Vu le recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 10 août 1998, présenté par le MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE ; le MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 28 mai 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement en date du 14 mars 1996 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 25 mars 1993 déclarant irrecevable la demande de naturalisation présentée par Mme Laïla X... ;
2°) de rejeter la requête de Mme X... devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Jodeau-Grymberg, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Monod, Colin, avocat de Mme X...,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 61 du code de la nationalité française alors applicable : "Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation" ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France, de manière stable, le centre de ses intérêts ; que, pour apprécier si cette dernière condition se trouve remplie, l'administration peut notamment prendre en compte sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la durée de la présence du demandeur en France, sa situation familiale et le caractère suffisant et durable des ressources lui permettant de demeurer en France ;
Considérant que, pour confirmer le jugement du 14 mars 1996 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 25 mars 1993 du MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE déclarant irrecevable la demande de naturalisation présentée par Mme X..., la cour administrative d'appel de Nantes a estimé que Mme X... qui était entrée en France à l'âge de six ans et exerçait une activité professionnelle lui permettant de subvenir à ses besoins et à ceux de son enfant mineur qui vit avec elle, devait être regardée comme remplissant la condition de résidence fixée à l'article 61 du code de la nationalité française, alors même que son époux, pour lequel elle avait fait une demande de regroupement familial, résidait encore au Maroc, la demande ayant fait l'objet d'une décision d'ajournement ; qu'en statuant ainsi, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine qui n'est entachée d'aucune dénaturation des pièces du dossier et ne repose sur aucune erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 28 mai 1998 de la cour administrative d'appel de Nantes ;
Sur les conclusions de Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 reprises à l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat à payer à Mme X... la somme de 12 060 F qu'elle demande au titre des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à Mme X... la somme de 12 060 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'emploi et de la solidarité et à Mme Laïla X....