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19/03/2001 | FRANCE | N°198469

France | France, Conseil d'État, 19 mars 2001, 198469


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 août et 3 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES (SCARA) dont le siège est ..., représenté par son président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ; le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêté du ministre des transports en date du 18 juin 1998 portant restriction d'usage des avions relevant du chapitre 2 sur l'Aérodrome de Paris-Charles de Gaulle ;
Vu les a

utres pièces du dossier ;
Vu le code de l'aviation civile ;
Vu la d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 août et 3 décembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES (SCARA) dont le siège est ..., représenté par son président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ; le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêté du ministre des transports en date du 18 juin 1998 portant restriction d'usage des avions relevant du chapitre 2 sur l'Aérodrome de Paris-Charles de Gaulle ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'aviation civile ;
Vu la directive n° 89/629/CEE du 4 décembre 1989 ;
Vu la directive n° 92/14/CEE du 2 mars 1992 ;
Vu le règlement n° 2408/92 du 23 juillet 1992 ;
Vu la directive n° 98/20/CE du 30 mars 1998 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Sauron, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du ministre de l'équipement, des transports et du logement,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES (SCARA) demande l'annulation de l'arrêté en date du 18 juin 1998 du ministre de l'équipement, des transports et du logement fixant de manière dégressive jusqu'en 2002 la valeur maximale autorisée de l'indicateur du bruit produit par les atterrissages et les décollages sur l'aérodrome de Paris-Charles de Gaulle des aéronefs équipés de turboréacteurs dont la certification acoustique répond aux normes du chapitre 2 de l'annexe 16 de la convention relative à l'aviation civile internationale du 7 décembre 1944 ;
Sur la légalité externe :
Considérant qu'il résulte de la combinaison des articles R. 221-3 et R. 226-1 du code de l'aviation civile que le ministre chargé de l'aviation civile est seul compétent pour prendre des mesures restreignant, afin de limiter les nuisances sonores, l'utilisation des aérodromes par certains types d'appareils ; qu'ainsi le syndicat requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué devait être signé conjointement par le ministre chargé de l'environnement ;
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 251-2 du code de l'aviation civile l'établissement public Aéroports de Paris "est chargé d'aménager, d'exploiter et de développer l'ensemble des installations de transport civil aérien ayant leur centre dans la région parisienne et qui ont pour objet de faciliter l'arrivée et le départ des aéronefs, de guider la navigation, d'assurer l'embarquement, le débarquement et l'acheminement à terre des voyageurs, des marchandises et du courrier transportés par air, ainsi que toutes installations annexes" ; que, si, selon l'article R. 252-12 du même code, le conseil d'administration d'Aéroports de Paris "donne au ministre chargé de l'aviation civile son avis sur toutes les questions relevant des divers services publics et intéressant directement l'exploitation de l'aéroport", l'arrêté attaqué qui vise à limiter les nuisances sonores provoquées par l'utilisation par les compagnies de transport aérien d'un type déterminé d'appareils, ne porte pas sur une question relevant d'une des missions de service public assignées à l'établissement Aéroports de Paris par les dispositions de l'article L. 251-2 du code de l'aviation civile ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que, faute de consultation préalable du conseil d'administration d'Aéroports de Paris, ledit arrêté aurait été adopté à la suite d'une procédure irrégulière ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 8 du règlement en date du 23 juillet 1992 du Conseil des Communautés européennes concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intracommunautaires : "L'exercice des droits de trafic est soumis aux règles d'exploitation communautaires, nationales, régionales ou locales publiées concernant la sécurité, la protection de l'environnement et la répartition des créneaux horaires" et qu'aux termes de l'article 9 du même règlement : "Lorsqu'il existe des problèmes graves de congestion et /ou en matière d'environnement, l'Etat membre responsable peut ... limiter ou refuser l'exercice des droits de trafic, notamment lorsque d'autres modes de transport peuvent fournir un service satisfaisant ... 3- Lorsqu'un Etat membre estime que les mesures visées au paragraphe 1 sont nécessaires, il en informe, au moins trois mois avant leur application, les autres Etats membres et la Commission en fournissant une justification adéquate pour ces mesures. Celles-ci peuvent être appliquées, à moins que, dans un délai d'un mois à partir de la réception de l'information, un Etat membre concerné ne les conteste ou que la Commission ( ...) ne décide de leur consacrer un examen plus approfondi ..." ;
Considérant que les dispositions de l'arrêté attaqué, qui ne concernent qu'une catégorie déterminée d'aéronefs, ne comportent par elles-mêmes aucune restriction ou limitation dans l'usage des droits de trafic ouverts aux compagnies aériennes désireuses de desservir l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle ; que, par suite, il est clair que, contrairement à ce que soutient le syndicat requérant, elles n'avaient pas à être soumises aux formalités d'information préalable de la Commission prévues par le 3 de l'article 9 du règlement susmentionné du 23 juillet 1992 ;
Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'avant-dernier alinéa du I de l'article 1er de l'arrêté attaqué : "Lorsqu'un exploitant est amené à transférer tout ou partie de son activité de l'aérodrome de Paris-Orly à l'aérodrome de Paris-Charles de Gaulle en application d'une disposition réglementaire, les cumuls d'énergies sonores ... sont augmentés de l'énergie sonore correspondants aux vols réalisés en 1997 par cet exploitant sur l'aérodrome de Paris-Orly au titre de l'activité transférée à l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle" ; qu'il résulte de cette disposition qu'il est tenu compte dans la base de calcul des valeurs maximales autorisées de l'indicateur de bruit des aéronefs du chapitre 2 des transferts éventuels d'activité d'un transporteur aérien entre l'aéroport d'Orly et celui de Roissy-Charles de Gaulle ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué porterait atteinte au principe de libre prestation des services aériens à l'intérieur de la Communauté européenne dans la mesure où il impliquerait la suppression de vols antérieurement effectués sur Paris-Orly et transférés sur Roissy-Charles de Gaulle ne peut être accueilli ;

Considérant, en deuxième lieu, que le syndicat requérant soutient que l'arrêté attaqué méconnaîtrait les objectifs de la directive du Conseil n° 92/14 du 2 mars 1992 relative à la limitation de l'exploitation des avions relevant du chapitre 2 de l'annexe 16 de la convention relative à l'aviation civile internationale en ne respectant pas la période transitoire laissée par cette directive aux compagnies jusqu'au 1er avril 2002 pour assurer le renouvellement de leurs flottes et en interdisant auxdites compagnies l'exploitation de lignes nouvelles durant cette période ; qu'il ressort au contraire des pièces du dossier que l'arrêté du 18 juin 1998, qui a pour effet d'assurer un retrait progressif en quatre ans de l'utilisation à Roissy-Charles de Gaulle d'aéronefs "relevant du chapitre 2", est conforme aux objectifs fixés par la directive susmentionnée d'aménagement d'une période transitoire et de renouvellement au terme de cette période du parc d'appareils des compagnies ;
Considérant, en troisième lieu, que les dispositions de l'arrêté attaqué fixant des valeurs maximales d'un indicateur mesurant le bruit produit par les mouvements sur l'aérodrome Roissy-Charles de Gaulle par les mouvements d'une catégorie déterminée d'aéronefs ne constituent pas une mesure d'application des dispositions codifiées aux articles R. 226-1 et suivants du code de l'aviation civile prévoyant que le ministre chargé de l'aviation civile peut infliger des amendes en cas de non-respect des prescriptions qu'il édicte pour limiter les nuisances sonores provoquées par le trafic aérien ; que, dès lors, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de ces dernières dispositions, est en tout état de cause, inopérant au soutien des conclusions du syndicat requérant dirigées contre l'arrêté attaqué ;
Considérant, en quatrième lieu, que le syndicat requérant ne peut utilement se prévaloir de ce que l'arrêté attaqué méconnaîtrait les dispositions du paragraphe 2 de l'article 9 du règlement du 23 juillet 1992 selon lesquelles les mesures prises par un Etat membre en application du paragraphe 1 du même article "ont une durée de validité limitée, ne dépassant pas trois ans ...",dès lors qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus les dispositions de l'arrêté attaqué n'entrent pas dans le champ des prévisions de l'article 9 de ce règlement ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'en prévoyant que l'indicateur de bruit mesurant le cumul annuel des énergies sonores dégagées par les atterrissages et décollages sur l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, des aéronefs "relevant du chapitre 2" ne devait pas dépasser (sur une base 100 pour l'année 1997) une "valeur de 85 pour l'année 1998 ou 35 pour le second semestre de l'année 1998", l'arrêté attaqué pris le 18 juin 1998 et publié au Journal officiel de la République française le 27 juin suivant, n'a nullement édicté une mesure entachée d'une rétroactivité illégale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté attaqué ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative susvisé à payer à l'Etat une somme de 15 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES est rejetée.
Article 2 : Le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES versera à l'Etat (ministre de l'équipement, des transports et du logement) une somme de 15 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 198469
Date de la décision : 19/03/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

65-03-02 TRANSPORTS - TRANSPORTS AERIENS - EXPLOITATION DES LIGNES AERIENNES


Références :

Arrêté du 23 juillet 1992
Arrêté du 18 juin 1998 art. 1
Arrêté 92 du 02 mars 1992
Code de justice administrative L761-1
Code de l'aviation civile R221-3, R226-1, L251-2, R252-12
Directive 92-14 du 02 mars 1992 Conseil


Publications
Proposition de citation : CE, 19 mar. 2001, n° 198469
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sauron
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:198469.20010319
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