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30/03/2001 | FRANCE | N°213053

France | France, Conseil d'État, 2 ss, 30 mars 2001, 213053


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 1er octobre 1999, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 mai 1999, par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 5 octobre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Nabil X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauv

egarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franc...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 1er octobre 1999, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 mai 1999, par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 5 octobre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Nabil X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié par l'avenant du 19 décembre 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Jodeau-Grymberg, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Nabil X..., de nationalité tunisienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 1er juillet 1998, de l'arrêté du 25 juin 1998 par lequel le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X... a excipé de l'illégalité de la décision du 25 juin 1998 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il s'est pourvu, dans le délai du recours contentieux, contre cette dernière décision qui n'était ainsi pas devenue définitive à la date à laquelle il a saisi le tribunal administratif ; que, dès lors, l'exception d'illégalité est recevable ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998 : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ( ...) 3° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tous moyens résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date à laquelle une carte de séjour lui a été refusée, M. X... résidait en France depuis plus de dix ans ; qu'ainsi, et en tout état de cause, le PREFET DE POLICE a pu légalement refuser à M. X... le titre de séjour qu'il demandait sans consulter, au préalable, la commission du titre de séjour prévue par l'article 12 quater de la même ordonnance ;
Considérant qu'il suit de là que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X..., le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le motif que le refus de séjour opposé à M. X... avait été pris sans consultation de la commission du titre de séjour ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;

Considérant que M. X... ne remplit pas, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la condition de durée de résidence prévue par l'article 12 bis-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998 ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à invoquer cette disposition à l'encontre du refus de séjour qui lui a été opposé et des rejets des recours qu'il a formés contre ce refus ;
Considérant que l'arrêté attaqué, qui vise à bon droit les dispositions de l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945, énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;
Considérant que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X... fait valoir qu'il a résidé en France depuis plus de dix ans, et que l'arrêté attaqué méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, célibataire et sans enfant, a conservé toutes ses attaches familiales dans son pays d'origine ; que, dans ces circonstances et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, cet arrêté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 22 mai 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 5 octobre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : Le jugement du 22 mai 1999 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par M. X... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Nabil X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2 ss
Numéro d'arrêt : 213053
Date de la décision : 30/03/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 25 juin 1998
Arrêté du 05 octobre 1998
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Loi 98-349 du 11 mai 1998
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 30 mar. 2001, n° 213053
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Jodeau-Grymberg
Rapporteur public ?: Mme de Silva

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:213053.20010330
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