Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 octobre 1999 et 21 février 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Joël X... élisant domicile au lycée technique privé La Baronnerie, BP 139 à Saint-Sylvain d'Anjou (49481 cedex) ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt n° 95NT01588 du 22 juillet 1999 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a, sur recours du ministre de l'éducation nationale, annulé le jugement du 4 octobre 1995 du tribunal administratif de Nantes annulant la décision du 24 septembre 1992 du recteur de l'académie de Nantes lui refusant le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) instituée par le décret n° 91-1229 du 6 décembre 1991 en ce qui concerne les services de l'éducation nationale ;
2°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 25 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 modifiée ;
Vu la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991, notamment son article 27 ;
Vu le décret n° 78-252 du 8 mars 1978 ;
Vu le décret n° 91-1229 du 6 décembre 1991 ;
Vu l'arrêté interministériel du 6 décembre 1991 fixant les conditions d'attributionde la nouvelle bonification indiciaire (NBI) dans les services du ministère de l'éducation nationale ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Salesse, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X..., chef de travaux contractuel dans un établissement d'enseignement technique privé sous contrat d'association, s'est vu refuser par le recteur de l'académie de Nantes le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire instituée par la loi du 18 janvier 1991 ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes du I de l'article 27 de cette loi : "La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret" ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 6 décembre 1991 : "Une nouvelle bonification indiciaire ( ...) peut être versée mensuellement, dans la limite des crédits disponibles, aux fonctionnaires titulaires du ministère de l'éducation nationale exerçant une des fonctions figurant en annexe au présent décret" ; qu'au VIII de l'annexe à ce décret sont mentionnées, parmi les fonctions exercées par des personnels enseignants, celles de "chefs de travaux ou personnels faisant fonction de chef de travaux des lycées professionnels et des lycées techniques" ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 15 de la loi du 31 décembre 1959 dans sa rédaction alors applicable : "Les règles générales qui déterminent les conditions de service et de cessation d'activité des maîtres titulaires de l'enseignement public ainsi que les mesures sociales et les possibilités de formation dont ils bénéficient, sont applicables également et simultanément aux maîtres justifiant du même niveau de formation habilités ( ...) par contrat à exercer leurs fonctions dans des établissements privés liés à l'Etat par contrat" ; que l'article 2 du décret du 8 mars 1978 relatif aux conditions de service et aux mesures sociales applicables notamment aux maîtres contractuels dispose que : "Les maîtres contractuels ( ...) ont droit, après service fait, à une rémunération comportant le traitement brut déterminé en application des dispositions du décret susvisé du 10 mars 1964, les suppléments pour charges de famille et l'indemnité de résidence ainsi que tous autres avantages ou indemnités attribués par l'Etat aux personnels de l'enseignement public" ; qu'il résulte de ces dispositions que les avantages accordés aux personnels de l'enseignement public bénéficient également et simultanément aux maîtres de l'enseignement privé habilités par contrat à exercer les mêmes fonctions ; que cette obligation ne peut être écartée en raison de contraintes budgétaires ou des priorités de la politique de gestion des personnels ;
Considérant que, pour juger que le recteur de l'académie de Nantes était tenu de refuser à M. X... le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire, la cour d'appel de Nantes s'est fondée sur ce que, compte tenu des contraintes budgétaires et des priorités de la politique du personnel, l'attribution de cette bonification aux chefs de travaux contractuels des lycées professionnels et techniques privés sous contrat d'association était subordonnée à l'intervention de dispositions réglementaires expresses qui n'avaient pas été prises ; que la cour a ainsi entaché sonarrêt d'une erreur de droit et que M. X... est, dès lors, fondé à en demander l'annulation ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les dispositions du décret du 6 décembre 1991 s'appliquent de plein droit aux chefs de travaux contractuels des lycées professionnels et des lycées techniques privés sous contrat d'association ; que, dès lors, le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 4 octobre 1995, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 24 septembre 1992 refusant à M. X... le versement de la nouvelle bonification indiciaire ;
Sur les conclusions de M. X... relatives au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à verser à M. X... une somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt n° 95NT01588 de la cour administrative de Nantes du 22 juillet 1999 est annulé.
Article 2 : Le recours du ministre de l'éducation nationale devant la cour administrative d'appel de Nantes est rejeté.
Article 3 : L'Etat versera à M. X... une somme de 10 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Joël X... et au ministre de l'éducation nationale.