Vu la requête, enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 8 novembre 1999, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 septembre 1999 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 2 novembre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ashraf X... ;
2°) de rejeter la demande présentée pour M. Ashraf X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Méda, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Ashraf X..., de nationalité bangladaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 3 juillet 1998, de l'arrêté du 1er juillet 1998 par lequel le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant toutefois qu'à la date à laquelle est intervenu l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. Ashraf X... vivait depuis plusieurs années en concubinage avec une ressortissante française ; qu'il était le père d'un enfant français né de cette union et qu'il avait reconnu un second enfant à naître et destiné à avoir lui aussi la nationalité française ; que, dès lors, et eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté attaqué a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 2 novembre 1998 ;
Sur les conclusions de M. Ashraf X... tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'appliquer les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. Ashraf X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.
Article 2 : L'Etat est condamné à payer à M. Ashraf X... la somme de 8 000 F qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. X... Ashraf et au ministre de l'intérieur.