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28/03/2001 | FRANCE | N°219677

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 28 mars 2001, 219677


Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET D'EURE-ET-LOIR ; le PREFET D'EURE-ET-LOIR demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2000 par lequel le vice-président délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 23 février 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ahmed Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif d'Orléans ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention eu

ropéenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales signée ...

Vu la requête, enregistrée le 3 avril 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET D'EURE-ET-LOIR ; le PREFET D'EURE-ET-LOIR demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2000 par lequel le vice-président délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 23 février 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ahmed Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif d'Orléans ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales signée le 4 novembre 1950 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Pignerol, Auditeur,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Y...,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y..., à qui la qualité d'apatride a été refusée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 10 mai 1999, s'est maintenu sur le territoire national plus d'un mois à compter de la notification le 30 décembre 2000 de la décision du 17 décembre 1999 par laquelle le PREFET D'EURE-ET-LOIR lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ( ...) 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. Y... dont la demande de la qualité d'apatride a été rejetée ainsi qu'il a été dit ci-dessus fait valoir qu'il vit en concubinage avec une personne de nationalité française depuis le mois de novembre 1998, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de la date de son arrivée en France et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, cet arrêté aurait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que c'est, dès lors, à tort que le vice-président délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Y... devant le tribunal administratif d'Orléans ;
Considérant que M. X... Richard, secrétaire général de la préfecture d'Eure-et-Loir, bénéficiait d'une délégation de signature du PREFET D'EURE-ET-LOIR en date du 7 avril 1999 publiée au recueil des actes administratifs du département d'avril 1999 qui l'autorisait à signer l'arrêté attaqué ;

Considérant que le statut d'apatride a été refusé à M. Y... par une décision de l'office français pour la protection des réfugiés et apatrides ; que la circonstance que le requérant a introduit un recours contre cette décision devant le tribunal administratif ne faisait pas obstacle à ce que le préfet ordonnât sa reconduite à la frontière ;
Considérant, enfin, que la circonstance que M. Y... à la date d'intervention de l'arrêté du 23 février 2000 ait fait l'objet d'une mesure de contrôle judiciaire lui interdisant de quitter le territoire français ne faisait pas obstacle à ce que le préfet ordonnât la reconduite à la frontière de l'intéressé ; que ladite mesure faisait seulement obligation à l'autorité de police de s'abstenir de mettre à exécution cette mesure d'éloignement jusqu'à la levée par le juge judiciaire de l'interdiction prononcée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET D'EURE-ET-LOIR est fondé à demander l'annulation du jugement du 10 mars 2000 par lequel le vice-président délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 23 février 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y... ;
Article 1er : Le jugement du 10 mars 2000 du vice-président délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans est annulé.
Article 2 : La demande présentée à ce tribunal par M. Y... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET D'EURE-ET-LOIR, à M. Ahmed Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 219677
Date de la décision : 28/03/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 17 décembre 1999
Arrêté du 23 février 2000
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 28 mar. 2001, n° 219677
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pignerol
Rapporteur public ?: M. Schwartz

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:219677.20010328
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