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11/04/2001 | FRANCE | N°202218

France | France, Conseil d'État, 9 / 10 ssr, 11 avril 2001, 202218


Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jean-Pierre X..., demeurant ... Porte d'Asnières à Paris (75017) ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 23 septembre 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le jugement du 26 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Grenoble l'avait déchargé de la somme de 73 596 F à lui réclamée au titre des versements assignés à la société civile "Accords Formation" en matière de participation à la formation professionnel

le pour les années 1986 et 1987, et a remis à sa charge ladite somme...

Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jean-Pierre X..., demeurant ... Porte d'Asnières à Paris (75017) ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 23 septembre 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le jugement du 26 décembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Grenoble l'avait déchargé de la somme de 73 596 F à lui réclamée au titre des versements assignés à la société civile "Accords Formation" en matière de participation à la formation professionnelle pour les années 1986 et 1987, et a remis à sa charge ladite somme ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel que, le 31 mars 1994, le receveur principal des impôts de Chambéry-Est a, en fondant cette mise en cause sur les dispositions de l'article 1857 du code civil, adressé à M. X..., qui, du 15 décembre 1985 au 30 juin 1987, avait détenu le cinquième des parts de la société civile "Accords Formation", une mise en demeure de lui verser la somme de 73 596 F, représentative d'une fraction de versements mis à la charge de cette société, par un avis de mise en recouvrement du 8 janvier 1990 et au titre des années 1986 et 1987, en application des dispositions de l'article L. 920-10 du code du travail en vertu desquelles les organismes dispensateurs de formation professionnelle sont tenus, lorsque des dépenses qu'ils ont faites pour l'exécution d'une convention de formation "ne sont pas admises parce qu'elles ne peuvent, par leur nature, être rattachées à l'exécution d'une convention de formation ou que le prix des prestations est excessif", de verser au Trésor public une somme égale au montant de ces dépenses ; que, le 20 mai 1994, M. X..., entendant exercer le droit, ouvert à toute personne à l'encontre de laquelle est poursuivi le recouvrement d'une créance que l'Etat détient sur un tiers, de contester le bien-fondé ou la régularité de l'obligation mise à la charge de ce tiers, a saisi le directeur des impôts de la région Rhône-Alpes d'une réclamation tendant à la décharge des versements assignés à la société "Accords Formation" ; que, le directeur régional ayant rejeté cette réclamation, M. X... s'est pourvu devant le tribunal administratif de Grenoble qui, par jugement du 26 décembre 1995, a prononcé la décharge qu'il demandait ; que la cour administrative d'appel de Lyon, sur recours du ministre de l'économie et des finances, a, par l'arrêt attaqué, du 23 septembre 1998, annulé ce jugement et rétabli les versements litigieux, au motif que le bien-fondé ou la régularité n'en pouvait utilement être contesté "dans le cadre d'une procédure autre que le recours pour excès de pouvoir organisé par l'article R. 950-25 du code du travail" ;

Considérant que, d'une part, aux termes de l'article R. 950-25 du code du travail, dans la rédaction résultant du décret n° 85-106 du 23 janvier 1985 : "Dans le cas où il est envisagé de rejeter tout ou partie des dépenses invoquées par un employeur, ce dernier doit recevoir notification des conclusions du contrôle effectué et être avisé en même temps qu'il dispose d'un délai de trente jours, à compter de cette notification, pour présenter des observations écrites et demander, le cas échéant, à être entendu. La décision du ministre chargé de la formation professionnelle ou du commissaire de la République de la région ne peut être prise qu'au vu de ces observations et après audition, le cas échéant, de l'employeur ... Cette décision, qui doit être motivée, est notifiée à l'intéressé ... La procédure déterminée à l'alinéa précédent est applicable aux dispensateurs de formation. Si l'employeur ou le dispensateur de formation entend contester la décision administrative qui lui a été notifiée ..., il doit, préalablement à tout recours pour excès de pouvoir, saisir d'une réclamation l'autorité administrative qui a pris la décision ..." ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 920-11 du même code : "Les versements au Trésor public visés aux articles L. 920-9 et L. 920-10 sont recouvrés selon les modalités, ainsi que sous les sûretés, garanties et pénalités applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires" ; qu'aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales : "Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable de la direction générale des impôts à tout redevable de sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe ...", et qu'en vertu de l'article L. 190 du même livre, les réclamations relatives à l'assiette des "impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature ... recouvrés par les agents de la direction générale des impôts" relèvent du contentieux de l'établissement de l'impôt dont les règles sont définies par ledit livre, et comportent, notamment, que ces réclamations doivent être présentées au directeur des services fiscaux territorialement compétent après la mise en recouvrement du rôle ou la notification de l'avis de mise en recouvrement ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le bien-fondé ou la régularité de la procédure à l'issue de laquelle il est procédé à l'établissement des versementsprévus à l'article L. 920-10 du code du travail peut être contesté par les organismes dispensateurs de formation intéressés, tant au soutien d'une réclamation présentée au ministre chargé de la formation professionnelle ou au préfet de région, en préalable à un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation de la décision de rejet de certaines dépenses qu'a prise celui-ci, qu'au soutien d'une réclamation présentée au directeur des services fiscaux postérieurement à l'émission de l'avis de mise en recouvrement d'un versement de montant égal à celui desdites dépenses, et tendant à la décharge de ce versement ;
Considérant qu'il suit de là que la cour administrative d'appel, en statuant ainsi qu'il a été dit ci-dessus, a commis une erreur de droit ; que M. X... est, dès lors, fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article L. 821-2, 1er alinéa, du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;
Considérant que, pour demander l'annulation du jugement dont il fait appel, le ministre de l'économie et des finances se borne à soutenir que les premiers juges ont admis à tort la recevabilité d'une réclamation présentée au directeur des services fiscaux en vue d'obtenir la décharge de versements établis sur le fondement de l'article L. 920-10 du code du travail, par des moyens tirés du mal-fondé de ces versements ou de l'irrégularité de la procédure à l'issue de laquelle ils ont été mis en recouvrement ; que ce moyen, ainsi qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, n'est pas fondé ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement qu'il critique ainsi, le tribunal administratif a prononcé la décharge que demandait M. X... ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'ordonner que l'Etat versera à M. X..., en remboursement des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens, la somme de 20 000 F ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 23 septembre 1998 est annulé.
Article 2 : Le recours présenté devant la cour administrative d'appel de Lyon par le ministre de l'économie et des finances est rejeté.
Article 3 : L'Etat versera à M. X... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 20 000 F.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Pierre X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 9 / 10 ssr
Numéro d'arrêt : 202218
Date de la décision : 11/04/2001
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-05-06 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS ASSIS SUR LES SALAIRES OU LES HONORAIRES VERSES - PARTICIPATION DES EMPLOYEURS AU FINANCEMENT DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE CONTINUE


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L256, L190
Code civil 1857
Code de justice administrative L821-2, L761-1
Code du travail L920-10, R950-25, L920-11
Décret 85-106 du 23 janvier 1985


Publications
Proposition de citation : CE, 11 avr. 2001, n° 202218
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Fabre
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:202218.20010411
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