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04/05/2001 | FRANCE | N°208635;208637

France | France, Conseil d'État, 4 / 6 ssr, 04 mai 2001, 208635 et 208637


Vu 1°), sous le n° 208635, la requête enregistrée le 4 juin 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSOCIATION DES COMMERCANTS DE LA RUE MARCEL SEMBAT à Verneuil l'Etang dont le siège social est situé au salon de coiffure "Yves X..." rue Marcel Sembat à Verneuil l'Etang (77390), représentée par son président en exercice ; l'association demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision du 19 janvier 1999 de la commission nationale d'équipement commercial accordant à la société comptoirs modernes union commerciale l'autorisation de cr

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Vu 1°), sous le n° 208635, la requête enregistrée le 4 juin 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSOCIATION DES COMMERCANTS DE LA RUE MARCEL SEMBAT à Verneuil l'Etang dont le siège social est situé au salon de coiffure "Yves X..." rue Marcel Sembat à Verneuil l'Etang (77390), représentée par son président en exercice ; l'association demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision du 19 janvier 1999 de la commission nationale d'équipement commercial accordant à la société comptoirs modernes union commerciale l'autorisation de créer sur la commune de Guignes-Rabutin une station de distribution de carburants et de bouteilles de gaz annexée à un supermarché à l'enseigne "Stoc" ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu 2°), sous le n° 208637, la requête enregistrée le 4 juin 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSOCIATION DES COMMERCANTS DE LA RUE MARCEL SEMBAT à Verneuil L'Etang dont le siège social est situé au salon de coiffure "Yves X..." rue Marcel Sembat à Verneuil l'Etang (77390), représentée par son président en exercice ; l'association demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision du 19 janvier 1999 de la commission nationale d'équipement commercial accordant à la société Comptoirs modernes union commerciale l'autorisation d'exploiter sur la commune de Guignes-Rabutin un supermarché à l'enseigne "Stoc" d'une surface de vente de 1 600 m2 ;
2°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 20 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1993 modifiée d'orientation du commerce et de l'artisanat ;
Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 modifié ;
Vu l'arrêté du 12 décembre 1997 fixant le contenu de la demande d'autorisation d'exploitation de certains magasins de commerce de détail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Struillou, Maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de l'ASSOCIATION DES COMMERCANTS DE LA RUE MARCEL SEMBAT à Verneuil l'Etang présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la commission nationale d'équipement commercial et la société comptoirs modernes union commerciale ;
Considérant que par deux décisions du 19 janvier 1999 la commission nationale d'équipement commercial a autorisé la société comptoirs modernes union commerciale à créer sur le territoire de la commune de Guignes-Rabutin, d'une part, un supermarché Stoc d'une surface de vente de 1 600 m2 et, d'autre part, une station de distribution de carburants et de bouteilles de gaz de 105 m2 de surface de vente annexée à ce supermarché ;
Sur les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure :
Considérant qu'aux termes de l'article 30 du décret susvisé du 9 mars 1993 : "La commission nationale d'équipement commercial ... ne peut valablement délibérer qu'en présence de cinq membres" ; qu'il ressort des énonciations du procès-verbal de la séance tenue par la commission le 19 janvier 1999 que sept membres étaient présents ; qu'ainsi, l'association requérante n'est pas fondée à prétendre que les décisions attaquées auraient été prises en méconnaissance des dispositions réglementaires précitées ; que si ces décisions ne mentionnent pas que le quorum exigé par ces dispositions avait été atteint, cette circonstance est sans incidence sur leur légalité ;
Sur les moyens tirés des insuffisances et des erreurs des renseignements accompagnant les demandes d'autorisation :
En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées du décret du 26 novembre 1996 :
Considérant qu'aux termes de l'article 18-1 ajouté au décret du 9 mars 1993 par le décret du 26 novembre 1996 : "Pour les projets de magasin de commerce de détail, la demande ... est accompagnée ... b) des renseignements suivants : 1° Délimitation de la zone de chalandise du projet ... 2° Marché théorique de la zone de chalandise ; 3° Equipement commercial et artisanal de la zone de chalandise ... 4° Equipements commerciaux exerçant une attraction sur la zone de chalandise ..." c) d'une étude destinée à permettre à la commission d'apprécier l'impact prévisible du projet au regard des critères prévus par l'article 28 de la loi du 27 décembre 1973 et justifiant du respect des principes posés par l'article 1er de la même loi. Celle-ci comporte : 1° Une estimation argumentée de l'impact du projet au regard des objectifs définis au quatrième alinéa de l'article 1er de la loi ... 3° Une analyse des effets du projet sur l'emploi sous la forme d'un bilan, établi en nombre d'emplois en équivalent temps plein, des emplois créés par le projet et des emplois salariés, d'une part, et non salariés, d'autre part, dont l'existence est susceptible d'être menacée par celui-ci dans la zone de chalandise ..." ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces que les moyens tirés de ce que le pétitionnaire aurait omis de préciser dans ses demandes que les cartes se rapportant au site du projet avaient été établies à l'échelle prescrite et aurait porté des indications inexactes relatives à la densité moyenne au niveau national des surfaces commerciales des hypermarchés et des supermarchés manquent en fait ; que, dès lors qu'en raison des installations commerciales situées dans les communes de Mormant et de Fontenay-Trésigny les deux projets en cause n'étaient pas susceptibles d'y exercer un effet d'attraction, le pétitionnaire a pu valablement exclure ces communes des zones de chalandise et les établissements y étant implantés de l'analyse de l'offre commerciale existant dans ces zones ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que les renseignements joints aux demandes d'autorisation n'auraient pas satisfait aux exigences résultant des dispositions précitées du décret du 26 novembre 1996 doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, que le moyen tiré de ce que les études d'impact jointes aux demandes auraient omis de prendre en compte les effets qu'étaient susceptibles d'avoir les projets en cause sur les équipements commerciaux installés sur le territoire de la commune de Mormant manque également en fait ; que l'association requérante ne présente pas les éléments de nature à infirmer le bilan, établi par le pétitionnaire, entre le nombre d'emplois créés et celui des emplois susceptibles d'être menacés par les projets ; qu'ainsi, les études d'impact jointes aux demandes d'autorisations satisfaisaient aux exigences prévues par le décret du 26 novembre 1996 ;
En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'arrêté du 12 décembre 1997 :
Considérant qu'aux termes du dernier alinéa du III de l'article 30 de la loi du 27 décembre 1973 : "Les demandes d'autorisation sont présentées selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat" ; que si le dernier alinéa de l'article 18-1 du décret du 9 mars 1993 autorise le ministre chargé du commerce et de l'artisanat à préciser par arrêté "en tant que de besoin les modalités de présentation de la demande", ledit arrêté n'a pu avoir pour objet et ne pouvait avoir légalement pour effet d'imposer des formalités autres que celles résultant de ce décret ou qui sont nécessairement impliquées par lui ; qu'il suit de là que doit être regardé comme étant sans incidence sur la légalité des décisions attaquées et, par suite être rejeté, le moyen tiré de ce que le pétitionnaire n'aurait pas satisfait à des prescriptions dudit arrêté autres que celles que le décret, qui lui sert de fondement, exige ou qu'il implique nécessairement ;
Sur les autres moyens des requêtes :

Considérant qu'en vertu de l'article 28 de la loi du 27 décembre 1973, dans sa rédaction alors en vigueur, la commission départementale d'équipement commercial et, sur recours, la commission nationale d'équipement commercial statuent sur les demandes d'autorisation qui leur sont soumises suivant les principes définis par les articles 1er, 3 et 4 de la loi, en vertu desquels le régime d'autorisation des créations et extensions de grandes surfaces commerciales a pour objet d'éviter "qu'une croissance désordonnée des formes nouvelles de distribution ne provoque l'écrasement de la petite entreprise et le gaspillage des équipements commerciaux" ; que, pour rechercher si les projets de création ou d'extension qui lui sont soumis sont conformes à ces exigences, la commission nationale d'équipement commercial doit, notamment examiner la situation des équipements commerciaux dans la zone où réside la clientèle potentielle de l'établissement concerné ; que, par ailleurs, la commission statue "en prenant en considération ... les engagements des demandeurs de création de magasins de détail à prédominance alimentaire de créer dans des zones de redynamisation urbaine ou les territoires ruraux de développement prioritaire des magasins de même type, d'une surface inférieure à 300 m2, pour au moins 10% des surfaces demandées" ;
En ce qui concerne l'autorisation de créer un supermarché :

Considérant qu'il n'est pas établi que les indications chiffrées relatives à la densité des surfaces commerciales des magasins de plus de 300 m2 au niveau national et départemental, au vu desquelles la commission a apprécié la conformité du projet de création de supermarché, aient été inexactes ; que pour examiner la situation des équipements commerciaux, la commission nationale d'équipement commercial devait prendre en compte non seulement les surfaces commerciales des hypermarchés mais également celles des supermarchés ; qu'il est constant qu'à la date à laquelle la commission a statué la densité des surfaces commerciales des magasins de plus de 300 m2 dans la zone de chalandise était notoirement inférieure aux moyennes nationale et départementale alors que la population résidant dans cette zone, estimée à 15 000 habitants, avait augmenté de 23,5% entre 1982 et 1990 ; que l'insuffisance des équipements commerciaux qui était constatée dans la zone de chalandise conduisait la population y résidant à effectuer leurs achats dans les établissements commerciaux se situant hors de cette zone ; que le projet en cause avait notamment pour objet de freiner cette évolution ; que, dans ces conditions, alors même que l'impact du projet sur les commerces locaux alimentaires a pu être sous-estimé par le pétitionnaire, la commission nationale d'équipement commercial n'a pas fait une fausse application de la loi en estimant que le projet n'était pas de nature, eu égard à l'importance des besoins non satisfaits par les établissements commerciaux situés dans la zone de chalandise, à entraîner un écrasement des commerces locaux et la disparition des emplois locaux correspondants ; que, dans les circonstances de l'espèce, la seule absence d'engagement du demandeur à créer des magasins de détail à prédominance alimentaire dans "les zones de redynamisation urbaine" ou les "territoires ruraux de développement prioritaire" ne faisait pas obstacle à la délivrance de l'autorisation demandée ; que si la commission nationale d'équipement commercial a commis une erreur de droit en fondant également sa décision sur les avantages qu'aurait comporté le projet présenté par la société comptoirs modernes union commerciale par rapport à un projet concurrent, il ressort des pièces du dossier qu'elle aurait pris la même décision si elle n'avait retenu que les seuls éléments se rapportant au projet autorisé ;

En ce qui concerne l'autorisation de créer une station de distribution de carburants et de bouteilles de gaz annexée au supermarché :
Considérant que le projet en cause prévoyait la création d'une station-service comportant quatre positions de ravitaillement, la zone de chalandise ne comprenant à la date de la décision de la commission nationale que cinq stations disposant au total de vingt-deux postes de ravitaillement ; que, compte tenu de la croissance de la population résidant dans la zone, de la forte propension des consommateurs locaux à s'approvisionner auprès des établissements situés en dehors de celle-ci et de l'importance de la clientèle de passage sur la route nationale 19, la commission nationale n'a pas procédé à une fausse application de la loi en estimant que le projet n'était pas de nature à entraîner l'écrasement des commerces ayant la même activité et la disparition des emplois correspondants ; que le moyen tiré de ce que la prétendue illégalité de l'autorisation de créer le supermarché entacherait d'illégalité l'autorisation de création d'une station-service annexée à ce supermarché ne peut, eu égard à ce qui a été dit ci-dessus, qu'être écarté ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ..." ;
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'ASSOCIATION DES COMMERCANTS DE LA RUE MARCEL SEMBAT à Verneuil l'Etang à payer à la société comptoirs modernes union commerciale la somme de 15 000 F au titre des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à l'ASSOCIATION DES COMMERCANTS DE LA RUE MARCEL SEMBAT à Verneuil l'Etang la somme qu'elle demande au titre des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes de l'ASSOCIATION DES COMMERCANTS DE LA RUE MARCEL SEMBAT à Verneuil l'Etang sont rejetées.
Article 2 : L'ASSOCIATION DES COMMERCANTS DE LA RUE MARCEL SEMBAT à Verneuil l'Etang versera une somme de 15 000 F à la société comptoirs modernes union commerciale au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION DES COMMERCANTS DE LA RUE MARCEL SEMBAT à Verneuil l'Etang, à la société comptoirs modernes union commerciale, à la commission nationale d'équipement commercial et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 4 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 208635;208637
Date de la décision : 04/05/2001
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE AUTORITES DISPOSANT DU POUVOIR REGLEMENTAIRE - AUTORITES DISPOSANT DU POUVOIR REGLEMENTAIRE - MINISTRES - MINISTRE CHARGE DU COMMERCE - Pouvoir de préciser les modalités de présentation des demandes d'autorisation de création de grandes surfaces (loi du 27 décembre 1973) - Etendue - Portée de l'arrêté ministériel du 12 décembre 1997.

01-02-02-01-03-03, 14-02-01-05-02 Aux termes du dernier alinéa du III de l'article 30 de la loi du 27 décembre 1973 : "Les demandes d'autorisation sont présentées selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat". Si le dernier alinéa de l'article 18-1 du décret du 9 mars 1993 autorise le ministre chargé du commerce et de l'artisanat à préciser par arrêté "en tant que de besoin les modalités de présentation de la demande", les arrêtés pris par le ministre sur ce fondement ne peuvent avoir ni pour objet ni pour effet d'imposer des formalités autres que celles résultant de ce décret ou qui sont nécessairement impliquées par lui. Est par suite sans influence sur la légalité d'une autorisation délivrée la circonstance que le pétitionnaire n'aurait pas satisfait à des prescriptions posées par l'arrêté ministériel du 12 décembre 1997 autres que celles que le décret, qui lui sert de fondement, exige ou qu'il implique nécessairement.

COMMERCE - INDUSTRIE - INTERVENTION ECONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REGLEMENTATION DES ACTIVITES ECONOMIQUES - ACTIVITES SOUMISES A REGLEMENTATION - URBANISME COMMERCIAL (LOI DU 27 DECEMBRE 1973 MODIFIEE) - PROCEDURE - Composition du dossier de demande d'autorisation - Pouvoirs du ministre - Etendue - Portée de l'arrêté ministériel du 12 décembre 1997.


Références :

Arrêté du 12 décembre 1997
Code de justice administrative L761-1
Décret du 26 novembre 1996
Décret 93-306 du 09 mars 1993 art. 30, art. 18-1
Loi 73-1193 du 27 décembre 1973 art. 28, art. 1, art. 30, art. 3, art. 4


Publications
Proposition de citation : CE, 04 mai. 2001, n° 208635;208637
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: M. Struillou
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:208635.20010504
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