Vu la requête enregistrée le 17 mai 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Emmanuel Y... demeurant chez M. Joseph X..., ... ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 12 avril 2000 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 23 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y... et fixant l'Irak comme pays de destination ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 23 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y... et fixant l'Irak comme pays de destination ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Derepas, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ( ...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Emmanuel Y..., qui est de nationalité irakienne, s'est maintenu sur le territoire national plus d'un mois après la notification, le 7 juillet 1999, de la décision du préfet du Rhône en date du 30 juin 1999 lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il se trouvait ainsi dans la situation prévue au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans laquelle le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 241-10, alors applicable, du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Les parties doivent être averties par tous moyens de la date, de l'heure et du jour de l'audience" ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à plusieurs reprises un officier de police judiciaire s'est présenté à l'adresse indiquée par M. Y... dans sa demande, présentée sans le ministère d'un avocat, afin de l'informer de la date de l'audience ; qu'eu égard à la brièveté du délai de quarante-huit heures imparti par la loi au tribunal administratif pour statuer sur les recours dirigés contre les décisions de reconduite à la frontière, M. Y... n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas été régulièrement averti du jour de l'audience ;
Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de l'arrêté du 23 mars 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y..., qui ne précise pas le pays de destination ;
Considérant qu'à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision distincte du 23 mars 2000 fixant l'Irak comme pays de destination, M. Y... fait valoir qu'en raison des risques encourus personnellement en cas de retour dans son pays d'origine, cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant toutefois que M. Y... n'apporte aucune précision, justification ou document propre à établir la réalité de tels risques, dont d'ailleurs, ni l'office français de protection des réfugiés et apatrides le 5 octobre 1998 ni la commission des recours des réfugiés le 26 mars 1999 n'ont reconnu l'existence ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 23 mars 2000 ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision distincte de la même date fixant l'Irak comme pays de destination ;
Sur les conclusions de M. Y... tendant au paiement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, reprises à l'article L. 761-1 du code de justice administrative, font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. Y... la somme de 5 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Emmanuel Y..., au préfet du Rhône et au ministre de l'intérieur.