Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 octobre 1999, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 5 juin 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 15 octobre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Julio César Y...
X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Segura X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme de Margerie, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Segura X..., de nationalité péruvienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 10 juin 1998, de l'arrêté du 5 juin 1998 par lequel le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. Segura X..., célibataire, sans enfant, a fait valoir qu'il est entré en France en 1991, à 26 ans, et y séjourne depuis lors auprès de sa mère et de ses frère et soeur qui résident régulièrement en France ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. Segura X... est entré en France comme demandeur d'asile en 1991, que ses demandes successives de reconnaissance de la qualité de réfugié ont été rejetées par l'office français de protection des réfugiés et apatrides ; qu'ayant fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière le 22 décembre 1992, il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français ; qu'il ne justifie d'aucune activité ; qu'il ne soutient pas être dépourvu de tout lien dans son pays d'origine ; que, dans ces circonstances et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, cet arrêté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que c'est, dès lors, à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué qui est suffisamment motivé, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce qu'il méconnaissait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Segura X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'à la date à laquelle M. Segura X... a demandé l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, soit le 27 octobre 1998, la décision du 5 juin 1998 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, qu'il n'avait pas contestée dans le délai du recours contentieux, était devenue définitive ; qu'il n'est, dès lors, pas recevable à exciper de son illégalité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement du 5 juin 1999 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif a annulé son arrêté du 15 octobre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Segura X... ;
Considérant que la présente décision qui rejette la demande de M. Segura X..., n'appelle aucune mesure d'exécution au sens de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DE POLICE de lui délivrer un titre de séjour, ne sont, dès lors, pas recevables ;
Article 1er : Le jugement du 5 juin 1999 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par M. Segura X... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Julio Cesar Y...
X... et au ministre de l'intérieur.