. X... Rahman dirigées contre cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droit de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Aladjidi, Auditeur,
- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;

Sur la requête du PREFET DE POLICE:
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... Rahman, ressortissant du Bangladesh, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 24 avril 1998, de la décision du PREFET DE POLICE lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que, dans les termes où il est rédigé, l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 24 septembre 1998 doit être regardé comme comportant une décision distincte fixant le Bangladesh comme pays à destination duquel M. X... Rahman doit être reconduit ;
Considérant que si M. X... Rahman fait valoir qu'il a été membre, avant son arrivée en France d'un parti d'opposition au Bangladesh, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait fait l'objet de menaces ou de persécutions et qu'il serait personnellement exposé à des risques au cas où il retournerait dans son pays d'origine ; qu'ainsi le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué s'est fondé sur le motif que M. X... Rahman courrait des risques en cas de retour au Bangladesh pour annuler la décision fixant ce pays comme celui à destination duquel l'intéressé doit être reconduit ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... Rahman devant le tribunal administratif de Melun et devant le Conseil d'Etat contre la décision du PREFET DE POLICE ;
Considérant que, dans les circonstances susmentionnées, la décision du PREFET DE POLICE fixant le Bangladesh comme pays de destination de la reconduite à la frontière, n'est pas contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, a annulé la décision distincte en date du 24 septembre 1998 fixant le Bangladesh comme pays à destination duquel M. X... Rahman doit être reconduit ;
Sur l'appel incident de M. X... Rahman :

Considérant que, par la voie de l'appel incident, M. X... Rahman demande l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 septembre 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
Considérant que l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 24 septembre 1998 comporte les données de droit et de fait sur le fondement desquelles il a été pris ; que, par suite, il est suffisamment motivé ;
Considérant que si M. X... Rahman, qui est célibataire et sans enfant, fait valoir qu'il n'a plus d'attaches familiales dans son pays d'origine, ces circonstances ne sont pas de nature à établir que l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière aurait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cette décision méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;
Considérant que l'arrêté attaqué n'est pas, dans les circonstances susmentionnées, entaché d'une erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences de la mesure de reconduite sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de l'appel incident de M. X... Rahman ne peuvent qu'être rejetées ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 30 mars 1999 est annulé en tant qu'il a annulé la décision du PREFET DE POLICE contenue dans l'arrêté en date du 24 septembre 1998 et fixant le pays à destination duquel M. X... Rahman doit être reconduit.
Article 2 : La demande de M. X... Rahman dirigée contre la décision distincte contenue dans l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 24 septembre 1998 et fixant le pays à destination duquel il doit être reconduit, ensemble les conclusions formées devant le Conseil d'Etat par la voie de l'appel incident, sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Abel Y... Mohammed X... Rahman et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5 ss
Numéro d'arrêt : 214478
Date de la décision : 23/02/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 24 septembre 1998
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 23 fév. 2001, n° 214478
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Aladjidi
Rapporteur public ?: M. Olson

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:214478.20010223
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